En Uruguay, la première école 100% durable d’Amérique latine

Un bâtiment fait de pneus, de bouteilles en verre et en plastique, qui ne consomme pas d’énergie traditionnelle et ne pollue pas : depuis quelques mois, un village d’Uruguay accueille la première école 100% durable d’Amérique latine.

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Inaugurée en mars, l’École primaire N°294, située à 85 km à l’est de Montevideo, est le premier établissement éducatif d’Amérique latine entièrement durable.

En matin d’hiver austral, il fait 7,5 degrés à Jaureguiberry, bourgade de 500 habitants située à 85 kilomètres à l’est de la capitale Montevideo. Mais à l’intérieur de l’École primaire N°294, on approche facilement les 20 degrés.

«Nous sommes bien, avec plus de 50% de charge, uniquement de l’énergie solaire», explique la directrice de l’établissement, Alicia Alvarez, 51 ans, en montrant les condensateurs stockant l’énergie. «J’éteins un peu la lumière pour ne pas gaspiller», ajoute-t-elle. Le soleil permet d’alimenter l’école primaire, qui n’est pas connectée au réseau national d’électricité.

Inaugurée en mars et accueillant des enfants de 3 à 12 ans, elle est la première école d’Amérique latine entièrement durable et dès l’extérieur, cela se voit : des pneus colorés agrémentent l’entrée, des panneaux solaires recouvrent ses toits, de grandes verrières donnent sur des potagers...

Derrière ce projet se trouve le célèbre architecte américain Michael Reynolds, 70 ans, connu comme «le guerrier des ordures» (Garbage warrior), car il passe sa vie à réaliser des constructions à partir de déchets.

Dans les années 1970 - à l’époque où il a commencé à imaginer une architecture fondée presque exclusivement sur des résidus - «tout le monde me disait que j’étais un idiot», confiait-il.

Une école au service d’une vie verte

«J’avais la vingtaine, j’ai regardé autour de moi et j’ai su que les choses ne pouvaient pas continuer comme ça», donc «j’ai inventé une nouvelle profession appelée +biotecture+ car je crois que l’architecture ne fait pas ce qu’il faut pour les personnes et pour la planète», expliquait-il.

Par le passé, il a déjà bâti sur l’île de Pâques (Chili), à Ushuaia (Argentine), au Nouveau-Mexique (États-Unis) et en Sierra Leone.

À Jaureguiberry, ce sont 2.000 pneus, 3.000 bouteilles en verre, 1.500 bouteilles en plastique et 12.000 canettes qui ont été mis bout à bout, avec du bois, du verre et du ciment, pour faire naître l’école N°294. Le projet, porté par une ONG locale et financé par une marque de lessive, aurait coûté 300.000 dollars, selon les médias uruguayens. Pouvant accueillir jusqu’à 100 élèves, l’établissement en compte actuellement 39, certains commençant tout juste la maternelle tandis que d’autres font leur dernière année avant le collège. Ils partagent tous le même enthousiasme, celui de se trouver dans une école unique et proche de la nature.

Le célèbre architecte américain Michael Reynolds (centre), travaille pendant la période de construction de l’École primaire N°294.

«C’est une école pleine de vie», sourit Paula, sept ans, qui élabore avec ses camarades une liste des choses à faire ou ne pas faire pour prendre soin de la planète. Ce matin-là, dans la classe de la maîtresse Rita Montans, 45 ans, les élèves participent à un atelier d’écriture spontanée et d’organisation d’idées sur le thème de la protection de l’environnement.

Chacun fait des propositions : «Ne pas jeter les déchets», «Protéger les plantes», «Ne pas jeter les bouteilles»... «S’il n’y avait pas d’arbres, on ne serait plus là», lance d’un air assuré Sébastian, sept ans. L’objectif, selon l’enseignante, est de créer un code de conduite à suivre, avec des «croix vertes» pour les bonnes pratiques.

Du potager à la cantine

L’école en est déjà un bon exemple : elle ne produit aucun déchet et, face aux trois salles de classe, le potager qui abrite du basilic, des tomates, des fraises ou encore des blettes reçoit du compost comme engrais naturel.

Sur le toit, l’eau de pluie est recueillie puis filtrée, avant de servir aux toilettes et au potager.

Pour y donner des cours, les enseignants reçoivent une formation spéciale qui leur permet d’adapter leurs cours en les axant sur le respect de l’environnement et de faire un usage responsable du bâtiment et de son énergie.

Une fois par semaine, les enfants consacrent une heure au potager, récoltant les fruits et légumes qu’ils ont eux-mêmes cultivés et qu’ils dégusteront ensuite à la cantine. Sébastian raconte ainsi avoir cueilli des tomates cerises. «Elles sont bonnes !», s’exclame Felipe, huit ans. En revanche, il faudra attendre avant de pouvoir goûter les aubergines. «On ne peut pas encore les manger parce qu’elles ne sont pas mûres», observe, résignée, Patricia, sept ans.

Alors qu’un bus de touristes s’arrête devant le bâtiment pour prendre en photo cette école unique en son genre, la directrice Alicia Alvarez se dit convaincue qu’«il n’y a pas meilleur apprentissage que de vivre les choses».

Et pour ces élèves privilégiés, «qu’ils puissent appliquer ou non» ces leçons à l’avenir, d’une manière ou d’une autre, «la graine est déjà plantée», assure-t-elle.


AFP/VNA/CVN

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