Les manifestations de samedi dans la capitale américaine, à New York, à Boston et à Berkeley (Californie) sont parmi les plus importantes depuis le début du mouvement déclenché par la mort de Michael Brown, abattu alors qu'il n'était pas armé le 9 août à Ferguson (Missouri). Les décisions de deux grands jurys d'exempter de poursuites les policiers blancs responsables du décès de Michael Brown et de celui d'Eric Garner, à New York en juillet, ont attisé la colère.
Manifestation en faveur des Noirs tués par des policiers blancs, le 13 décembre à New York. Photo : AFP/VNA/CVN
À Washington, ville qui a déjà accueilli dans le passé de grandes marches pour les droits civiques, la manifestation était organisée à l'initiative du pasteur Al Sharpton, figure des droits civiques aux États-Unis. Sous le mot d'ordre "Justice for all" (Justice pour tous), elle a notamment rassemblé des membres des familles de Michael Brown, d'Eric Garner, de Tamir Rice et de Trayvon Martin, des Afro-Américains tués par des policiers blancs. Ces décès ont réveillé le spectre du racisme aux États-Unis, et de nombreuses manifestations de protestation ont déjà eu lieu ces dernières semaines à travers le pays.
À Washington, où le rassemblement a bloqué une partie de Pennsylvania Avenue, qui mène au Capitole, les manifestants, souvent jeunes, déterminés, et parfois venus de très loin, scandaient "No justice, no peace" (Pas de justice, pas de paix). Des intervenants se sont succédé sur un podium pour s'adresser à la foule. "Nous demandons au Congrès d'adopter une loi contre le profilage racial. Nous devons faire cesser cela dès maintenant. Nous sommes là aujourd'hui, nous serons là demain, nous resterons jusqu'à ce que le travail soit fait", a lancé Laura Murphy, de l'Association de défense des libertés individuelles (ACLU).
"Ce n'est pas une marche des Noirs contre les Blancs, c'est une marche américaine pour les droits des citoyens américains", a déclaré Al Sharpton, appelant le Congrès à agir, avant de donner la parole aux membres des familles des récentes victimes.
"Arrêtez les policiers tueurs"
"Mon mari était un homme très discret, mais maintenant il fait beaucoup de bruit", a déclaré devant la foule Esaw Garner, la veuve d'Eric Garner, mort étouffé en juillet lors d'une interpellation brutale à New York. "Nous reviendrons ici autant de fois que nécessaire. Mais la prochaine fois que nous reviendrons, nous aimerions que ce soit pour une célébration, pas en raison d'un assassinat", a-t-elle dit. La mère d'Eric Garner, Gwen Carr, a elle aussi déclaré que les rassemblements se poursuivraient jusqu'à ce que les parlementaires prennent en compte les demandes de réformes qui leur sont adressées. "C'est un moment historique", a-t-elle lancé, soulevant des acclamations dans la foule.
Les manifestants ont défilé pacifiquement. Leurs banderoles proclamaient : "Nous marchons pour mettre fin au profilage racial", "Arrêtez les policiers tueurs", "Les vies des Noirs comptent", ou encore "Je ne peux pas respirer" (I can't breathe), les derniers mots d'Eric Garner. Une pancarte tenue par une femme noire s'adressait directement à Barack Obama : "Président Obama, profitez de ce moment pour agir, les ancêtres regardent".
Le premier président noir des États-Unis avance prudemment sur ce sujet : il appelle au respect des décisions de justice tout en assurant comprendre la colère de ceux qui ont le sentiment, à juste titre souligne-t-il, que la couleur de leur peau a un impact sur la façon dont la loi est appliquée.
À New York, la police a annoncé qu'environ 25.000 personnes avaient participé au rassemblement de samedi. Les organisateurs ont évalué sur Twitter la participation à 50.000 personnes. À Boston (Massachusetts), la police a annoncé que des rues avaient été bloquées et que plusieurs personnes avaient été arrêtées. À Berkeley (Californie), l'effigie d'un homme noir pendu à un noeud coulant a été installée à l'une des entrées de l'université, avec tracés sur sa poitrine les mots "Je ne peux pas respirer".