La Fête de la mi-automne, entre tradition et modernité

Ces derniers temps, de nombreux jeunes passionnés par les traditions s'investissent dans la recherche et la restauration d'anciennes lanternes de la fête de la mi-automne. Leurs créations, telles que les lampes en forme de carpe, de dragons et de crabes, arborent de nouveaux graphismes sophistiqués, nécessitant des recherches approfondies et des compétences artisanales.

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Il fut un temps où les lumières clignotantes bon marché, aux multiples couleurs, dominaient le marché des jouets pour enfants lors de la fête de la mi-automne. Cependant, de nos jours, de nombreuses personnes, en particulier des jeunes, se tournent vers les anciennes lanternes traditionnelles.

Des touristes étrangers s'intéressant aux jouets d'enfants dans une rue hanoïenne.
Photo : VNA/CVN

Dans un atelier d'artisanat situé à la rue Dông Tac (arrondissement de Dông Da, Hanoï), Doàn Thai Cuc Huong teste l’hélice d'une grande lanterne de plus d’un mètre.

Cuc Huong n'avait jamais fabriqué une lanterne aussi grande. L'hélice et les détails sont imposants, ce qui la rendait un peu nerveuse. Une fois la grande bougie allumée, la chaleur montait, et puis l’hélice a commencé à tourner lentement autour de l’axe. Cuc Huong avait imprimé les personnages de l'estampe du village de Dông Hô intitulé "Le mariage de la souris" sur du papier Do, puis avait découpé chaque chat et souris pour créer les personnages. Le visage de la jeune artisane s’est illuminé en voyant les personnages tourner autour de l’axe.

Née et ayant grandi dans la banlieue de Hanoï, Doàn Thai Cuc Huong ne connaissait rien des lanternes à ombres mobiles de la fête de la mi-automne. Lorsqu'elle a découvert que ses grands-parents jouaient autrefois avec de telles lanternes, elle a pensé que les enfants d’aujourd’hui étaient vraiment "défavorisés". Cela l’a motivée à faire revenir les lanternes à ombres mobiles dans la vie des enfants d’aujourd’hui.

Cuc Huong est professeure d'anglais. De par son intérêt pour le papier Do, elle s'est tournée vers la fabrication d'articles artisanaux en utilisant ce matériau, en particulier les lanternes. "Les lanternes à ombres mobiles sont un produit artisanal traditionnel. Elles doivent incarner les valeurs culturelles de nos ancêtres plutôt que d'être simplement un jouet pour un divertissement temporaire. J'ai donc cherché à utiliser des matériaux traditionnels pour la composition des lanternes. Lorsque la bougie est allumée, les lanternes prennent vie, et les gens, en particulier les enfants, peuvent découvrir de nombreuses histoires culturelles", a partagé Cuc Huong.

Des enfants et leurs jouets traditionnels de la Fête de mi-automne.
Photo : Khoi dang tac khi/CVN

La lanterne à ombres mobiles est constituée de "personnages", elle est conçue de manière à ce que lorsque la bougie est allumée, la chaleur fasse tourner l'hélice, entraînant les personnages en cercle et projetant leurs ombres sur le papier transparent qui entoure la lanterne. Cuc Huong a choisi des thèmes traditionnels issus des estampes de Dông Hô, tels que "Le retour au village natal d’un étudiant ayant réussi le concours de mandarin" ou "Le maître crapaud", qui portent sur la volonté d'étudier. Elle a également utilisé l'estampe "Le mariage de la souris", une anecdote satirique, pour créer les personnages des lanternes de la mi-automne. Cuc Huong s’est beaucoup investie dans la décoration extérieure des lanternes.

Cette artisane a réalisé que le papier Do était particulièrement adapté pour les gravures sur bois. Elle a donc décidé de créer ses propres gravures sur bois pour imprimer des décorations sur les lampes. Elle a orné la base de la lanterne de motifs inspirés des pieds des meubles en bois traditionnels et le bord supérieur de la lampe avec des images de nuages et de lune, des motifs traditionnels. La partie centrale de la lanterne est la plus élaborée, nécessitant deux semaines pour réaliser une gravure sur bois de la fleur de lotus.

