Global Teacher Prize : une Vietnamienne parmi les dix finalistes

Pour la première fois, une Vietnamienne figure dans la liste des dix candidats en finale du Global Teacher Prize, qui récompense chaque année le meilleur enseignant au monde. Hà Ánh Phuong, de l’ethnie Muong, en est la plus jeune.

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L'enseignante Hà Ánh Phuong.
Photo : CTV/CVN

Initié par la Fondation Varkey depuis 2014, le Global Teacher Prize est le prix du meilleur enseignant au monde qui remet chaque année au gagnant un million d’USD. Il récompense le professeur qui a apporté une contribution exceptionnelle à cette profession, tout en valorisant le rôle de ce métier au sein de la société. L’enseignant lauréat est aussi reconnu pour ses techniques innovantes en la matière.

Cette année, les dix finalistes retenus ont été sélectionnés parmi 12.000 postulants du monde entier. Parmi ces noms annoncés le 11 novembre à 0h10 (heure de Hanoï) par la Fondation Varkey, l’organisme de bienfaisance basé à Londres, pour la première fois, une Vietnamienne : Hà Ánh Phuong, 29 ans, professeure d’anglais au lycée Huong Cân, dans la province de Phú Tho (Nord). Elle est la plus jeune à figurer dans cette liste restreinte. Au lieu de se tourner vers une riche carrière dans le privé, cette jeune femme d’ethnie Muong a choisi de retourner dans une région montagneuse au Nord pour promouvoir l’enseignement de cette langue étrangère.

Le décloisonnement grâce à l’anglais

En 2016, Hà Ánh Phuong a quitté son emploi de professeur d’anglais dans un grand centre de langues à Hanoï et d’interprète pour revenir enseigner au lycée Huong Cân, où plus de 90% des élèves sont issus de minorités ethniques. Cet établissement, implanté dans le district de Thanh Son, est considéré depuis quelques années comme "un point lumineux" dans le mouvement d’innovation éducative de Phú Tho. Grâce à de nouvelles technologies et à un bon accès à Internet, il a réussi à faire participer ses élèves à des cours d’anglais transfrontaliers, notamment avec le soutien et l’esprit d’initiative de Hà Ánh Phuong.

Désireuse de "faire des élèves des régions rurales des citoyens du monde", elle a progressivement prouvé que “l’éducation ne connaît pas de limites”. Et elle le fait très bien. En effet, en plus de donner des cours à ses élèves de son pays natal, elle consacre également son temps à enseigner gratuitement aux enfants des bidonvilles en Inde, aux petits d’Afrique du Sud, ou s’engager dans des cours en ligne en Californie. "N’importe quel élève, vivant n’importe où, peut bénéficier de la meilleure éducation. C’est la raison pour laquelle j’ai voulu revenir à Phú Tho pour apporter mon soutien aux élèves locaux", confie-t-elle.

Née dans un district montagneux pauvre de Phú Tho, Hà Ánh Phuong comprend précisément les difficultés que rencontrent les élèves des régions reculées durant leur apprentissage, notamment dans celui des langues étrangères. "Quand j’étais élève, mon apprentissage de l’anglais dépendait uniquement des enseignants et des manuels en classe. J’ai essayé de trouver d’autres opportunités pour y accéder, comme écrire des lettres manuscrites à des amis étrangers, lire et traduire de vieux journaux, ou regarder le weekend les bulletins à la télévision", se souvient-elle, partageant ainsi une des meilleures façons de progresser en anglais.

L'information sur Hà Anh Phuong sur le site
Photo : Linh Thao/CVN

"Au lycée, je n’avais pas encore beaucoup d’opportunités d’apprendre et de parler anglais. Du coup, les week-ends, je cherchais régulièrement à rejoindre des espaces de discussion sur l’application Yahoo pour trouver des amis étrangers capables de m’aider à améliorer mes compétences de communication".

