>>Renault et Nissan à couteaux tirés, l'État français tente de rassurer
>>Renault-Fiat: l'État français prudent avant un nouveau conseil d'administration
Jean-Dominique Senard, le 11 février à Paris. |
Photo: AFP/VNA/CVN |
"Il n'y aura pas de réussite du groupe Renault sans réussite de l'Alliance" avec Nissan et Mitsubishi, a affirmé M. Senard, qui a récemment échoué à mener à bien un projet de mariage avec Fiat Chrysler (FCA) en raison des réticences de Nissan et de l'État français, premier actionnaire de Renault.
"Aujourd'hui, l'alliance prend un nouveau départ et elle est et doit rester plus que jamais à la fois un pilier et un moteur du développement de chacun de ses membres", a martelé M. Senard.
Il s'exprimait pour la première fois devant l'assemblée générale, au Palais des Congrès à Paris. Signe de l'intérêt des actionnaires, la direction du groupe au losange estimait l'affluence en hausse de 50% par rapport à l'an dernier, soit environ 900 personnes.
M. Senard a bénéficié d'un vote de confiance, près de 91% des voix de l'assemblée générale approuvant sa nomination pour quatre ans au conseil d'administration de Renault.
Il s'agissait de la première AG depuis la chute de Carlos Ghosn, embourbé dans une affaire de malversations présumées au Japon. L'affaire, qui a démarré par son arrestation au Japon en novembre, a miné la confiance au sein du partenariat franco-japonais.
L'affaire Ghosn aura aussi coûté cher aux actionnaires de Renault. Depuis l'arrestation de l'homme d'affaires, architecte de l'alliance avec Nissan et Mitsubishi qu'il a hissée au premier rang automobile mondial, l'action du constructeur français évolue à ses plus bas niveaux, aux alentours de 55 euros. En un an, le titre Renault a perdu un tiers de sa valeur.
Certes, le groupe au losange souffre comme l'ensemble du secteur d'une conjoncture internationale morose et des bouleversements technologiques qui imposent de lourds investissements dans les motorisations électriques, sans garantie de rentabilité.
Senard applaudi
Mais certains actionnaires reprochent aux administrateurs de Renault de ne pas avoir suffisamment exercé leur vigilance à l'égard de la gestion de Carlos Ghosn. La réunion de mercredi 12 juin est pourtant restée très calme, M. Senard étant applaudi à plusieurs reprises par le public.
Renault a annoncé récemment qu'il envisageait des poursuites contre M. Ghosn pour avoir engagé 11 millions d'euros de dépenses suspectes au sein d'une filiale commune avec Nissan, basée aux Pays-Bas.
Mercredi 12 juin, les actionnaires ont massivement voté contre l'octroi à l'ancien PDG de sa rémunération variable pour 2018, comme le demandait le conseil d'administration, réduisant ses émoluments à son seul salaire fixe d'un montant de 1 million d'euros brut.
Jean-Dominique Senard a également pris la parole mercredi 12 juin pour s'expliquer longuement sur l'échec du projet de mariage avec Fiat Chrysler (FCA) la semaine dernière, projet qui avait été annoncé seulement 11 jours plus tôt.
"Les représentants de l'État n'ont pas partagé (notre) analyse et le vote (qui aurait approuvé la poursuite des négociations) n'a pu avoir lieu, ce qui personnellement me déçoit", a-t-il déclaré, sans fermer la porte à une éventuelle reprise des discussions avec le groupe italo-américain.
Il a révélé que c'était le ministre de l'Économie Bruno Le Maire qui lui avait "suggéré il y a quelques mois de prendre contact avec les dirigeants de Fiat Chrysler".
Cette fusion, dite "entre égaux", devait créer le numéro 3 mondial de l'automobile et permettre à Renault de mettre la pression sur son partenaire Nissan, tout en lui offrant des perspectives de synergies renforcées.
Mais elle a échoué en raison d'un délai supplémentaire exigé par l'État français, premier actionnaire de Renault, qui a poussé les dirigeants de Fiat Chrysler à jeter l'éponge, estimant que les conditions politiques n'étaient pas réunies.
Les relations tendues avec Nissan depuis novembre et l'échec de ce mariage posent la question de l'avenir de Renault, un groupe qui à lui seul n'a produit que 3,9 millions de véhicules l'an dernier et dont les ventes, pour plus de la moitié hors d'Europe, ont souffert ces derniers mois des vents contraires sur les marchés internationaux.
Le constructeur français a affiché en 2018 un résultat net de 3,3 milliards d'euros, en recul de plus d'un tiers par rapport à l'année précédente, notamment à cause des difficultés de Nissan, dont Renault détient 43% du capital. Et 2019 s'annonce bien plus difficile.
AFP/VNA/CVN