M. Karzaï, encouragé par la communauté internationale, tente depuis plusieurs années de persuader les talibans de négocier, leur offrant même des responsabilités gouvernementales s'ils déposent les armes. Mais les leaders des rebelles islamistes, dont la guérilla gagne du terrain depuis 2007, n'ont jamais répondu favorablement à ce jour en dehors de quelques contacts préliminaires.
"Toutes les discussions de paix avec les talibans sont suspendues, le président va réviser la stratégie de paix et de réconciliation", a déclaré le 2 octobre Siamak Herawi, porte-parole de la présidence.
Le chef de l'État annoncera sa nouvelle stratégie dans un discours télévisé à la nation "très prochainement", a-t-il ajouté.
Cette décision a été prise après l'assassinat, le 20 septembre, de l'ancien chef de l'État, Burhanuddin Rabbani, président du Haut conseil pour la paix chargé par M. Karzaï de nouer des contacts avec les insurgés. Il a été tué par l'explosion de la bombe cachée dans le turban d'un homme qui se présentait comme un négociateur du conseil suprême des talibans du mollah Omar.
Les talibans, toujours prompts à revendiquer les attaques audacieuses qui se multiplient dans Kaboul, n'ont pas souhaité commenter celle-là pour l'heure.
"Le mollah Omar n'a pas d'adresse... Leur émissaire de paix était finalement un tueur, alors avec qui devrions nous parler ?", s'était déjà interrogé le 30 septembre M. Karzaï lors d'une réunion avec des dignitaires religieux à Kaboul.
"La nation afghane me demande avec quelle autre partie je négocie ? Je leur réponds : le Pakistan", avait-il alors déclaré.
L'Afghanistan accuse régulièrement son grand voisin d'abriter le Conseil suprême des talibans, ce que les Afghans et les médias internationaux appellent la "Choura de Quetta" (le Conseil de Quetta). Quetta est la grande ville du Sud-Ouest pakistanais dans les environs de laquelle se cacherait le mollah Omar et ses principaux lieutenants depuis la fin 2001, quand les talibans ont été chassés du pouvoir par une coalition militaire emmenée par les États-Unis après les attentats du 11 Septembre.
Par ailleurs, les zones tribales du Nord-Ouest du Pakistan, frontalières, bastion des talibans pakistanais et principal sanctuaire dans le monde d'Al-Qaïda, sont devenues la base arrière du réseau Haqqani, le groupe de talibans afghans le plus redouté de Kaboul et des soldats américains.
Et, ces derniers temps, Washington reproche ouvertement à Islamabad, son allié-clé depuis fin 2001 dans sa "guerre contre le terrorisme", de ne pas en faire assez pour déloger les Haqqani des zones tribales. Certains hauts responsables américains accusent même les services de renseignements pakistanais de les soutenir.
"La seule solution, ce que tout le monde réclame aussi, c'est que des pourparlers se tiennent avec les Pakistanais, car tous les sanctuaires et les refuges de l'opposition sont situés dans ce pays", avait commenté M. Karzaï devant les dignitaires religieux.
Dans cinq jours, le 7 octobre marquera le dixième anniversaire de l'invasion de l'Afghanistan par la coalition militaire emmenée par Washington alors que les perspectives de paix s'éloignent selon les experts quasi-unanimes. Alors que les États-Unis et l'OTAN ont entamé le processus de retrait de leurs troupes combattantes, les talibans ont intensifié leur insurrection et étendu leurs actions de guérilla à la quasi-totalité du pays ces dernières années, jusqu'au coeur de Kaboul, une capitale pourtant truffée de barrages et de forces de sécurité.
AFP/VNA/CVN