Fausses vacances à la mer sous le toit du «plus grand bâtiment du monde» en Chine

Des vagues artificielles soulèvent les foules d’estivants avant de se briser sur une plage de béton, sur fond de palmiers : sous le toit du «plus grand bâtiment du monde», se mêlent artifices et consumérisme effréné à la chinoise, très loin de l’océan.

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Une vue du «New Century Global Center» à Chengdu, capitale de la province chinoise du Sichuan.

Le «New Century Global Center» est devenu en trois ans un monument de Chengdu, capitale de la province du Sichuan et métropole emblématique de l’ébouriffant essor économique du Sud-Ouest de la Chine.

Cet imposant parallélépipède, de 100 mètres de haut, pour une base 500m de long et 400 mètres de large, est présenté comme «le plus grand bâtiment du monde d’un seul tenant», avec une surface totale de 1,76 million de mètre carré, quand à Washington le Pentagone en offre 600.000.

Cet édifice démesuré, où le visiteur perd aisément son chemin, abrite des centaines de boutiques, de restaurants, de bureaux, des cinémas et une patinoire, ainsi qu’un gigantesque espace aux allures de caverne occupé par un parc aquatique, sous les voûtes d’une armature métallique si haute qu’elle en devient un ciel artificiel.

Dans un immense bassin, des vagues se succèdent, actionnées par une puissante machinerie, avant de s’échouer sur une fausse plage de béton couleur sable longue de 400 mètres, entourée de stands de restauration et de plantes luxuriantes : un air de station balnéaire, à 1.000 km des côtes les plus proches.

«Cet océan en intérieur m’attire énormément, il y a beaucoup d’installations et des activités comme le surf et le ski nautique. C’est un autre monde !», s’enthousiasme Gao Nini, une touriste de 31 ans venue de la ville côtière de Qingdao (Est).

«Bien sûr, chez nous, il y a la mer, mais j’ai horriblement peur de bronzer», confie-t-elle. C’est l’avantage de cette «mer» à l’abri du soleil, alors que pour les femmes chinoises, la blancheur de la peau est un critère de beauté crucial.

Exotisme sous cloche

Sanglés dans leurs gilets de sauvetage obligatoires aux couleurs criardes, des centaines de Chinois immergés jusqu’aux genoux guettent les vagues ou s’éclaboussent, tout en tentant de s’apercevoir sur un gigantesque écran : y sont projetées des images vidéos des «nageurs» filmés en temps réel, entre des clips musicaux sud-coréens.

Non loin, une imitation d’église surmontée d’un haut clocher de type italien et entourée de palmiers accueille des séquences photos. Une cage abrite une poignée de paons, tandis qu’une fresque de village grec instille une ambiance méditerranéenne. Partout, les visiteurs brandissent leurs smartphones et multiplient les selfies.

Des personnes en gilet de sauvetage profitant des vagues dans le parc aquatique à l’intérieur du plus grand bâtiment du monde à Chengdu.
Photo : AFP/VNA/CVN

Autour du bassin, des hôtels de luxe alignent les chambres avec «vue sur l’océan» sur des façades traversées de fausses lianes façon jungle, et une «promenade» ombragée en hauteur accueille les terrasses de restaurants de fruits de mer. Ce simulacre d’environnement exotique sous cloche, avec cabines de plage en forme de cocotiers et ersatz d’océan, donne l’impression d’un décor de série télévisée.

«Bien entendu que ça me dérange, ces imitations! Mais je n’ai pas de meilleures options. Je n’ai pas beaucoup de temps ni de moyens», soupire Zhou You, un étudiant de 23 ans de passage à Chengdu.

«Si vous voulez une véritable plage, vous pouvez toujours aller aux Philippines. Mais ici, ce n’est pas si mal tout de même», tempère-t-il.

Bières allemandes et faux océans

Selon les médias, le gouver-nement local a dépensé plus de 6 milliards de dollars dans ce bâtiment, censé consolider le statut de Chengdu comme centre économique dynamique. La ville est désormais reliée par le chemin de fer à l’Europe et ambitionne de devenir une «Silicon Valley» chinoise.

Parmi les visiteurs en maillot de bain dégustant pizzas, jus d’orange chaud, sorbets aux haricots rouges et chopes de bières allemandes au bord de l’eau, certains rêvent malgré tout de voir le véritable océan.

«Je n’ai jamais vu la mer pour de vrai, je voudrais y aller et surfer. Le +faux océan+, c’est très sympa, mais bon, ce n’est pas aussi bien que la réalité», tranche Liu Qingsong, un garçonnet de sept ans, à l’issue de sa deuxième visite au «Global Center».

À défaut d’aller à la montagne, le petit Liu pourra bientôt aller skier toute l’année à Canton, ville du Sud de la Chine où le mercure dépasse les 30 degrés pendant l’été et où, jusqu’en janvier dernier, il n’avait plus neigé depuis dix ans.

Selon la presse locale, un gigantesque édifice incurvé, en construction depuis octobre 2015, doit y accueillir à terme sur 75.000 m² une station de ski avec pistes, patinoire, chalets et sapins enneigés... dans un décor digne des plus beaux villages alpins.


AFP/VNA/CVN

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