Le ministre des Finances, Michel Sapin, a présenté en conseil des ministres le programme de stabilité pour 2014-2017, prévisions pluriannuelles auxquelles se soumettent désormais tous les États de la zone euro. Il a affirmé que ce retour à 3%, seuil de tolérance en zone euro, n'était "pas une question de fétichisme ou de soumission".
Les ministres des Finances, Michel Sapin (droite) et du Budget, Christian Eckert, au ministère de l'Économie, le 23 avril |
Repoussé d'une semaine en raison du remaniement, le texte sera soumis au vote de l'Assemblée mardi prochain (29 avril), après un débat qui s'annonce orageux au vu de la fronde cette semaine de la gauche contre le programme de 50 milliards d'économies de Manuel Valls, y compris dans les rangs socialistes, soucieux de préserver les ménages modestes.
La Commission européenne dira ensuite d'ici un mois si elle croit ou non à cette stratégie, sachant que la France a été placée début mars sous surveillance, après avoir bénéficié déjà de deux reports pour atteindre l'objectif de 3%.
Devant la Commission des Finances de l'Assemblée nationale, M. Sapin a souligné que les décisions préservaient "notre modèle social et républicain". "Contrairement à la plupart de nos partenaires européens, nous avons écarté toute baisse de prestations", a-t-il relevé.
Dans son scénario, le gouvernement fait l'hypothèse d'une reprise de l'activité reposant sur l'amélioration de la conjoncture internationale, avec une reprise des exportations, mais aussi sur les allègements fiscaux et sociaux. La France risque de souffrir néanmoins du niveau "trop élevé" de l'euro actuellement, a nuancé M. Sapin.
Le gouvernement table sur une croissance du PIB de 1% en 2014, 1,7% en 2015 puis 2,25% en 2016 et 2017 lorsque son pacte de responsabilité et de solidarité aura produit les effets qu'il en escompte.
50 milliards d'économies confirmés
Manuel Valls, François Hollande et Bernard Cazeneuve à la sortie du Conseil des ministres, le 23 avril à |
Le président du Haut Conseil des Finances Publiques, Didier Migaud, a réservé un accueil mesuré à ce scénario. Devant la commission des Finances de l'Assemblée, il a jugé la prévision pour cette année "réaliste". Mais celle de l'année prochaine "repose sur un enchaînement vertueux de toutes les hypothèses favorables", a-t-il relevé, tout en ne la jugeant "pas hors d'atteinte".
Sursaut du commerce extérieur, vraie reprise de la consommation et de l'investissement en 2016, inflation un peu plus soutenue cette année et en 2015: voici les ingrédients qu'avance le gouvernement pour justifier sa stratégie.Pour 2016, 2017, le Haut conseil a qualifié la prévision d'"optimiste".
Parallèlement, le gouvernement entend poursuivre l'effort de redressement des comptes publics, en diminuant le déficit nominal (État, protection sociale, collectivités locales) et surtout le déficit structurel, c'est-à-dire hors aléas de la conjoncture.
Mais la marche est haute pour arriver à 3% : elle représente un effort équivalent à 1,3 point de PIB (près de 30 milliards d'euros) en deux ans. Une première tranche, d'un montant de 4 milliards d'euros, sera inscrite dès le mois de juin dans un collectif budgétaire, afin d'accélérer la réduction du déficit.
Le gouvernement espère générer 200.000 emplois supplémentaires et un demi point de croissance. Il calcule par ailleurs "une nette accélération en 2015" de l'emploi marchand (+160.000 postes, soit +1%).
Dans son avis publié mercredi 23 avril, le Haut conseil se montre perplexe : la baisse des dépenses en 2014 et 2015 pourrait selon lui au final "peser davantage que prévu par le gouvernement sur la croissance à court terme".
AFP/VNA/CVN