Aujourd'hui, il suffit de quelques heures pour passer d’Occident en Orient, d’un univers à l’autre. Quelques heures, c’est court, trop court pour se débarrasser de son attirail culturel et adopter celui du pays qui nous accueille. Une fois sur place, même avec la meilleure volonté du monde, il faut plus que quelques heures pour observer, comprendre, s’adapter et s’intégrer. Alors, à défaut de temps ou de volonté, nombreux sont ceux qui revêtent le déguisement qui leur semble être le meilleur pour donner une image qui leur semble adaptée à leur nouvel environnement.
Manque d'élégance
Étonnant le nombre d’Occidentaux, habitués à évoluer dans un univers aseptisé, qui imaginent que dès que l’on dépasse l’Oural, il faut jeter par-dessus bord sa garde-robe pour la remplacer par des vêtements dénichés au fond d’une friperie, histoire de faire couleur locale. Il y a d’ailleurs parfois quelque indécence à se la jouer débraillé pour faire couleur locale, avec des vêtements dont le prix d’un seul peut suffire à vêtir une famille entière, alors que ceux-là même que l’on croit imiter, aspirent à disposer de moyens leur permettant de s’habiller dignement.
J’admire toujours ces jeunes étudiants qui ne possèdent parfois qu’un pantalon et deux chemises, et qui sont attentifs à toujours les tenir nets. Je salue le courage de ces mères de familles qui chaque jour lavent à la main le peu de linge dont elles disposent pour que leurs enfants, leurs époux et elles-mêmes soient toujours dignes et propres. Je m’attendris devant ces jeunes filles qui s’acharnent, avec le peu d’argent dont elles disposent, à toujours être attentives à leurs toilettes, fouillant sans cesse dans les marchés et les boutiques pour trouver le vêtement qui va les rendre encore plus élégantes. Car le Vietnamien aime l’élégance ! Il suffit d’observer les gens dans la rue pour s’apercevoir combien devient ridicule celui qui volontairement s’accoutre de la façon la plus nonchalante possible, sous prétexte qu’ici, il fait chaud.
L’élégance, une tradition vietnamienne ! |
Photo : Gérard Bonnafont/CVN |
Et j’ai souvent envie de hurler de rire, quand je vois les avions devenir coulisses de théâtre, au moment où quelques minutes avant d’atterrir dans leurs pays d’origine, les passagers se débarrassent de leurs oripeaux pour revêtir des vêtements enfin propres.
Et si on apprenait à rester simple sans tomber dans le snobisme ethnique, histoire de montrer aux Vietnamiens que tous les étrangers ne sont pas débraillés, et que je n’ai pas honte de m’habiller correctement par politesse pour tous ceux qui m’entoure.
Manque de respect
Mon sourire devient franchement agacé, quand je vois la façon dont se comportent certains de mes compatriotes (étymologiquement qui partagent la même patrie, en l’occurrence terre natale).
Le Vietnam est un pays accueillant, donc l’étranger y est reçu comme un hôte, et j’ose dire comme un ami. Il n’y a pas a priori de sentiment xénophobe, même envers ceux avec lesquels il y eût dans le passé quelques douloureuses dissensions. D’aucuns prétendent que cette amabilité est un calcul mathématique basé sur le principe des vases communicants. Je leur laisse la responsabilité de leur opinion.
Toujours est-il que certains profitent sans vergogne de ce statut d’hôte privilégié pour considérer le pays qui les reçoit comme un immense terrain de jeu où tout est permis, y compris… sans permis. Ainsi, il y a quelque chose d’irritant à voir des Tâys circuler sans casque, en jouant les matamores en moto, fonçant dans la circulation, sous prétexte que eux savent conduire, parce que dans leurs pays ils pilotent des grosses cylindrées. Quelle fierté mal placée ! Sans doute victimes d’une amnésie liée au décalage horaire ou au changement de climat, ils oublient que dans leurs pays d’origine ils ne se risqueraient pas à circuler sans casque, par crainte de la sanction.
Curieux, ce besoin de vouloir à tout prix se distinguer, sous prétexte de montrer sa différence, alors que par notre apparence même, nous sommes déjà différents. Ça me rappelle ces enfants qui, pour que l’on s’occupe d’eux, sont prêts à tout, y compris à faire des bêtises !!!
Et si on retrouvait le respect et la courtoisie, juste pour prouver aux Vietnamiens que tous les étrangers ne sont pas des délinquants, et que je ne sois pas ridicule en respectant les règles du pays qui m’a adopté.
Manque de bon sens
Dans le Nord du Vietnam, en hiver, on la supporte bien la petite laine et le gros anorak, quand on sort dans les petits matins brumeux. Comprenez ma surprise, quand je vois sur les trottoirs des personnes se promener en short, tongs et tee-shirt ! Frisant l’hypothermie, ils flânent au gré de leurs envies, rougissant au fur et à mesure que leur température interne s’abaisse. De nouveau, je ne peux m’empêcher d’être étonné de l’effet magique du Vietnam sur l’organisme.
Alors que dans leurs pays d’origine, dès les premiers frimas, ces mêmes personnes se seraient recouvertes d’une couche protectrice de vêtements chauds, ici elles peuvent s’exposer à tout vent, sans craindre le coup de froid. Sans doute, la chaleur de l’accueil de la population réchauffe-t-elle suffisamment les cœurs, pour que le corps supporte sans broncher un froid de gueux, à vous faire attraper des bronchites carabinées…
Ou peut-être faut-il remercier Monsieur Coué, qui permet de se convaincre que puisque le Vietnam est présenté comme un pays chaud à travers toutes les images d’Epinal ou d’ailleurs, il y fait obligatoirement chaud, même quand il y fait froid. Dites, vous ne pourriez pas vous couvrir un peu, seulement pour que mes voisins ne croient pas que tous les étrangers sont immunisés contre le froid, et que je ne sois pas ridicule en sortant emmitouflé jusqu’aux oreilles en hiver !
Que voulez-vous, nul n’est parfait…, mais peut-être suis-je ridicule d’y croire ?