États-Unis
La Fed prête à relever ses taux et jongler entre inflation et récession

Le grand moment est arrivé pour la banque centrale américaine : l'institution devrait relever mercredi 16 mars ses taux directeurs pour lutter contre l'inflation, deux ans après les avoir ramenés à zéro face au COVID-19, et alors que la crise en Ukraine créée de nouvelles incertitudes.

>>Porté par la tension en Ukraine, le dollar plus roi que jamais

>>La tension en Ukraine fait bondir l'inflation aux États-Unis

>>Une hausse des taux directeurs de la Fed en mars

Le président de la Fed, Jerome Powell, lors d'une audition au Congrès américain, le 3 mars.
Photo : AFP/VNA/CVN

L'objectif : pousser les banques commerciales à proposer à leurs clients des taux d'intérêt plus élevés pour les crédits, afin de faire ralentir la consommation, et donc d'alléger la pression sur les prix. D'autant plus que les problèmes d'approvisionnement devraient durer encore des mois.

L'inflation étant au plus haut depuis 1982, la puissante Réserve fédérale américaine (Fed), qui tient mardi et mercredi sa réunion de politique monétaire, veut lancer le mouvement.

Le président de la Fed, Jerome Powell, s'est récemment dit confiant dans la capacité de l'institution à assurer un "atterrissage en douceur", c'est-à-dire "maîtriser l'inflation sans provoquer de récession".

L'exercice s'annonce cependant délicat, et la Fed va devoir jouer serré.

"La combinaison d'une inflation plus élevée et d'une croissance plus lente représente un dilemme pour la Réserve fédérale", soulignent les économistes de la banque Wells Fargo dans une note.

Selon eux, elle donnera la priorité au ralentissement de l'inflation, d'autant plus que l'institution monétaire "a gagné en crédibilité au cours des dernières décennies en tant que gardienne de la stabilité des prix".

Ils tablent sur six hausses d'un quart de point de pourcentage (0,25%) en 2022.

"Approprié" d'agir

Pour l'administration de Joe Biden, la balle est désormais dans le camp de la Fed, et la secrétaire au Trésor, Janet Yellen, juge "approprié" que la banque centrale agisse.

La ministre des Finances de Joe Biden a indiqué jeudi 10 mars sur la chaîne CNBC qu'elle s'attend elle aussi "à un atterrissage en douceur".

Une station-service de Los Angeles (Californie), le 17 février.
Photo : AFP/VNA/CVN

Les taux se trouvent dans une fourchette de 0 à 0,25% depuis mars 2020. La Fed les augmente habituellement par paliers de 0,25 point de pourcentage, mais l'hypothèse d'une hausse plus brutale de 0,50 point avait un temps semblé plausible.

Jerome Powell a toutefois été très clair lors d'une audition au Congrès début mars : "Je suis enclin à proposer et à soutenir une hausse des taux de 25 points de base".

Sur les marchés, plus personne ne s'attend à une hausse d'un demi-point, la quasi-totalité des acteurs (95,9%) table sur un quart de point seulement, les autres anticipent même un maintien des taux à leur niveau actuel, selon l'évaluation des produits à terme de CME Group.

En Europe, où l'inflation est moins élevée, l'homologue de la Fed, la BCE, a décidé jeudi 10 mars de maintenir, à ce stade ses taux à leur plus bas historique.

Fantôme des années 1970

L'inflation aux États-Unis s'est élevée à 7,9% sur un an en février, selon l'indice CPI du département du Commerce, et le conflit en Ukraine a provoqué une flambée supplémentaire des prix de l'essence et de l'alimentation. La Fed privilégie un autre indicateur, l'indice PCE : +6,1% sur un an en janvier.

Cela fait ressurgir le spectre de l'inflation à deux chiffres des années 1970 et du début des années 1980. La Fed avait à l'époque drastiquement relevé ses taux, jusqu'à 20%, ce qui avait permis de ralentir la hausse des prix, mais avait plongé le pays dans la récession.

"Les années 1970, lorsque les décideurs de la Fed ont dû organiser une récession douloureuse, (...) sont gravées dans la mémoire institutionnelle de la Fed", soulignent encore les économistes de Wells Fargo.

L'économiste Diane Swonk, de Grant Thornton, se dit "inquiète quant à une hausse des anticipations d'inflation et au déclenchement d'une spirale salaires-prix plus vicieuse". Une pénurie de main-d'œuvre fait déjà grimper les salaires.

"Mais (nous n'en sommes) pas encore là et la Fed ainsi que d'autres banques centrales se sont engagées à éviter une répétition des années 1970", nuance-t-elle dans un tweet, soulignant que "c'est possible, bien que cela puisse s'accompagner d'une hausse du chômage".

Le marché de l'emploi américain est aujourd'hui solide, le taux de chômage a reculé en février, à 3,8%.

La Fed devrait également discuter du moment opportun pour entamer la réduction de son bilan, c'est-à-dire se séparer petit à petit des milliards d'USD de bons du Trésor et autres actifs qu'elle a achetés depuis mars 2020, pour soutenir le fonctionnement de l'économie.


AFP/VNA/CVN

Rédactrice en chef : Nguyễn Hồng Nga

Adresse : 79, rue Ly Thuong Kiêt, Hanoï, Vietnam.

Permis de publication : 25/GP-BTTTT

Tél : (+84) 24 38 25 20 96

E-mail : courrier@vnanet.vn, courrier.cvn@gmail.com

back to top