L'áo dài au coeur de la culture vietnamienne

Comme le hanbok des Coréennes, le kimono des Japonaises, le sari des Indiennes, l’áo dài est la tenue traditionnelle des Vietnamiennes. Ancestral, cet emblème vestimentaire, à la fois simple et élégant, révèle la beauté et le charme de celles qui le portent.

L’áo dài, un trait culturel de toute beauté.
Photo : VNA/CVN

Pour les Vietnamiens comme pour les visiteurs éblouis, l’áo dài est un vêtement sans pareil et un emblème de la quintessence culturelle traditionnelle nationale. "C’est l’une des images de marque du pays. Il attire l’œil par son élégance, charme le cœur et envoûte l’esprit par son mystère… Porter l’+áo dài+ est un art en soi, mais l’admirer est un plaisir dont on ne se lasse pas !". C’est en ces termes que le Français Gérard Bonnafont, depuis longtemps résident au Vietnam, vante les mérites de ce costume vietnamien aussi bien porté par les femmes que par les hommes.

"Cette tenue traditionnelle véhicule deux valeurs : esthétique et morale. Elle aide à rendre celles qui la portent plus gracieuses et à adopter un meilleur comportement", affirme Sy Hoàng, créateur et propriétaire d’un musée de l’áo dài à Hô Chi Minh-Ville.

Une définition de l’áo dài a même été introduite dans le dictionnaire d’anglais d’Oxford et se présente ainsi : "A Vietnamese woman’s long-sleeved tunic with ankle-length panels at front and back, worn over trousers" (une tunique à manches longues de femme vietnamienne avec des empiècements jus-qu’aux chevilles devant et derrière, portée par-dessus un pantalon).

Évolution au travers des siècles

Si les définitions se mettent d’accord pour décrire l’áo dài d’aujourd’hui, sa forme a pourtant évolué au cours de sa longue histoire. Le séminaire "L’áo dài vietnamien : son identité, ses coutumes et valeurs", tenu le 26 juin à Hanoï, a été l’occasion de partager l’histoire de cette tenue et ses variations stylistiques et symboliques. Les chercheurs ont conclu que ce costume a été apparu il y a des milliers d’années et qu’il a vécu de nombreuses transformations. Mais, la première image d’áo dài dévoilée au public date de 1744, sous le règne du seigneur Nguyên Phúc Khoát, au travers d’archives documentaires.

Quelques variations de l’áo dài au travers des siècles.
Photo : Archives/CVN

À cette époque-là, la tenue arborait une taille large, cousue en quatre pièces de tissu, longue jusqu’aux talons et ouverte sur les côtés à partir de la taille. Elle comportait deux manches longues, larges aux poignets, et se portait avec une jupe noire à l’intérieur et une ceinture de tissu à l’extérieur. D’après Phan Thanh Hai, directeur du Service de la culture et des sports de la province de Thua Thiên-Huê, au Centre, "le seigneur Nguyên Phuc Khoat a beaucoup contribué à la valorisation de l’+áo dài+ en l’érigeant en costume officiel de son époque".

Au début du XXe siècle, la forme de la tenue est révisée par un créateur de mode de Hanoï, Cat Tuong, aussi connu à l’époque sous le nom de Monsieur Le Mur. Ce dernier innove en y apportant une influence européenne. Il la coupe près du corps avec seulement deux pans, devant et derrière, et se distingue en bombant les épaulettes et en donnant au col une forme de cœur... Boycotté par les plus puritains et conservateurs de l’époque, ce style est néanmoins apprécié de la gent féminine.

En 1934, sous les mains talentueuses de la créatrice Lê Phô, l’áo dài reprend sa forme traditionnelle pour s’adapter parfaitement au corps des Vietnamiennes. Ses coupes d’épaules et de pans apportent un nouveau souffle à la tenue qui devient plus élégante. Ce style se porte jusqu’aux années 60 où la tenue connaît une nouvelle évolution grâce à la maison de couture Dung Dakao à Saigon (ancien nom de Hô Chi Minh-Ville), qui la rend alors plus moulante et lui ajoute des manches raglans.

De nos jours, l’áo dài comprend toujours deux pièces séparées : la tunique et le pantalon large et long, souvent en soie. Le haut épouse parfaitement le corps et les boutons sont fixés au cou, à l’épaule et descendent jusqu’à la hanche. Tout le reste s’adapte aux goûts et aux couleurs de celles qui le portent : on peut par exemple choisir un col dit bateau, un col rond ou encore un col en cœur. Il est possible de changer la longueur des manches, les raccourcir voire les supprimer ou encore réduire la longueur des pans pour un effet plus dynamique et moderne.