Après avoir obtenu son diplôme à l’Université de Hanoï, Hà Ánh Phuong s’est vu offrir un poste de directrice représentative d’une entreprise pharmaceutique pakistanaise au Vietnam avec un salaire attractif à la clé. Mais elle a refusé la proposition afin de poursuivre ses études post-universitaires et obtenir une maîtrise en pédagogie en anglais. Malgré les promesses de richesse et de confort que lui offrait la capitale, elle a décidé de quitter Hanoï pour revenir à Phu Tho enseigner l’anglais au lycée provincial, ses amis et proches étant tous surpris.

Faire le tour du monde à Phú Tho

Jeune, dynamique et innovante, la jeune enseignante participe activement aux séances d’échange et de développement professionnels à l’échelle mondiale. Lors de ces forums éducatifs interactifs en ligne, Hà Ánh Phuong peut partager son sens créatif et pédagogique avec de nombreux collègues de par le monde et s’en inspirer.

Un de ses projets d’innovation qui démontre toute son ambition, c’est de faire se rencontrer sur Internet ses élèves d’ethnie Muong de sa région reculée avec des élèves américains. Au début, la timidité régnait dans sa classe, ce qui aurait pu décourager plus d’un enseignant et plus d’un élève. Mais au bout de quelques séances, tout est devenu finalement assez familier et même animé, avec le soutien bienveillant de la jeune enseignante dynamique.

Hà Ánh Phuong anime un cours d’anglais au lycée Huong Cân, à Phú Tho (Nord).
Photo : CTV/CVN

Maintenant, via un cours en ligne organisé depuis une commune montagneuse de la province de Phú Tho, ses élèves peuvent présenter en toute confiance les caractéristiques culturelles de la communauté Muong à des étrangers de l’autre bout du monde, comme à Washington. Ils n’ont pas hésité à exposer en anglais lors d’un cours à distance sur le projet "Dites non aux pailles en plastique !". La classe en ligne regroupait des élèves et professeurs de sept pays de quatre continents. Les élèves d’Ánh Phuong y ont notamment présenté à leurs camarades internationaux des pailles en bambou et le processus de fabrication de ces produits.

"Les élèves au Vietnam, en Inde ou aux États-Unis…, même s’ils diffèrent par la couleur de peau et la distance géographique, peuvent toujours converser au sujet de leur culture ou de leur vie quotidienne respective. En voyant les yeux pétillants et confiants de mes élèves lorsqu’ils communiquent en anglais, je crois qu’ils deviendront des citoyens du monde à l’avenir", se réjouit-elle.

Pour Hà Ánh Phuong, une éducation transfrontalière ne nécessite pas beaucoup de moyens matériels, à condition d’avoir un minimum de ressources. Avec seulement un ordinateur portable connecté au réseau Internet, les enseignants peuvent emmener leurs élèves "voyager" à travers les cinq continents pour un coût assez raisonnable.

À l’avenir, la jeune enseignante souhaite développer une chaîne YouTube spécialisée dans l’enseignement gratuit de l’anglais et le partage d’activités pédagogiques, tout en lançant activement de nombreux projets liés à l’éducation au service du développement durable.


Un million d’USD pour le meilleur prof du monde
La Fondation Varkey a créé en 2014 le prix Global Teacher Prize afin de "révéler des milliers d’histoires de héros qui ont transformé la vie de jeunes gens". Elle veut toucher le plus grand nombre possible d’enseignants, qu’ils travaillent dans des écoles situées dans des grandes villes ou dans des villages éloignés. Le vainqueur, "un enseignant à la fois innovant et attentif, et dont l’influence a été source d’inspiration pour ses étudiants et son milieu", recevra une récompense d’un million d’USD. Les postulants, à travers les quatre coins du monde, sont des militants pour l’inclusion et les droits de l’enfant, intègrent les migrants dans les salles de classe et nourrissent les capacités et la confiance de leurs élèves. Ils sont tous des champions du changement et inspirent leurs étudiants et les communautés qui les entourent.


Linh Thao/CVN

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