La vente aux enchères de la collection d'automobiles Baillon, 6 février à Paris. |
Cette Ferrari 250 GT California Spyder, brièvement passée dans les mains d'Alain Delon au milieu des années 1960, était estimée entre 9,5 et 12 millions d'euros. Avec les frais, l'acheteur devra débourser 16,3 millions d'euros. Son identité n'a pas été révélée, mais selon le commissaire-priseur ayant dirigé la vente, Hervé Poulain, la voiture "part à l'étranger".
La vente de 59 voitures, organisée par la maison Artcurial en marge du salon Rétromobile, a attiré des enchères bien supérieures aux estimations: parfois le triple ou le quadruple, même pour des véhicules en très mauvais état.
Ce n'était pas le cas de la Ferrari, qui contrairement à la plupart des voitures découvertes en 2014 dans une propriété de l'ouest de la France, avait été préservée des éléments dans un garage fermé.
Avant elle, une Maserati A6G Grand Sport de 1956 avait été acquise 1,72 million d'euros, alors qu'elle était estimée entre 800.000 et 1,2 million d'euros.
Roger Baillon, un transporteur de Niort (Deux-Sèvres), avait accumulé des voitures souvent uniques. Mais pendant près de 50 ans cette collection était restée sous des hangars, plus ou moins étanches, où un revers de fortune l'avait reléguée.
La Ferrari 250 GT California Spider 1961, de la collection Baillon, acquise aux enchères pour 14,2 millions d'euros, à Paris le 6 février. |
"La découverte du siècle", avait titré en septembre un magazine américain spécialisé, à la vue de ces tôles rouillées, capotes arrachées et moteurs figés. La vente elle-même a eu un "écho mondial", a souligné Me Poulain.
Au total, la collection Baillon a été dispersée pour 25,15 millions d'euros frais de vente inclus, soit deux fois l'estimation initiale, selon Me Poulain, qui a attribué cet engouement à "l'état poétique et mystique dans lequel étaient les voitures".
Dans un entretien en soirée, Me Poulain s'est déclaré "fou de joie" pour lui et son équipe après le succès de la vente, "apothéose d'une carrière" selon lui, et "récompense pour tous les efforts que j'ai faits pour qu'on comprenne que les voitures (...) sont des oeuvres d'art à part entière".
Les ventes d'Artcurial en marge de Rétromobile, qui se sont poursuivies tard vendredi soir, ont atteint au total 46 millions d'euros, selon lui.
Préemption de l'État français
Pour le volet Baillon, la rareté et l'authenticité plus que l'état des voitures semble avoir dicté l'enthousiasme des acheteurs, dans un hall du parc des Expositions de la porte de Versailles plein à craquer.
Ainsi du lot n°46, une Talbot Lago T26 Grand Sport de 1949 dont la robe avait été signée par le carrossier Saoutchik : estimée à 600.000 euros maximum, elle est partie à 1,45 million d'euros malgré son état pitoyable.
Avant elle, une autre T26 également habillée par Saoutchik et censée avoir appartenu au roi Farouk d'Égypte a quadruplé son estimation haute, partant dans une collection américaine pour 625.000 euros.
Selon Me Poulain, il faut s'attendre à voir de telles voitures apparaître d'ici quelques années, après de longues et coûteuses restaurations, dans des concours d'élégance automobiles comme celui de Pebble Beach (Californie, ouest).
Consolation pour les amoureux des voitures françaises qui se désespèreraient de voir ce patrimoine national ravi par des Américains aux comptes en banque bien garnis, l'État français a fait jouer son droit de préemption pour l'un des lots, une rare Panhard Dynamic coupé de 1936, qui devrait rejoindre un musée à Compiègne.
Avant la vente, le commissaire-priseur avait souhaité que les acheteurs s'attachent à "ranimer ces belles endormies, pour un nouveau destin".
Une tâche parfois herculéenne, à en juger par l'état de certaines d'entre elles, comme le lot n°26, une Amilcar CGSS biplace sport, incomplète et très abîmée, estimée de 3.000 à 5.000 euros, et finalement partie... à 46.000.
"Une vie entière de bonheur à la restaurer", s'était amusé Me Poulain au début de la vente.
AFP/VNA/CVN