Danseur au Vietnam : un métier sur la corde raide

Comment attirer davantage d’élèves vers la danse et aider les artistes à mieux vivre de ce métier ? Tels sont les défis pour les responsables de cet art au Vietnam. Entretien avec l’Artiste du Peuple Nguyên Van Quang, recteur du Collège de danse du Vietnam.

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Au Vietnam, nous parlons très souvent des difficultés de la danse, notamment de la danse classique. Quelle est votre analyse ?

Comme vous le savez, la danse est un métier pénible qui nécessite un apprentissage long et laborieux. De longues années d’études, un entraînement dur mais une carrière très courte, des rémunérations dérisoires et un statut précaire. Aujourd’hui, dans notre pays, la danse contemporaine et la danse folklorique sont préférées à la danse classique, qui est boudée du public, comme l’est d’ailleurs la musique classique. Et ces deux arts sont liés. Globalement, les Vietnamiens considèrent encore la danse comme de simples numéros pour rendre les spectacles scéniques plus vivants. Ni plus ni moins.

La pléthore de divertissements de la société actuelle fait que le public vietnamien est peu intéressé par la danse classique, malgré un nombre grandissant ces dernières années de spectacles de petite et grande envergures à travers le pays. Mais comme je le disais, le public considère toujours la danse comme un art secondaire. À Hô Chi Minh-Ville, cet art connaît légèrement plus d’animation, surtout la danse contemporaine. Mais lors de soirées, j’ai pu observer que plus de la moitié des spectateurs étaient étrangers.

Quant à la question des revenus des danseurs au Vietnam, ils sont souvent bien plus bas que d’autres artistes tels que les chanteurs ou les instrumentistes. Bien sûr, cela est lié à la désaffection du public pour cet art.

Qu’en est-il de la formation des danseurs ?

Outre le Collègue de danse du Vietnam, cet art est enseigné aussi à l’Université de la culture et des arts de l’Armée, à l’École de danse de Hô Chi Minh-Ville ou encore à l’École de la culture et des arts du Viêt Bac. La plupart des diplômés ont pu trouver un travail dans des troupes étatiques ou privées. Néanmoins, en tant que professionnel, formateur et gestionnaire, je trouve que le recrutement est un vrai casse-tête.

Au Collège de danse du Vietnam, chaque année, nous ne recevons qu’une centaine d’inscriptions pour toutes les formes de danse. De plus, les critères de sélection sont très rigoureux. Il y a des élèves qui sont techniquement bons mais leur forme physique est insuffisante, ou inversement. La recherche des garçons est encore plus problématique. Dans notre école, ils représentent au maximum le quart des élèves. Et certaines années, il n’y a aucune inscription de garçons.

Un numéro de danse folklorique du Vietnam interprété lors du Festival international de la danse 2017.
Photo : An Hiêu/VNA/CVN

Quelles solutions pour redonner à l’art de la danse ses lettres de noblesse et susciter plus de vocations ?

Via des programmes d’échanges culturels, des festivals de danse à l’étranger comme aux États-Unis ou en Russie, les danseurs vietnamiens sont reconnus pour leur talent et leurs compétences, notamment en danse folklorique. Au Festival international de la danse 2017 (tenu en septembre dernier dans la province de Ninh Binh, Nord), le Vietnam a remporté quatre médailles d’or et dix d’argent. Nous sommes fiers aussi que des danseurs formés au Vietnam soient recrutés dans des théâtres étrangers en Grande-Bretagne, en France ou en Allemagne.

Je pense qu’il faudrait avoir au moins une université spécialisée dans cet art. Car actuellement, au Vietnam, la danse n’est enseignée qu’au niveau des collèges et écoles supérieures. Il faudrait aussi permettre aux artistes de mieux vivre de ce métier, car la question de la rémunération est centrale. On ne peut espérer susciter des vocations vers un métier où l’on "vivote". La Chine est reconnue mondialement pour son art de la danse. Celle-ci y est enseignée dès le secondaire. Et les danseurs, quand ils finissent leur carrière, deviendront enseignants dans les écoles. Je pense que le Vietnam devrait s’inspirer du modèle chinois.


Le Vietnam aura l’Institut national de danse
Le vice-Premier ministre Vu Duc Dam a signé fin décembre 2017 la décision de fonder l’Institut national de danse du Vietnam sur la base du développement de l’actuel Collègue de danse du Vietnam. Établissement d’éducation universitaire public, ledit Institut sera placé sous la tutelle du ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme. Le dossier des démarches de préparatifs pour cette création est confié à ce ministère en collaboration avec celui de l’Éducation et de la Formation avant d’être présenté au gouvernement pour approbation.


Thu Hoà - Linh Thao/CVN

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