Les pays de l'Union monétaire réfléchissent à une possible activation du Fonds européen de stabilité financière (FESF) pour acheter de la dette italienne afin d'éviter que les taux d'emprunt du pays ne s'envolent, ont indiqué le 24 octobre deux sources diplomatiques.
Rome se finance actuellement à des taux proches de 6%. Un niveau difficilement compatible dans la durée avec une dette de plus de 1.900 milliards d'euros.
Cette option est examinée notamment par des hauts fonctionnaires de la zone euro réunis au sein d'un groupe de travail chargé de préparer le sommet décisif de le 26 octobre, selon une des sources.
L'idée est de demander à Rome "des mesures pour démontrer qu'il n'y a pas de risque que l'Italie devienne un jour la Grèce" et, en attendant que les marchés soient pleinement rassurés, de lui permettre de s'adosser au FESF, a expliqué l'autre source.
Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi a assuré le 24 octobre que personne ne devait avoir "quoi que ce soit à craindre" de son pays, avant un conseil des ministres extraordinaire où il devait annoncer des réformes. Il pourrait relever l'âge de départ en retraite à 67 ans, après avoir été sommé d'agir la veille par ses partenaires européens.
Lors de ce conseil, le gouvernement italien n'est pas parvenu à un accord sur une réforme des retraites en raison des divisions dans la majorité, a appris l'AFP de source gouvernementale.
Des pourparlers étaient en cours et devaient se poursuivre toute la nuit pour déboucher sur un accord politique avec des mesures peut-être plus "soft" qu'initialement prévues, mais visant à rassurer les partenaires européens de l'Italie.
Rien ne dit que le recours au Fonds deviendra réalité mais dans pareil cas, ce sera la première fois qu'il intervient de la sorte sur les marchés, se substituant à la Banque centrale européenne qui remplit aujourd'hui cette mission, à contrecœur. Elle aide l'Italie et l'Espagne de cette manière depuis l'été dernier.
Instrument financier indispensable dans la gestion de la crise de la dette, le FESF a vu ses pouvoirs renforcés en juillet : il peut racheter désormais de la dette déjà en circulation, afin d'aider les pays qui se financent à des taux prohibitifs et soulager les banques plombées par ces actifs dévalorisés. Une option encore jamais utilisée.
Tractations autour de la dette grecque
En parallèle, les négociations se poursuivent en vue du sommet d'aujourd'hui censé apporter une réponse décisive à la crise de la dette qui ronge l'Union monétaire depuis bientôt deux ans.
Les Européens doivent trouver un moyen d'augmenter la force de frappe du FESF pour éviter précisément la contagion. La chancelière allemande Angela Merkel veut être en mesure de présenter ce matin les grandes lignes d'une solution à la chambre basse du parlement, le Bundestag, avant de se rendre à Bruxelles.
Car les députés allemands doivent dorénavant être impliqués dans toute utilisation ou modification du FESF, et, contrairement à ce que prévoit le dispositif législatif, c'est toute l'assemblée qui devra se prononcer pour donner un mandat, et pas seulement la commission du Budget, a indiqué une source proche de la majorité conservatrice.
Plusieurs hypothèses sont dans les tuyaux, éventuellement cumulables : un modèle qui verrait le FESF agir comme assureur de la dette émise par les pays en difficulté; une option qui consiste à créer un véhicule financier adossé au FESF, pour attirer investisseurs publics comme privés y compris hors zone euro.
Enfin, une troisième solution serait la création d'un fonds spécial adossé au Fonds monétaire international (FMI) et abondé sur la base du volontariat, par exemple par des pays émergents comme la Chine.
Autre chantier : stabiliser la Grèce surendettée en mettant plus fortement à contribution le secteur financier, qui s'était déjà engagé en juillet à subir des pertes de l'ordre de 21% en effaçant une partie de la dette grecque.
La difficulté est pour les Européens d'obtenir le feu vert des banques, au risque sinon de déclencher le paiement des CDS, ces assurances contre le risque de défaut de paiement. Un tel scénario serait favorable à ceux qui ont spéculé sur le sort de la Grèce et risquerait de provoquer un effet domino dans la zone euro.
Or, les grandes banques réunies au sein de l'Institut de la finance internationale (IIF) ont prévenu le 24 octobre soir qu'il y avait "des limites" au niveau de la dette publique grecque qu'elles peuvent accepter d'effacer volontairement.
Selon une source diplomatique, le lobby bancaire propose désormais une décote volontaire de 40% alors que la zone euro table au minimum sur des pertes de l'ordre de 50%.
Les investisseurs grecs sont inquiets des retombées. La Bourse d'Athènes a chuté le 24 octobre de 4,51% car une trop forte décote affecterait lourdement les banques grecques, avec de probables répercussions pour les ménages et les entreprises.
À la veille du sommet, les Bourses européennes ont commencé la journée en repli, les investisseurs prenant notamment leurs bénéfices après plusieurs séances de hausse.
La Bourse de Paris a ouvert en baisse de 0,46%, Francfort de 0,47% et Londres de 0,13%. La Bourse de Madrid a de son côté cédé 0,3% à l'ouverture et celle de Milan 0,4%.
En Asie, la Bourse de Tokyo a terminé en baisse de 0,92%, l'inquiétude face à la vigueur persistante du yen prenant le pas sur l'espoir d'un règlement de la crise en zone euro.
AFP/VNA/CVN