En Inde, Bombay vulnérable à la montée des océans

En pleine mousson, il n'est pas rare que les vagues viennent mourir juste contre la bicoque de Ganga Singh, dressée au bord de la mer d'Arabie à Bombay, mégapole côtière indienne saturée et menacée par la montée des océans.

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Des habitants de Bombay observent la marée basse le 15 septembre.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Nous avons construit des petits murs mais les vagues les détruisent", explique cette femme de 47 ans, qui cohabite dans ces lieux étroits avec onze membres de sa famille.
Dans cette ville densément peuplée de vingt millions d'habitants, où l'homme occupe le moindre centimètre carré d'espace disponible, Ganga Singh et les siens seraient parmi les premières populations à perdre leur foyer avec la hausse du niveau des océans.
"Nous avons tous peur", confie-t-elle.
Selon une étude universitaire, un quart de la bouillonnante capitale économique indienne pourrait être sujet à des inondations si les océans s'élèvent d'un mètre d'ici la fin du siècle en raison du réchauffement climatique. Même une hausse de 20 centimètres du niveau des mers doublerait la fréquence des inondations dans les zones tropicales comme Bombay, d'après une étude d'experts américains de 2017.
Bombay, autrefois sept petites îles rassemblées en une seule par les Britanniques à l'époque de la colonisation, est particulièrement vulnérable aux inondations car toute une partie de la ville est située sous la ligne de marée haute.
Au cours des quinze dernières années, le rivage a reculé de plus de 20 mètres sur certaines de ses plages, selon des études de l'ONG Watchdog Foundation.
Les inondations dues aux pluies torrentielles ont causé des centaines de morts et coûté des milliards de dollars au cours des deux dernières décennies. Un épisode particulièrement violent a fait à lui seul 500 morts en 2005.
"Jamais assez"
En réaction à la menace, le gouvernement du Maharashtra, vaste
État de l'ouest de l'Inde dont Bombay est la capitale, prévoit d'ériger vingt digues en mer le long de la côte de 720 kilomètres, dont quatre au large de Bombay. Les experts s'interrogent toutefois sur leur efficacité au long cours.
"Nous avons besoin d'une vision sur le long terme", déclare le climatologue Roxy Mathew Koll, de l'Institut indien de météorologie tropicale.
Les autorités sont également engagées dans une grande campagne de plantation de mangroves. Ces forêts amphibies, qu'on trouve dans les zones tropicales humides et qui agissent comme des éponges avec l'eau, sont parmi les défenses naturelles les plus efficaces contre les inondations.
En périphérie de Bombay, le responsable forestier D.R. Patil et trois cents de ses employés progressent dans de l'eau parfois haute jusqu'au genou dans la plantation de mangroves d'Airoli. Ils mettent en terre de nouveaux arbres et vérifient la croissance de ceux déjà plantés.
"Les mangroves sont la première ligne de défense contre l'inondation et nous n'avons pas d'autres options", déclare M. Patil. "Même une digue ne peut protéger la ville autant que des mangroves."
D'après lui, le Maharashtra compte à ce jour plus de 30.000 ha de mangroves après une augmentation de 82% de leur surface dans l'
État entre 2015 et 2017.
Les pouvoirs locaux ont passé une législation pour protéger les mangroves et peuvent empêcher des constructions sur les zone humides, y démolir des habitations illégales et ériger des murs autour.
Mais les défenseurs de l'environnement jugent la politique des autorités seulement à moitié convaincante.
Pour l'environnementaliste Nandkumar Pawar, si les mangroves sont importantes, le problème de la disparition de systèmes d'évacuation naturelle des eaux est tout aussi crucial.
D'après lui, certaines lois destinées à protéger le littoral ont été "assouplies" pour que de nouvelles constructions se rapprochent de la rive, recouvrant des rivières et criques qui agissaient comme voies de sortie pour les inondations.
"Nous faisons du mieux que nous pouvons avec nos capacités et nos ressources", dit Jitendra Raisinghani, vice-directeur du Conseil maritime du Maharashtra, assurant que l'administration travaille à un plan de gestion du littoral. Mais "ce n'est jamais assez et nous pouvons faire plus."
En l'absence de place au sol, Bombay se développe en hauteur, avec des tours toujours plus hautes qui poussent pour des champignons. Cependant pour Ganga Singh, la riveraine de la mer, "si les niveaux des eaux montent, aucun endroit de Bombay ne sera sûr".

AFP/VNA/CVN

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