Des modèles d’estampes populaires reviennent au pays

Nguyên Dang Chê, artisan de Dông Hô, s’attelle à la réalisation d’estampes à partir de 30 modèles originaux redonnés par la France après des années d’«exil». Ces modèles, considérés comme disparus, ravissent tous les amoureux de ces imageries populaires.


Situé à seulement 40 km à l’ouest de Hanoi, le village de Dông Hô, district de Thuân Thành, province de Bac Ninh (Nord), s’est taillé une réputation nationale grâce à ses estampes, un artisanat familial qui se transmet de père en fils depuis cinq siècles. D’après les chercheurs, la fabrication a connu son âge d’or entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe. Pendant l’époque coloniale française, de nombreux exemplaires - dont des modèles originaux - ont été emportés par des Français. Les estampes de Dông Hô tiennent une place de choix dans l’ouvrage Imagerie populaire vietnamienne du professeur français Maurice Durand, publié à Paris par l’École française d’Extrême-Orient en 1960 et réédité.

L’artisan Nguyên Dang Chê présente les estampes populaires de Dông Hô à des élèves visitant son atelier.


Des modèles perdus revenus de France
En 2011, l’Agence française de développement (AFD) à Hanoi, par l’intermédiaire d’Alain Henry, alors directeur, a offert à l’artisan Nguyên Dang Chê une trentaine de modèles originaux qui avaient quitté le pays et étaient conservés en France. Il s’agit de peintures de format A4 accompagnées chacune d’une légende. Conscient de la valeur des pièces retrouvées, l’artisan Nguyên Dang Chê, créateur du Centre d’archives des peintures traditionnelles de Dông Hô (depuis 2008), s’est lancé immédiatement dans la réalisation d’estampes.
Pour multiplier les exemplaires, l’artisan nonagénaire respecte les techniques héritées de ses ancêtres. Les estampes sont reproduites selon un procédé nécessitant au moins cinq séances de gravure, avec cinq planches de bois gravés au ciseau dans des essences différentes. Chaque planche de bois prend en charge une couleur différente. Une estampe comprend au moins cinq couleurs, donc cinq planches. Ensuite, l’artisan imprime les images sur du papier traditionnel dó, produit à partir d’écorces, avec des couleurs confectionnées à partir de pigments naturels. M. Chê a fait savoir que pour ces travaux, le nombre de planches de bois s’élève à près de 200.


Une valeur intemporelle
En plus de 500 ans d’existence, les imageries populaires de Dông Hô se sont taillées une place de choix dans l’art traditionnel vietnamien. Les thèmes principaux sont les vœux de bonne fortune, les personnages historiques, les activités quotidiennes et des allégories traditionnelles. Inspirées de la vie quotidienne, en particulier à la campagne, ces peintures ne servent pas qu’à la décoration des maisons.
Il n’y a aucune donnée sur le nombre exact de modèles originaux. En 1992, l’artisan Nguyên Dang Chê a commencé à faire des études et à reproduire les modèles les plus rares. D’après ses estimations, il y aurait environ 200 modèles authentiques. En mars 2013, les estampes de Dông Hô ont été reconnues comme patrimoine culturel immatériel national. Le Premier ministre Nguyên Tân Dung a autorisé ses défenseurs à élaborer un dossier à l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) afin d’obtenir le titre de «Patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde d’urgence» pour la période 2012-2016. Selon les prévisions, le dossier sera soumis d’ici deux ans à l’UNESCO.

Linh Thao/CVN

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