>>Premier défilé Dior post-Raf Simons, le "nouveau réalisme de la couture"
Défilé Dior haute couture à Paris, le 1er juillet. |
"Are clothes modern?" (les vêtements sont-ils modernes?), lit-on sur la robe tunique blanche brodée d'une citation de l'architecte Bernard Rudofsky qui ouvre le défilé lundi 1er juillet à Paris dans un décor blanc et noir surréaliste signé par l'artiste féministe Penny Slinger entrecoupé d'un mini-jardin sur le toit. Inspirée du court-métrage d'Agnès Varda "Les dites cariatides" et rendant hommage à la passion de Christian Dior pour l'architecture, la collection s'interroge sur l'"l'habit et l'habitat", les vêtements haute couture qui se font "sur mesure" comme des maisons et dans lesquels on se sent bien.
Résilles et semelle collée
"Les cariatides sont une excellente synthèse: un pilier architectural qui maintient un aspect gracieux dans leur habit, dans leur attitude. La force liée à la grâce c'est ça la beauté pour moi", explique la directrice artistique italienne des collections femmes Maria Grazia Chiuri.
Robes et vestes bar new look, tailleurs avec des jupes culottes, robes du soir ou robes de bal, les tenues sont pour la plupart noires pour souligner la pureté architecturale des formes. La légèreté rime avec la modernité et passe par le jeu des transparences, les résilles qui reproduisent les motifs d'anciennes dentelles retrouvées dans les archives de Christian Dior sur les T-shirts, collants et voilettes qui cachent les regards charbonneux, pour une touche rock. Les bijoux sont gros et surréalistes, à plusieurs lectures, représentant à la fois cariatides et insectes.
"Le noir est sûrement ma couleur préférée comme le blanc, elle fait voir la ligne. Je me reconnais dans cette couleur comme toute une génération. C'est une couleur de l'élégance et aussi de la séduction, religieuse, qui représente la richesse parce que dans les temps anciens il était très difficile de l'obtenir", souligne Maria Grazia Chiuri. Le feu, l'eau et l'air font lors irruption comme sur cette robe de bal asymétrique en gaze jacquard avec des flammes de fils lamés cuivre, robe en gaze dégradée de bordeaux à noir ou de longues robes tuniques argentées. Les éléments forts de la collection sont les chaussures composées juste d'une semelle collée aux bas ou chaussettes résille et le "péplos", cette tunique que portaient les femmes dans la Grèce antique sans coupe déterminée, à laquelle le corps donne la forme.
Maison de poupée Dior
"Il était très important pour moi de faire ce péplos. On a souvent une vision de la mode comme d'un travail créatif, mais un peu superficiel, mais en fait nous avons une grande responsabilité de faire en sorte que les gens se sentent bien" dans leur vêtement, souligne Maria Grazia Chiuri.
Le talon est presque banni de cette collection à part quelques escarpins à talons très bas portés avec des ensembles de jour. Les somptueuses robes du soir, courtes ou longues se portent avec des chaussures plates rappelant les spartiates. Car, pour la créatrice, de point de vue anthropologique, le talon est une "évolution contemporaine de la tradition chinoise des pieds "lotus", pratique consistant à bander les pieds des femmes pour en réduire la longueur du pied et en faire la forme d'un bouton de lotus.
Le dernier look réservé traditionnellement à la robe de mariée dans la haute couture est une maison de poupée dorée représentant la maison Dior au 30 avenue Montaigne pour rendre hommage aux femmes "clientes mais aussi couturières". Connue pour ses messages féministes et ses collaborations avec les artistes femmes, Maria Grazia Chiura se voit remettre lundi soir la Légion d'honneur par Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes.
"Je suis très émue par cette reconnaissance en France où la mode et la culture ont une telle importance. Quand j'ai commencé dans la mode, je n'ai jamais espéré ni de devenir directrice créative ni de recevoir une récompense aussi importante. Je suis très contente et un peu dépaysée", a-t-elle commenté.
AFP/VNA/CVN