>>Calais, et ensuite ? Le parcours des migrants après le démantèlement de la "Jungle"
Des migrants autour de véhicules de police, le 23 octobre à Calais. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Sur ce site immense d'une dizaine d'hectares, où s'entassent entre 6.400 et 8.100 personnes selon les comptages, l'évacuation était sur toutes les lèvres, dès la matinée brumeuse et glaciale.
En début de soirée, des heurts sporadiques se sont produits entre migrants et forces de l'ordre sur la rocade portuaire et à l'intérieur du bidonville, comme cela avait été le cas la veille. Ces incidents sont relativement fréquents depuis l'ouverture du camp.
En début d'après-midi, les représentants de plusieurs services de l'État ont distribué dans les hébergements en dur du centre d'accueil provisoire (CAP) et du centre Jules-Ferry, des flyers expliquant comment se rendre au hangar d'où partiront lundi 24 octobre les premiers bus à destination des centres d'accueil et d'orientation (CAO) en France.
Les migrants recevaient également une bande dessinée détaillant leur parcours après l'arrivée en CAO.
"On leur confirme qu'il faut se tenir prêt pour demain", a indiqué Serge Szarzyncki, directeur de la cohésion sociale, en se heurtant au scepticisme de certains, comme Karhazi, un Afghan : "On le sait tout ça. Il faudra nous forcer pour partir. Nous, on veut aller en Grande-Bretagne. Pourquoi n'y a t-il rien de prévu pour les majeurs ?".
D'autres maraudes ont été organisées dans la "Jungle" elle-même par les services de l'Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) et de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). "On leur explique qu'il faut qu'ils quittent Calais comme des milliers d'autres l'ont fait avant eux, et qui à 70% ont obtenu l'asile", a expliqué Pascal Brice, directeur général de l'OFPRA.
Mohamad, un autre Afghan parti en ville, est déjà convaincu : "Je veux demander l'asile, c'est pour ça que je suis venu à Calais. À Paris il faut dormir sous les ponts. Ici, il y a des associations et ça va vite pour la demande".
La préfète du Pas-de-Calais Fabienne Buccio a également rencontré les chefs de communauté du camp dans l'après-midi.
"Une bonne partie des gens reviendront"
Le travail autour des mineurs isolés, sujet crucial, s'est aussi poursuivi : 39 ont quitté la "Jungle" pour la Grande-Bretagne dimanche 23 octobre, portant le total des transferts à 194 dans la semaine, a indiqué Pierre Henry, directeur général de France Terre d'asile. Sur ce total, "141 ont pu bénéficier de la réunification familiale et 53, des jeunes filles exclusivement, ont été transférés samedi au titre de la vulnérabilité", a-t-il détaillé.
Des membres de la Direction départementale de la cohésion sociale distribuent des informations aux migrants sur le démantèlement de la "Jungle" de Calais, le 23 octobre. |
Devant le hangar d'où partiront les migrants par autocar lundi 24 octobre, des barrières délimitent déjà les 4 files d'attente prévues pour les différents publics (hommes seuls, familles, vulnérables...).
Des voitures de la sécurité civile entraient à intervalles réguliers dans le périmètre, situé à 300 m de l'entrée la plus proche du campement, dans la zone industrielle coincée entre la ville et la rocade.
"Le gouvernement rêve qu'en détruisant, cela va régler le problème migratoire, mais c'est une erreur : une bonne partie des gens qui vont partir reviendront, sans compter qu'il y a toujours de nouveaux arrivants, environ 30 par jour", affirme pourtant François Guennoc, vice-président de l'Auberge des migrants, sceptique vis-à-vis de l'opération.
Dans un courrier adressé aux associations, le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, et la ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, ont tenté de rassurer, réaffirmant qu'une "proposition de mise à l'abri sera faite à chaque migrant" et que "si les forces de l'ordre seront naturellement présentes (...), leur mission première sera d'assurer la sécurité de tous".