Grande-Bretagne : Fleet Street tourne une page avec le départ de l'AFP

Fleet Street, la mythique rue de Londres associée à 3 siècles d'histoire du journalisme, voit partir sa dernière rédaction internationale avec le déménagement de l'Agence France-Presse (AFP) vers de nouveaux locaux au centre de la capitale britannique.

Cette artère qui relie le Strand à la cathédrale Saint Paul, désormais lieu de prédilection des banques et des cabinets d'avocats, ne retiendra plus que le bureau londonien d'un éditeur régional de journaux écossais. Il y a encore 30 ans, l'ensemble de la presse nationale et l'agence Reuters, au coude à coude avec l'AFP, étaient concentrés sur quelques centaines de mètres, seulement séparés par des pubs de légende, véritables annexes des rédactions.

L'exode a commencé sous l'impulsion du magnat Rupert Murdoch qui, pour casser une interminable grève du syndicat du Livre, a déménagé en 1986, en un week-end, 4 de ses titres à grand tirage -Times, Sun, Sunday Times, News of the World- dans l'Est de Londres, à Wapping, une véritable forteresse dont les syndicats feront en vain le siège.

L'évolution technologique dans les médias finira d'éparpiller les sièges des journaux de Canary Wharf, encore plus à l'est que Wapping (Reuters), dans le quartier central de Victoria (Daily Telegraph) ou Kensington High Street, à l'Ouest (groupe Daily Mail, Independent).

Le nom de Fleet Street, où un Alsacien avait fondé une imprimerie dès 1500, est devenu synonyme de presse dans la langue anglaise. Une légende qui doit aussi à des immeubles rivalisant d'audace comme la "Loubianka noire" du Daily Express, ou Peterborough Court, le siège art nouveau du Daily Telegraph devenu le siège de la banque d'affaires Goldman Sachs. La banque new-yorkaise JP Morgan a elle investi l'ancienne imprimerie du Daily Mirror.

Mais la réputation de la rue tient aussi dans la mémoire collective à la foule nocturne, essentiellement masculine et passablement alcoolisée, qui trébuchait d'un pub à un autre. Pour qui marchait vite, aime à rappeler un ancien, il était possible de rester extérieurement au sec lors des averses en allant d'un pub à l'autre.

Au bar El Vino, où les femmes devaient porter la jupe, au Ye Old Cheshire Cheese, jadis fréquenté par Dickens et où une enseigne non effacée rappelle qu'au bar, seuls les hommes pouvaient être servis, de véritables bourses aux rumeurs tenaient lieu de conférences de rédaction. C'était l'époque où les journalistes ne faisaient pas de jogging à l'heure du déjeuner, regrette l'un des rares clients, non touriste, d'El Vino.

Fleet Street est passé au fil des ans du rythme des rotatives aux horaires des salles de marchés. Des cris des vendeurs de journaux aux files d'attente policées devant les débits d'Expresso et de Capuccino.

Le dernier témoin de cette époque journalistique, en passe de devenir un symbole, est St Bride, l'église du quartier qui continue de pleurer les membres de la presse tués de par le monde. À gauche de l'autel, 18 noms rappellent le bilan de la guerre en Irak pour les organes de presse britanniques. La lueur de bougies éclaire des ex-voto de ceux disparus plus récemment ou emprisonnés.

Le lieu est dédié "à tous ceux qui, dans leur quête de la vérité par le texte ou l'image, sont confrontés au danger, aux persécutions et à la mort".

Le 26 juillet, l'AFP doit intégrer une salle de rédaction multimédia au 25e étage de Centre Point, une tour devenue, selon le Financial Times, "l'un des immeubles les plus emblématiques" de la capitale, au confluent de Soho, Covent Garden et Bloomsbury.

Pour Fleet Street, c'est la fin d'une époque quand l'AFP a validé dans la nuit de samedi à dimanche la dernière dépêche transmise au monde depuis une artère plus que jamais mythique.

AFP/VNA/CVN

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