Jouets traditionnels mis en vente à Hanoï.
Photo : VNA/CVN

Moins lumineuses et colorées que les lampes ordinaires vendues sur le marché, les lanternes fabriquées par Cuc Huong sont très différentes. "Lorsque la bougie est allumée, les gens peuvent apprécier la beauté des sculptures sur bois, la beauté des estampes traditionnelles sur papier Do... C'est le message que je veux transmettre avec chaque produit", a déclaré l’artisane. Cette année, à l'approche de la Fête de la mi-automne, les commandes affluent.

Autrefois, lors des fêtes de la mi-automne, de nombreux types de lanternes élaborées imitant des animaux étaient courants, comme les lampes en forme de carpe, de lapin, de papillon, ainsi que des lampes plus complexes et sophistiquées telles que les lampes en forme de crabe ou de carpe se transformant en dragon. Les guerres et des conditions de vie difficiles ont contribué à les faire sombrer dans l'oubli.

Que chacun comprenne

l'identité du peuple vietnamien

À l'autre bout du pays, à Hô Chi Minh Ville, une autre jeune femme née en 1992, Nguyên Thi Kim Thuy, a été également surprise de découvrir une ancienne photo datant d'il y a près d'un siècle montrant des enfants s'amusant avec des jouets typiques de la Fête de la Mi-Automne. Cette créatrice a décidé de ramener ces trésors du passé à la vie.

Étant une connaisseuse de la culture traditionnelle du pays, Kim Thuy explique : "En tant que designer, le simple fait de regarder la lampe me fait comprendre la sophistication, la minutie et l'ingéniosité des artisans. Dès que j'ai vu ces lampes, j'ai voulu retrouver la beauté d'antan aujourd'hui, afin que chacun comprenne l'identité du peuple vietnamien. Les difficultés de la vie nous font un peu oublier le passé, mais c'est le moment de regarder en arrière pour mieux comprendre."

Ne sachant pas par où commencer, car les lampes anciennes restantes aujourd'hui se trouvent toutes dans des musées étrangers, Kim Thuy s'appuie sur les photos qu'elle a trouvées, ou sur des dessins d'Henri Oger (fonctionnaire français, auteur du livre "Techniques du peuple Anamite") du début du XXe siècle. Après la première lampe "Vong Nguyêt" de forme circulaire simple, Kim Thuy s'est lancée dans la recherche d’autres lampes aux structures plus complexes. La partie la plus laborieuse consiste à créer le cadre du produit.

Des lampes carpes du groupe Khoi dang tac khi.
Photo : Khoi dang tac khi/CVN

Comme Kim Thuy a étudié le design d'intérieur à l'Université d'architecture de Hô Chi Minh-Ville, elle a pu dessiner le cadre de la lampe carpe. Après l’étape de conception sur le dessin, elle a commencé à tester la structure réelle. Elle a décidé d’utiliser le bambou au lieu d’un matériau moderne. La confection des nageoires du poisson avec leurs mouvements est l'étape la plus difficile. Elle a choisi des morceaux de bambou souples, les a broyés en fins morceaux et les a chauffés pour mieux les façonner. Il lui arrive parfois qu’après avoir plié une pièce, une autre se brise. De la conception à la réalisation du cadre de la carpe, cela prend plusieurs mois. Après avoir terminé le cadre, elle a procédé au collage du papier brillant. Plusieurs fois, elle a dû enlever le collage et recommencer, car les proportions de la tête, des nageoires, etc., n'étaient pas équilibrées.