Le Vietnamienne Huyên My en áo dài lors du concours de beauté Miss Grand International 2017 tenu en octobre au Vietnam.
Photo : CTV/CVN

Source d’inspiration artistique

Par son charme et son élégance, l’áo dài inspire de nombreux artistes qui réalisent des poèmes, des chansons et des peintures devenus célèbres. Ce n’est pas par hasard que les airs mélodieux de la chanson Môt thoáng quê huong (Un brin de nostalgie du pays natal), co-composée par les musiciens Tu Huy et Thanh Tùng, sont si familiers aux oreilles des Vietnamiens :

Tà áo em, bay bay bay bay trên phố nhẹ nhàng.

(Planent les pans de ta tunique, délicatement)

Áo bay trên đường như mây xuống phố.

(Comme des nuages suspendus dans la rue)

Áo tung sân trường tựa cánh chim câu.

(Comme les ailes des colombes dans la cour d’école)

Đẹp xiết bao quê hương cho ta chiếc áo nhiệm mầu.

(Quelle beauté cette tenue au charme miraculeux !)

Dù ở đâu, Paris, London hay những miền xa.

(Qu’importe où l’on soit, Paris, Londres ou ailleurs)

Thoáng thấy áo dài bay trên đường phố.

(Dès que l’on aperçoit l’áo dài dans la rue)

Sẽ thấy tâm hồn quê hương ở đó, em ơi…

(On revoit l’âme de notre pays natal, ma chérie !)

L’áo dài ne touche pas seulement les Vietnamiens, il inspire aussi de nombreux artistes du monde entier, comme le photographe français Réhahn qui a réalisé une collection de photos sur l’áo dài pour le site web Boredpanda.com. Il déclare : "Les gens me connaissent à travers mes portraits, mais depuis deux ou trois ans, je m’intéresse aux femmes vietnamiennes en +áo dài+".

Une création de la styliste Minh Hanh.
Une création de la styliste Minh Hanh.

Créations de mode

De nombreux créateurs vietnamiens conçoivent leurs áo dài en s’inspirant de peintures et paysages du patrimoine national et mondial. Des créations qui modernisent et donnent une nouvelle physionomie au costume traditionnel. Plusieurs collections aux motifs vivants ont impressionné le public telles que Quang Binh vuong quôc hang dông (Quang Binh, le royaume des grottes) du styliste Nhât Dung, Saigon oi (Oh ! Saigon) de Liên Huong, présentées lors de la Fête de l’áo dài en 2019 à Hô Chi Minh-Ville.

Le créateur Nhât Dung a également consacré beaucoup de temps à étudier les patrimoines et paysages de 160 pays pour les imprimer sur ses áo dài. Intitulée Chemin de patrimoines, sa collection dévoile le charme des paysages renommés des États-Unis, du Canada, de France, d’Italie et d’Autriche notamment. Nhât Dung affirme qu’il se considère comme un artiste qui peint sur l’áo dài des œuvres originales, réelles et vivantes. Bien que la création artistique nécessite de la minutie et beaucoup de temps, il reste patient et guidé par une passion sans bornes. "À mon avis, pour faire découvrir ce costume vietnamien, la présentation de beaux paysages du pays saura attirer l’attention du public. Les tuniques fendues conviennent parfaitement aux échanges en représentant la culture vietnamienne à l’étranger", confie-t-il.

Styliste chevronnée ayant voyagé dans de nombreux pays du monde, Liên Huong est persuadée que les images des merveilles naturelles nationales (col de Hai Vân, rizières en terrasses au Nord-Ouest, baie de Ha Long) figurant sur les pans donneront plus de valeur à ce costume traditionnel.

Au fil du temps, l’áo dài a vécu des changements considérables pour des raisons tant culturelles et historiques qu’esthétiques, avant d’obtenir sa forme d’aujourd’hui. C’est un costume pour tous les âges, porté notamment pendant les occasions importantes telles que les mariages, le Nouvel An, la Fête nationale, les cérémonies ou comme uniforme au lycée. Il est devenu le symbole de la beauté et du charme des femmes vietnamiennes. C’est pourquoi un dossier d’inscription de l’áo dài à la Liste du patrimoine culturel immatériel national est en cours d’élaboration et, dans le futur, la tunique vietnamienne pourrait bien figurer dans la liste de l’UNESCO.


Linh Thao/CVN

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