Irak : le boom des écoles privées à Bagdad face au délabrement du public

Des cannettes et des sacs en plastique jonchent les couloirs de l'école publique Al-Mamouniyeh à Bagdad, où les élèves, souvent dépourvus de livres, se pressent dans des classes surchargées : face au délabrement du public, les écoles privées connaissent un grand essor en Irak.

À quelques pas de l'école Al-Mamouniyeh, où les salles sont généralement privées d'électricité, l'établissement privé de filles Al-Mawada, installé dans une grande villa moderne, est d'une propreté irréprochable. Les adolescentes sont assises derrière des bureaux impeccables, dans des salles climatisées.

"Ces écoles sont meilleures, car elles emploient des enseignants plus performants. J'aurais préféré y envoyer mon fils plutôt que de le laisser ici", confie Adnane Hachem, directeur du lycée Omar ben Abdelaziz, à Azamiya. Il regrette de ne pas pouvoir payer les 1.600 dollars annuels de frais de scolarité.

Alors qu'un enseignant gagne de 500 à 700 dollars par mois dans le public, il peut prétendre à entre 670 et 850 dollars dans le privé.

Avant l'embargo imposé après l'invasion du Koweït en 1990, l'Irak jouissait d'un des meilleurs systèmes éducatifs du Moyen-Orient, mais aujourd'hui 20% des jeunes de moins de 15 ans sont illettrés, selon l'ONU.

"Globalement, les Irakiens considèrent que leur système éducatif s'est détérioré ces dernières années", affirmait en avril un rapport de l'ONU.

Deux raisons en sont à l'origine. En premier lieu, les attaques contre les établissements scolaires : d'après l'UNESCO, il y en a eu 31.598 de mars 2003 à octobre 2008. Ensuite, des milliers d'enseignants ont été chassés de leurs postes après l'invasion du pays par les États-Unis en 2003, en raison de leur appartenance passée au parti Baas de Saddam Hussein. "L'enseignement est déplorable dans les écoles publiques", affirme Fatima qui vient inscrire son fils de 14 ans au collège privé pour garçons Ossoul al-Dine. "Cela ne me pose pas de problèmes d'acquitter les frais de scolarité élevés car actuellement je paie des leçons particulières", ajoute-t-elle.

"Il n'y a personne pour vous aider dans le public si vous ne comprenez pas quelque chose. Ici, l'enseignement est bien meilleur", jure Riham Rashan, 15 ans, élève de seconde d'Al-Mawada.

Souvent, les écoles privées sont dotées d'installations sportives, des piscines, et offrent des leçons de musique ou de français, qui font défaut dans le public.

Avec le recul de la violence, de nombreux jeunes ont regagné les bancs de l'école, submergeant les établissements publics : il y a parfois 70 élèves par classe, contre 25 dans le privé.

"Il n'y a pas assez d'écoles pour les très nombreux élèves et les programmes scolaires sont dépassés", résume Falah al-Qaïsi, responsable du département de l'Éducation au gouvernorat de Bagdad. "Moins de 30 établissements ont été construits depuis 2003, alors qu'il en faudrait encore 952".

Selon l'USAID (Agence américaine d'aide au développement international), Washington a dépensé un milliard de dollars pour financer la construction de 500 écoles et la réhabilitation de plus de 2.500 autres.

L'éducation est, selon l'ONU, "une des priorités du gouvernement irakien" : elle a représenté en 2009 9,9% du budget de l'État, contre 7,2% en 2008.

Mais, "c'est insuffisant, regrette M. Qaïsi, il faudrait que cela représente 18 à 20%".

Alors que les institutions privées ont été autorisées en 2008, Bagdad en compte aujourd'hui 30, contre 3.000 publiques, mais leur nombre devrait augmenter en raison de la demande.

Pour le moment, leurs résultats ne sont pas très probants. "Sur 61.000 élèves des écoles publiques qui se sont présentés cette année, 27% ont obtenu leur baccalauréat (examen de fin d'études secondaires) contre 31% des candidats issus des écoles privées. Cela ne fait pas une grande différence", souligne M. Qaïsi.

AFP/VNA/CVN

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