Un travail minutieux et soigné 

En complétant le modèle de la lanterne poisson-dragon, Kim Thuy a commencé à travailler sur le motif du crabe. Le modèle du crabe est plus complexe, mais grâce à son expérience dans l’élaboration du modèle du poisson-dragon, il ne lui a fallu que près de quatre mois pour le terminer. Pour construire le cadre de la lampe crabe, elle et ses collègues ont dû fabriquer 76 bâtons de bambou, les plier et les assembler. Cela suffit pour comprendre à quel point le travail est minutieux et soigné.

Après avoir construit le cadre, vient l’étape de fixation du papier cellophane coloré. Le collage du papier cellophane sur une structure de lanterne, comme celle en forme de poisson-dragon ou de crabe, prend environ quatre à six heures. Si l’artisan ne fait pas attention pendant le processus, le papier se déchirera ou formera des plis, ce qui l'obligerait à recommencer. Enfin, la dernière étape de production consiste à dessiner tous les détails à la main. Ce processus prend également des dizaines d'heures pour les grandes lampes. Une fois terminé, Kim Thuy a consulté des chercheurs avant de présenter son produit sur le marché.

Après quatre années de recherche et de restauration de lanternes de la mi-automne, Kim Thuy est passée d'une architecte d'intérieur à une créatrice et productrice de lanternes. Sa passion s'est transmise à son mari, Nguyên Hoàng Son, également designer. Le couple a décidé de créer le groupe "Khoi dang tac khi", spécialisé dans la restauration et la production de lanternes anciennes. En expliquant le nom de leur groupe, "Khoi dang tac khi", ce qui signifie "Allumer la lampe pour créer de l'énergie", le couple espère que leurs lanternes contribueront à raviver l'amour pour la culture traditionnelle vietnamienne.

Beaucoup de gens ont été surpris en voyant les lanternes du groupe "Khoi dang tac khi" accrochées et allumées. Le crabe géant à "huit pattes et deux griffes" est de couleur rouge orangé et brille, flottant au gré du vent, ses pattes et ses coquilles vives se balançant, donnant l'impression qu'il "nage". La lanterne "poisson-dragon" (une carpe qui se transforme en dragon) a une tête imposante lorsqu'elle se "transforme en dragon", tandis que la queue conserve la douceur d'une carpe. Les concepteurs ont méticuleusement "sculpté" chaque nageoire et fabriqué une queue flexible similaire aux ailes d'un papillon.

Des produits du groupe Khoi dang tac khi 
Photo : Khoi dang tac khi/CVN

Bien que les lanternes puissent être relativement coûteuses, le couple Nguyên Hoàng Son - Nguyên Thi Kim Thuy et leur équipe travaillent dur à l'approche de la fête de la mi-automne. Kim Thuy a ajouté : "Je suis très heureuse que les chercheurs aient tous donné des commentaires positifs. Et nos produits se vendent bien. C’est une façon de mieux faire connaitre les belles valeurs de la culture vietnamienne."

Il y a eu des moments où des jouets modernes inspirés des jouets traditionnels, ont inondé le marché. De nombreux jouets traditionnels tels que les lampes étoiles, les lanternes, les masques en papier mâché, les tambours, etc., étaient destinés à l'oubli, couverts de poussière dans les recoins cachés des stands de jouets. Certains regrettent la fête de la mi-automne "d'antan" et aspirent à la retrouver.

Cela semblait peu probable, et pourtant, ces dernières années, les jouets traditionnels de la fête de la mi-automne ont fait un retour triomphant. Les rues spécialisées dans la vente de jouets pour cette occasion disposent de plus en plus de lampes étoiles, de lanternes à ombres mobiles, fabriquées de manière traditionnelle. Ce qui est particulièrement remarquable, c'est que pendant longtemps, les jouets de la fête de la mi-automne étaient souvent associés aux artisans des villages de métier traditionnel. Mais aujourd'hui, de nombreux jeunes ont commencé à créer et à restaurer ces jouets, en mettant particulièrement l'accent sur les modèles de lampes toujours plus complexes. Vive les belles valeurs de notre culture traditionnelle !

Hoàng Lan/CVN

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