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Un salarié sort de l'usine Bridgestone, à Béthune (Pas-de-Calais), le 16 septembre. |
Moins d'une semaine après l'annonce choc du géant japonais du pneumatique, les ministres Agnès Pannier-Runacher (Industrie) et Elisabeth Borne (Travail) ont réuni à Béthune des élus locaux, dont le président des Hauts-de-France Xavier Bertrand, et la direction Europe du groupe - par visioconférence - avant de s'entretenir avec les représentants des salariés. Les dirigeants de Bridgestone "nous ont dit qu'ils avaient examiné un certain nombre de scénarios, nous voulons les contre-expertiser", a déclaré Agnès Pannier-Runacher à la sortie de cette réunion de crise.
Le gouvernement va donc "mandater un cabinet de conseil, Accenture", dont le travail "permettra non seulement de regarder ces scénarios, mais également (...) de soumettre des scénarios alternatifs autour de cette technologie du pneu", a-t-elle précisé, donnant l'exemple de "la question du recyclage du pneu". "Nous ne voulons pas tomber dans la fatalité et nous résoudre à cette décision (...) c'est pourquoi nous réunirons l'ensemble des parties prenantes d'ici deux à trois semaines", a encore affirmé la ministre."Le gouvernement se battra pied à pied pour sauver les emplois. Ce site, c'est des compétences qui sont rares, des compétences industrielles", a assuré, à ses côtés, la ministre du Travail Elisabeth Borne.
"Petit espoir"
Au même instant, la direction de Bridgestone estimait dans un communiqué que la fermeture du site de Béthune (Pas-de-Calais) était "la seule option", mais qu'elle entendait "participer activement à la recherche de solutions pour le site et le territoire". Elle précisait quelques minutes plus tard, par la voix de son président pour la zone Europe, Laurent Dartoux, qu'elle réfléchissait à des "projets alternatifs de reconversion du site, avec et sans Bridgestone".
Manifestation devant l'usine de Bridgestone, le 17 septembre à Béthune (Pas-de-Calais) . |
Interrogée sur ces déclarations, Mme Pannier-Runacher a répliqué que les dirigeants lui avaient "très expressément dit" être prêts "à ouvrir des scénarios alternatifs" et que le gouvernement serait "extrêmement exigeant" sur le "respect de la parole donnée". Elisabeth Borne a aussi appelé la multinationale à se saisir des nombreux outils et dispositifs prévus notamment dans le plan de relance. "On n’a jamais eu de moyens aussi considérables (...) pour accompagner un site industriel qui veut se moderniser", a-t-elle jugé.
L'avocat du Comité social et économique (CSE) de l'usine, convié aux côtés des représentants du personnel, a lui salué une "réunion constructive avec des pouvoirs publics qui ont clairement envie d'aider les salariés", disant "croiser les doigts" dans l'attente de la prochaine rencontre. "Pour nous, cette fermeture n'est pas légitime", a martelé Me Stéphane Ducrocq. L'intersyndicale réclame depuis plusieurs années des investissements visant à moderniser le site, dans l'objectif de fabriquer des pneus plus larges, à forte valeur ajoutée. Le secrétaire CFDT du CSE Stéphane Lesix s'est d'ailleurs félicité que l'État soutienne ce "projet cohérent".
"Il ne faut pas nous balader non plus pendant X temps. On connait cette direction, comment elle opère. Mais il y a quand même un petit espoir du fait qu'ils acceptent de discuter, (...) on s'accroche à ça", a aussi renchéri le délégué CGT Bruno Wable. Premier employeur de cette ville de 25.000 habitants, Bridgestone avait brutalement annoncé mercredi la "cessation définitive" de l'activité du site à l'horizon 2021, invoquant une surcapacité de production en Europe et la concurrence des marques asiatiques à bas coût.
"Choqués", "humiliés" et "en colère", les salariés avaient toutefois rencontré leur direction vendredi soir et réussi à obtenir un délai de cinq mois de négociations pour "réfléchir à toutes les solutions possibles". "Dans quinze jours, on saura s'ils se foutent de nous", a de son côté lancé Xavier Bertrand. "Devant un tribunal français, leur motif de licenciement ne tient pas, c'est juste pour que tout ça leur coûte moins cher". Pourtant, "ça va leur couter plus cher de faire un plan social que d'investir sur le site avec le soutien de l'État et des collectivités !", a-t-il averti, assurant que les élus entendaient désormais "se battre à mort".
AFP/VNA/CVN