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Des volontaires d'une association luttant contre le gaspillage alimentaire ramassent des artichauts chez un producteur, à El Prat del Llobregat, en Espagne, le 24 avril |
Avec tous les restaurants et cantines à l'arrêt, les matières premières destinées à ces filières sont loin d'avoir toutes été redirigées vers la grande distribution, malgré l'envolée des courses alimentaires des particuliers confinés à domicile.
L'un des cas le plus emblématiques est celui des pommes de terre: 450.000 tonnes de surplus en France, premier pays exportateur mondial de la tubercule et fournisseur des géants de la frite industrielle comme le groupe canadien McCain, dont les usines sont basées dans le nord de la France, aux Pays-Bas et en Belgique.
Avec la crise du COVID-19, il y a "entre 3 et 4 millions de tonnes de pommes de terres pas transformées en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne et en France" estime le Groupement interprofessionnel de la pomme de terre (GIPT).
La plupart des fast-food européens fermés, les usines à frites surgelées sont restées à l'arrêt deux mois. Du jamais vu. Et les entrepôts des producteurs - qui ont été rémunérés d'une partie des pommes de terre sous contrat - sont pleins à craquer.
"Plein de gens ont faim"
Les montagnes de patates doivent être dégagées avant la prochaine récolte. Sinon, "le risque est de voir se développer des dépôts sauvages (...) dans la nature, vecteurs de foyers infectieux de maladies fongiques ou de pollution par fermentation", explique Bertrand Ouillon, délégué du GIPT.
Beaucoup d'utilisateurs de réseaux sociaux ont demandé que cet aliment de base soit redirigé vers l'aide alimentaire, à l'heure où une crise sociale se développe après l'arrêt de l'activité économique. "Bon sang, mais plein de gens ont faim! Faites un appel, des gens viendront en chercher, même à 0,5 euros", estime ainsi sur Twitter @mishkawolinski, tandis que @lvckdjr à Toulouse met en garde contre "certaines associations" qui refusent les dons de pommes de terre "qui ne sont pas en filet".
Un producteur jette de la poudre de lait pour protester contre les conséquences de la crise due au coronavirus, le 7 mai 2020 à Laarne, en Belgique. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"De fait, on a fait partir quelques stocks dans des associations, mais notre problème ne peut pas se résoudre de cette manière, il est à échelle industrielle", souligne M. Ouillon. La filière souhaiterait pouvoir rediriger ses stocks vers la fabrication d'aliment pour bétail. "S'il pouvait y avoir une aide publique pour le transport, cela pourrait en fait être une aide indirecte aux éleveurs qui sont aujourd'hui en difficulté", suggère-t-il.
"La crise laitière européenne menace l'Afrique de l'Ouest"
Pas toujours facile de rediriger des flux vers des canaux alternatifs de distribution sans déstabiliser d'autres secteurs. C'est ce que montre un autre exemple, celui du lait. La semaine dernière, Oxfam et une douzaine d'associations paysannes ou de solidarité (GRET, Confédération paysanne, Ingénieurs sans frontières, CCFD Terre Solidaire..) ont alerté sur les risques de "crise grave" pesant sur le marché laitier en Afrique de l'Ouest.
La raison, c'est le stockage de poudres de lait décidé par la Commission européenne pour soulager les éleveurs laitiers européens qui ne savent plus quoi faire de leur lait, beurre ou fromage. "La sortie de crise ne doit pas se faire, comme par le passé, par l’exportation des excédents vers les marchés africains", avertissent les associations dans un communiqué commun intitulé "COVID-19 : la crise laitière européenne menace l'Afrique de l'Ouest".
Déjà entre 2018 et 2019, les exportations de poudre de lait de l'UE en Afrique de l'Ouest avaient augmenté de 19%, et elles représentent aujourd'hui 20% des exportations mondiales de l'Union Européenne, selon les associations. Alors que les producteurs laitiers ouest-africains tentent désespérément de développer leur production locale dans le but de soutenir l'agriculture, réduire l'émigration et lutter contre la violence.
Un début de solution semble en revanche se dégager pour les milliers d'hectolitres de vins en excédent dans les trois premiers pays producteurs mondiaux que sont l'Italie, la France et l'Espagne : les viticulteurs ont demandé et obtenu l'autorisation de Bruxelles d'en distiller une partie... pour faire du gel hydroalcoolique.
AFP/VNA/CVN