>>Donner plus de vie au Robam
Selon Lâm Thi Huong, directrice de la troupe de Robam Bung Chông (alias Vong Robam Ba Sak), une séance de représentation de Robam nécessite un Srolai (hautbois), un Sam phô (tam-tam à deux faces), des gongs... Chaque instrument à un rôle important, et est joué soit rapidement, soit lentement selon la scène. Dans les pièces de la troupe de Robam Bung Chông, le son du Srolai retentit tout au long des 120 minutes de représentation.
Le Srolai, qui mesure 30 cm de long, est en bois de lim. Il comporte huit trous et une hanche en feuille de palmier à sucre séchée. Pour en tirer le meilleur, il faut le tremper dans l’eau pendant cinq minutes avant d’en jouer. Un secret transmis de génération en génération.
Le Srolai, la fierté des Khmers |
Personne pour reprendre le flambeau
Pour former un bon joueur de Srolai, il faut au moins cinq à sept ans de pratique. En général, l’enseignement commence vers l’âge de 12 ans. Le jeune accompagne souvent les artistes expérimentés jusqu’à l’âge de 18 ou 20 ans.
Comme dans le cas de beaucoup d’instruments traditionnels, la relève tarde à venir. Trouver la perle rare revient presque à «chercher une aiguille dans une meule de foin». L’expérience de la troupe de Robam Basak a montré qu’à travers six générations d’artistes, avec une centaine de personnes qui se sont mises au Srolai, à chaque génération, une seule a été capable d’en jouer parfaitement.
Dans une pièce de Robam, cet instrument doit retentir continuellement et couvrir les sons des tam-tams Sam phô et des gongs. Ainsi, il doit jouer 15 à 20 minutes non-stop, sans s’arrêter ne serais-ce qu’une seconde, sans baisser de rythme sous peine de perturber les danseurs. «Il faut du souffle, du coffre, et être capable de respirer tout en jouant, c’est là le plus difficile», considère Mme Lâm Thi Huong.
Soucis du dernier joueur de Srolai
Lâm Quên, seul joueur de Srolai de la troupe de Robam Basak, s’est installé dans le pays natal de sa femme dans le district de Vinh Loi, province de Bac Liêu, loin de Soc Trang où il est né. Son inquiétude est moins dans le désintéressement croissant du public pour le Robam que dans la transmission du Srolai. Après lui, qui reprendra le flambeau ?
«Quand j’étais petit, je vivais dans une ambiance imprégnée de Robam. Pas étonnant donc que le son du Srolai coule dans mes veines. Savoir en jouer est vraiment difficile. Je veux que mes enfants l’apprennent mais ce n’est pas gagné. Car à côté de la passion, de l’entraînement quotidien, il y a aussi un facteur qui nous échappe, que l’on pourrait qualifier de prédestination pour cet instrument», confie-t-il.
La troupe de Robam Basak, qui compte une trentaine de personnes, n’est pas arrivée à trouver une personne capable de remplacer Lâm Quên. Toutefois, ce dernier reste optimiste. Jour après jour, il enseigne cet art à ses deux enfants et à d’autres jeunes passionnés.
Le Robam, qui a connu son âge d’or aux XIXe et XXe siècles, est une fierté des Khmers. Pour éviter que cet art ne disparaisse complètement, à côté des efforts de l’unique et dernière troupe, il faudra aussi qu’il retrouve une vrai place au sein de la société khmère. Et c’est peut-être cela le plus difficile...
Diêu An/CVN