Le Kenya, choqué au lendemain du massacre de Garissa

Les shebab, affiliés à Al-Qaeda, ont pris d’assaut jeudi 2 avril à l’aube le campus de l’université de cette ville proche de la frontière somalienne, faisant 148 morts, en grande majorité des étudiants.

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Des proches d’étudiants de l’Université kényane de Garissa, où les shebab ont tué 148 personnes, cherchaient toujours désespérément des nouvelles de leurs enfants vendredi 3 avril, alors que des détails du massacre commençaient à émerger et que Nairobi redisait sa détermination à combattre les islamistes somaliens.

L’attaque, qui a duré toute la journée jeudi 2 avril, est la plus meurtrière sur le sol kényan depuis celle perpétrée par Al-Qaeda contre l’ambassade américaine en 1998 (213 morts). Mais le ministre kényan de l’Intérieur, Joseph Nkaissery, a promis que le pays ne se laisserait pas «intimider par les terroristes».

Des étudiants se réconfortent entre eux le 3 avril à Garissa, choqués après l'attaque de l'université. Photo : AFP/VNA/CVN

Les shebab, affiliés à Al-Qaeda, ont pris d’assaut jeudi 2 avril à l’aube le campus de l’université de Garissa (située à environ 150 km de la frontière somalienne), qui hébergeait des centaines d’étudiants originaires de différentes régions. L’attaque s’est terminée dans la soirée par la mort des assaillants, dans des échanges nourris de tirs et des explosions.

Au total, 142 étudiants ont péri durant l’attaque, ainsi que trois policiers et trois militaires, et 104 personnes ont été blessées, a indiqué vendredi soir dans la capitale Joseph Nkaissery, annonçant la fin des opérations de ratissage du campus. «Tous les corps ont été retirés des lieux et transférés à Nairobi», a-t-il indiqué. Les corps de «quatre terroristes» ont également été récupérés, selon le ministre.

Nairobi a offert une récompense d’environ 200 000 euros pour la capture d’un chef shebab présumé, Mohamed Mohamud, ex-professeur kényan d’une école coranique, supposé passé en Somalie, et présenté comme le cerveau de l’attaque.Vendredi 3 avril, des survivants ont raconté comment les shebab se sont amusés avec leurs otages, les faisant ramper dans des mares de sang ou téléphoner à leurs parents pour leur demander de réclamer le retrait des troupes kényanes de Somalie, avant de les tuer. Des étudiants se sont barbouillés du sang de leurs amis exécutés afin de passer pour morts, alors que les islamistes cherchaient, pièce après pièce, des personnes à abattre. "+Nous ne craignons pas la mort, cela va être de bonnes vacances de Pâques pour nous+, criaient les assaillants en swahili, avant de tirer», a raconté Salias Omosa, 20 ans, un étudiant traumatisé hébergé dans un camp militaire proche de l’université.Vendredi 3 avril, des centaines de survivants et des proches d’étudiants se sont massés devant les grilles de l’université, bouclée par les forces de l’ordre. «Je suis tellement inquiet, j’ai un fils qui faisait partie des étudiants piégés dans l’université et depuis hier, je suis sans nouvelles», a expliqué Habel Mutinda, en larmes. «J’ai essayé d’identifier son corps parmi les tués», a ajouté cet homme âgé. «J’ai campé toute la nuit, c’est vraiment dur».

À la morgue de Nairobi, où les corps ont été acheminés, une centaine de personnes, sans nouvelles eux non plus de leurs proches, ont attendu longuement et dignement d’examiner des photos des visages des dépouilles, puis les corps eux-mêmes, pour pouvoir les identifier.

Les terroristes ont retenu les non-musulmans

Avant de quitter Garissa vendredi 3 avril, le ministre de l’Intérieur a promis de combattre les «terroristes», confiant dans la capacité du pays à «gagner cette guerre». Les shebab, affaiblis militairement par la force de l’Union africaine (Amisom) déployée en Somalie, ont mené des opérations de guérilla dans leur pays, mais aussi une série d’attentats au Kenya, en représailles à la participation d’un contingent kényan à l’Amisom. Parmi elles figurent la tuerie du centre commercial Westgate de Nairobi (67 morts) en septembre 2013, mais aussi de meurtriers raids et attentats le long des 700 km de frontière entre le Kenya et la Somalie ou encore à Mombasa, premier port régional sur l’océan Indien.

Jeudi 2 avril, les shebab ont surpris les étudiants dans leur sommeil. Lançant des grenades et tirant à l’arme automatique, ils ont exécuté des dizaines d’entre eux avant de laisser partir les musulmans et de garder les non-musulmans en otage. Maureen Manyengo, étudiante de 21 ans, s’est cachée dans un placard. «J’ai entendu les assaillants dire à mes amis: "Ne vous inquiétez pas, nous allons vous tuer mais nous allons mourir aussi"», a-t-elle raconté. «Je les ai aussi entendus dire: "Vous ne serez en sécurité que le jour où votre président retirera les soldats de Somalie"».

De Rome, le pape François a dénoncé un acte d’une «brutalité insensée». Les quotidiens kényans ont eux appelé à l'«unité», pour ne pas laisser les shebab diviser le pays sur des lignes religieuses. Le Kenya se revendique à 80% chrétien mais comprend aussi une forte communauté musulmane, essentiellement sur la côte et dans les régions somali. «Nous devons prendre conscience de ce que l’ennemi veut atteindre», a lancé le Standard, «ils veulent une guerre interne au Kenya». Des journaux déploraient aussi qu’une nouvelle fois, des avertissements des services de renseignements aient été ignorés, comme lors de l’attaque du Westgate.

AFP/VNA/CVN

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