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Inutile de rappeler que le Vietnam relève de la civilisation du riz au sujet de laquelle Braudel et Gourou nous ont appris tant de choses: 90% de la surface rizicole du monde est située en Asie dont la production de riz nourrit 40% de la population du globe. Depuis la reconquête de son indépendance en 1945, le Vietnam, en dépit de 30 ans de guerre, a déployé de grands efforts pour améliorer la qualité de son riz et augmenter sa production agricole en vue de l’exportation. En 2013, il est devenu le premier exportateur de riz mondial, dépassant la Thaïlande. Dans le cadre de la mondialisation et de la Francophonie, le Vietnam a partagé ses expériences en riziculture avec l’ancienne colonie française du Sénégal.
Convention tripartite Vietnam-Sénégal-FAO
Mise en place par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), dans le cadre de son Programme spécial pour la sécurité alimentaire (PSSA), la convention tripartite Vietnam-Sénégal-FAO, signée à Dakar en 1996, a permis de lancer de petits projets ruraux adaptés au milieu, peu onéreux, à base de techniques simples et de promotion de l’économie villageoise. Sur le terrain, les organisations paysannes sénégalaises travaillent en étroite collaboration avec des experts vietnamiens (43 en 1997, 120 en l’an 2000), répartis à travers le pays. Les projets ont porté dans un premier temps sur les exploitations rizicoles, dans les zones où les ressources en eau sont disponibles.
Le Vietnam a envoyé nombreuses missions dans les pays africains pour les aider dans l’agriculture. |
En 16 mois au Sénégal, les Vietnamiens ont réussi à impliquer les hommes dans la culture du riz considérée comme exclusivement féminine. Désormais, un micro-barrage de ciment protège la rizière des crues du fleuve Gambie, une quinzaine de petites digues retiennent l’eau de pluie là où elle se perdait auparavant, dans la nature. Dans la région de Fatick, le paysan Diémou a récolté 25 tonnes de paddy, soit 5 tonnes à l’hectare contre 700 à 800 kg/ha autrefois, durant les bonnes années. Aujourd’hui, le village est presque autosuffisant.
À Shanghui, une première culture de patate douce sur une superficie de 2,2 ha rapporte aux villageois 27 tonnes de tubercules évaluées à 4 millions de francs CFA (franc des colonies françaises d’Afrique). La culture de la patate douce n’est pas une nouveauté au Sénégal, mais la disposition précise de cette culture dans la structure culturale est une réalisation des techniciens vietnamiens, grâce à la construction d’un jardin collectif conçu avec un système d’arrosage.
En janvier dernier, les paysans de Fatick se disaient «très satisfaits du rendement de la patate douce», soit près de 30 tonnes à l’hectare, et la superficie cultivée a été considérablement développée dans toute la région. Les coopérants de Hanoi animent aussi d’autres projets visant à améliorer l’ordinaire et favoriser l’autosuffisance des foyers ruraux (apiculture, fabrication du nuoc mam, de barques en tôle pour remplacer les traditionnelles pirogues en bois, techniques du maraîchage). La prochaine étape du programme sera d’étendre le projet à l’ensemble du territoire.
Des expériences se généralisent
Le projet rizicole sénégalais a fait tâche d’huile. D’autres pays africains recherchent l’expertise vietnamienne pour promouvoir la production de riz. C’est ce que nous apprend l’éminent agronome Vo Tong Xuân qui a fait de grands efforts depuis plusieurs années : «J’étais venu en Afrique la première fois en 1984 pour participer à une conférence sur le riz à l’Institut international de l’agriculture tropicale (IITA) à Ibadan au Nigeria. Par la suite, j’ai eu l’occasion de prendre part à d’autres conférences agricoles internationales en Afrique (Kenya, Éthiopie, Madagascar).
En 2006, la compagnie allemande BHB GmbH partenaire économique de la Sierra Leone, m’a proposé d’aider ce pays à produire du riz. J’ai eu une rencontre avec l’ambassadeur du Sierra Leone à Pékin. Après discussion, dans le café d’un hôtel, nous avons signé un mémorandum en présence d’un représentant de la compagnie BHB GmbH, m’engageant à étudier dans ce pays d’Afrique les conditions pour y implanter le riz vietnamien. J’ai été très bien accueilli à Freetown, par le vice-président, le ministre de l’Agriculture, les responsables des services agricoles. Au terme de ce voyage d’étude, j’ai adressé un rapport à notre ministre de l’Agriculture et du Développement rural, lui demandant un soutien financier à un projet d’implantation rizicole en Sierra Leone.
La convention tripartite Vietnam-Sénégal-FAO a permis de lancer de petits projets ruraux adaptés au milieu, peu onéreux, à base de techniques simples. |
Photo : CTV/CVN |
En attendant, j’ai mobilisé l’aide des hommes d’affaires vietnamiens, ce qui m’a permis d’envoyer à la Sierre Leone un groupe de cinq experts pour expérimenter la plantation d’espèces de riz vietnamien sur une surface de 100 ha. Nous avons trouvé que l’espèce OM 2417 convient le mieux à la Sierra Leone (courte durée du cycle cultural, haut rendement).
Les résultats positifs de nos expériences en Sierra Leone ont poussé d’autres pays africains à solliciter notre aide: Nigéria, Soudan, Mozambique, Rwanda, Burundi, Liberia, Ghana. L’Afrique dispose d’un immense espace agricole, de bonnes conditions hydrauliques dans certaines régions mais dans l’ensemble, la paysannerie n’est pas apte à adopter les techniques de l’agriculture intensive, ce qui explique l’échec de nombreux programmes d’aide agricole de l’Occident.
Des programmes d’aide à l’implantation rizicole de notre VAADCO (la Sarl de développement des produits agricoles et sylvicoles Vietnam-Afrique, ndlr) sont en marche dans quelques pays d’Afrique depuis plusieurs années. En nous basant sur les réalités africaines, nous réalisons chaque projet en quatre temps :
1. Détermination des espèces de riz appropriées.
2. Multiplication des semences.
3. Élaboration d’un système hydraulique ou d’un système d’utilisation d’eau de pluie.
4. Organisation de la production rizicole avec l’emploi des paysans indigènes dirigés concrètement tâche par tâche par des paysans vietnamiens».
Huu Ngoc/CVN