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Logo de Monsanto sur un site à Lillo, près d'Anvers, le 24 mars 2016. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Le régulateur, destinataire de sept plaintes "émanant notamment de personnes concernées par ce fichier", reproche à la société d'avoir manqué à son obligation d'information des personnes, qui n'ont appris l'existence de ce traitement de données que lors de sa révélation dans les médias en mai 2019.
Selon son enquête, le fichier en question contenait pour chacune des "plus de 200 personnalités" inscrites dans le fichier, une "note allant de 1 à 5" permettant "d'évaluer son influence, sa crédibilité et son soutien à la société Monsanto sur divers sujets tels que les pesticides ou les organismes génétiquement modifiés".
L'affaire, révélée par le quotidien Le Monde et la chaîne de télévision France 2 suite à une fuite de documents confidentiels d'agences de communication, s'était rapidement étendue à l'Europe. Des listes de personnalités (politiques, scientifiques, journalistes) existaient également dans au moins six autres pays (Allemagne, Italie, Pays-Bas, Pologne, Espagne, Royaume-Uni) ainsi que pour les institutions européennes, avait indiqué Bayer.
"Au cours de la procédure, (la Cnil) a considérablement réduit la portée initiale des allégations portées contre Monsanto", a réagi Bayer dans une déclaration à l'AFP.
La société conteste toutefois sa qualification en tant que "responsable de traitement des données" qu'elle attribue plutôt à l'agence de communication en charge du fichier. "Ceux qui avaient l'expertise, c'était le cabinet de lobbying. C'est eux qui avaient l'obligation d'informer les personnes quand bien même le fichier était au bénéfice final de Monsanto", a déclaré à l'AFP Yann Padova, associé chez Baker McKenzie et avocat de Bayer-Monsanto.
Le groupe, qui affirme que le fichier n'a plus été utilisé suite au renouvellement pour cinq ans par la Commission européenne de l'autorisation du glyphosate en 2017, examine aujourd'hui l'opportunité d'un recours devant le Conseil d'État.
"La création de fichiers de contacts par les représentants d'intérêts à des fins de lobbying n’est pas, en soi, illégale", explique la Cnil. "En revanche, ne peuvent figurer dans ce fichier que des personnes qui peuvent raisonnablement s'attendre, en raison de leur notoriété ou de leur activité, à être l’objet de contacts du secteur".
Il faut de plus que "les données inscrites dans le fichier aient été collectées légalement et que les personnes soient informées de l'existence du fichier, afin de pouvoir exercer leurs droits, notamment leur droit d’opposition."
Plaintes et excuses
"L’information est un droit essentiel qui conditionne l’exercice des autres droits (droits d’accès, d’opposition, d’effacement…) dont bénéficient les personnes : dans ce cas, elles en ont été empêchées durant plusieurs années", insiste la Cnil, qui a également relevé un manquement à l'obligation d'encadrer les traitements de données effectués par des sous-traitants.
Logo du gendarme français des données personnelles, la Cnil, à Paris, le 29 janvier 2013. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Suite au scandale, le chimiste allemand Bayer, propriétaire de l'américain Monsanto depuis 2018, avait présenté ses excuses et mis un terme "jusqu'à nouvel ordre" à sa collaboration en matière de communication avec l'agence Fleishman Hillard, qui avait établi ces fichiers.
Il s'était également engagé à contacter les personnalités présentes sur ces listes, tandis que plusieurs médias (dont Le Monde, France Télévisions, Radio France, Le Parisien et l'Agence France-Presse), des ONG et le parti écologiste EELV avaient annoncé après les révélations avoir saisi la Cnil et/ou la justice française.
Celle-ci avait annoncé l'ouverture d'une enquête sur des soupçons de fichage illégal qui vise notamment le chef de "collecte de données personnelles par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite".
La Commission européenne a donné en mai son feu vert à la France pour un crédit d'impôt à destination des agriculteurs qui décident de renoncer à l'usage d'herbicides à base de glyphosate.
Aux États-Unis, Bayer a signé en juin 2020 un accord de plus de 10 milliards d'USD pour mettre fin aux quelques 125.000 plaintes contre son herbicide phare et très controversé Round'Up, accord partiellement rejeté en mai dernier par la justice américaine.
AFP/VNA/CVN