Dans une résolution très ferme adoptée après plus de dix heures de débats, le parlement a qualifié les attaques de drones d' "inacceptables". Le texte a été adopté quelques heures après la revendication par les talibans pakistanais d'un double attentat suicide à la bombe qui a tué le 13 mai 89 personnes, première attaque d'envergure pour venger la mort de Ben Laden.
Environ 140 personnes ont été blessées, dont 40 sont dans un état critique, au cours de cet attentat contre des cadets de la police qui est le plus grave perpétré cette année.
À l'aube, à Shabqadar, bourgade du Nord-Ouest, un kamikaze à moto a fait exploser sa bombe au moment où les élèves, qui avaient revêtu leurs habits civils, s'apprêtaient à monter dans les cars et les minibus devant les ramener chez eux pour dix jours de permission, a expliqué Nisar Khan Marwat, le chef de la police du district de Charsadda.
L'attentat visait un centre d'entraînement de la Frontier Constabulary, une unité paramilitaire de la police chargée de surveiller les frontières. Puis, au moment même où policiers et secouristes s'étaient massés pour aider les blessés, un autre kamikaze à moto a provoqué un second carnage.
Les talibans pakistanais, qui ont fait allégeance à Al-Qaïda et procèdent à une campagne d'attentats extrêmement meurtrière au Pakistan, avaient promis des représailles contre Islamabad et ses forces de sécurité, qu'ils accusent de complicité dans le raid américain fatal contre Ben Laden.
Le patron des services de renseignement pakistanais, le général Ahmad Shujaa Pasha, a d'ailleurs offert le 13 mai au parlement de démissionner à la suite du raid américain, a-t-on appris le 14 mai de sources parlementaires. Le chef de l'Inter-Services Intelligence (ISI) a fait cette offre avant le vote de la résolution.
Selon la presse, le Premier ministre, Yousuf Raza Gilani, et le chef de l'armée, le général Ashfaq Kayani, lui ont instamment demandé de ne pas démissionner.
Au parlement, les élus ont évoqué le 14 mai le raid américain et les tirs de drones. "Ces attaques de drones doivent être stoppées (...) Dans le cas contraire, le gouvernement devra être contraint d'étudier des mesures nécessaires, dont le retrait des autorisations de transit accordées à l'OTAN" vers l'Afghanistan, selon les parlementaires.
La plupart du matériel utilisé par les forces internationales en Afghanistan passe par le Nord-Ouest du Pakistan. Les convois sont souvent attaqués par les insurgés.
Le parlement a également appelé le gouvernement à "nommer une commission indépendante sur l'opération d'Abbottabad", ville pakistanaise où le chef d'Al-Qaïda a été tué le 2 mai par un commando américain, et à envisager "les mesures nécessaires pour s'assurer qu'un tel incident ne se reproduise plus".
De son côté, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a apporté le 13 mai son soutien au Pakistan meurtri par deux nouveaux attentats suicide qui ont fait au moins 80 morts dans le Nord-Ouest du pays.
"Les Nations unies se tiennent au côté du Pakistan dans ses efforts pour combattre le terrorisme qui continue de coûter la vie à tant de ses citoyens", a déclaré M. Ban, cité par son porte-parole Martin Nesirky dans un communiqué.
Le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a condamné le 14 mai le double attentat suicide au Pakistan, en insistant sur la nécessité pour ce pays et l'alliance de faire front ensemble aux extrémistes.
"C'est choqué et triste que j'ai appris la mort de quelque 80 cadets des forces paramilitaires dans une attaque terroriste", a déclaré M. Rasmussen dans une lettre au président pakistanais Asif Ali Zardari, diffusée par ses services de presse. Entamée en 2004, la campagne des drones de la CIA s'est nettement intensifiée depuis l'été 2008 et les salves sont devenues ces derniers mois quasi-quotidiennes au Pakistan. En 2010, une centaine de tirs ont fait plus de 670 morts, selon les responsables militaires, dont un nombre indéterminé de civils.
Le Premier ministre pakistanais avait estimé le 12 mai que les attaques de drones américains devraient être, pour plus d'efficacité, placées sous la supervision d'Islamabad.
AFP/VNA/CVN