Climat: le monde appelé à des transformations "sans précédent"

Le monde devra engager des transformations "rapides" et "sans précédent" s’il veut limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, soulignent les experts climat de l’ONU, mettant en garde contre des risques accrus au-delà de ce seuil.

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Une maison sous les eaux après le passage de l’ouragan Florence, le 20 septembre à Lumberton, en Caroline du Nord (États-Unis).
Photo: AFP/VNA/CVN

Dans un rapport de 400 pages, dont le résumé à l’intention des décideurs politiques publié récemment, le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de l’ONU expose les nombreux impacts déjà à l’œuvre, et notamment la menace d’emballement au-delà de 1,5°C de réchauffement (par rapport aux niveaux préindustriels): vagues de chaleur, extinctions d’espèces, ou déstabilisation des calottes polaires, source de montée des océans sur le long terme.

"Chaque petit accès de réchauffement supplémentaire compte, d’autant que passer 1,5°C, accroît le risque de changements profonds voire irréversibles, comme la perte de certains écosystèmes", explique Hans-Otto Pörtner, expert du GIEC qui est co-président d’une réunion autour de ce thème à Incheon en République de Corée.

Si le mercure continue de grimper au rythme actuel, sous l’effet des émissions de gaz à effet de serre, il devrait atteindre +1,5°C entre 2030 et 2052, note le rapport, basé sur plus de 6.000 études. Et si les États s’en tiennent à leurs engagements de réduction d’émissions pris dans le cadre de l’Accord de Paris en 2015, ce sera +3°C à la fin du siècle. Alors que faire, tandis que 2017 a encore vu les émissions mondiales liées à l’énergie repartir à la hausse?

Une transition rapide et de grande portée

Pour le GIEC, pour rester à 1,5°C, les émissions de CO2 devront chuter drastiquement dès avant 2030 (-45% d’ici 2030) et le monde atteindre une neutralité carbone en 2050 (autrement dit, il faudra cesser de mettre dans l’atmosphère plus de CO2 qu’on ne peut en retirer, et ne plus se permettre que des émissions résiduelles).

Villes, industries, énergie, bâtiment... tous les secteurs sont appelés à s’atteler à de "profondes réductions d’émissions": rester à 1,5°C demandera "une transition rapide et de grande portée", d’une ampleur "sans précédent". Le GIEC insiste sur l’énergie (charbon, gaz, pétrole) étant responsables des trois quarts des émissions, et propose plusieurs scénarios chiffrés incluant différentes combinaisons d’actions.

"Le rapport donne aux décideurs politiques l’information dont ils ont besoin pour prendre des décisions pour lutter contre les changements climatiques tout en considérant aussi les besoins des populations", explique la Sud-Africaine Debra Roberts, autre coprésidente de cette réunion à Incheon, pour qui ce texte est "un appel à la coordination". "Les années à venir seront les plus déterminantes de notre histoire", estime-t-elle.

"Nous ne sommes pas condamnés à 3°C!"

Pour sa collègue française, la climatologue Valérie Masson-Delmotte, également à Incheon, c’est un constat lucide et difficile: la politique des petits pas ça ne suffit pas. "Il nous dit +si on n’agit pas maintenant, on va vers un monde où on sera en permanence en gestion de crises+, dit-elle. La bonne nouvelle est qu’il y a des actions en cours dans le monde, mais il faudrait les accélérer pour avoir des transitions douces. La vraie question de la faisabilité c’est celle-là: les gens sont-ils prêts à agir, et y aura-t-il assez de volonté politique collective?"

"Nous ne sommes pas condamnés à 3°C. Nous sommes éventuellement liés par nos actions passées, mais pour l’avenir tout est possible", s’anime le climatologue Myles Allen, aussi l’universitaire britannique qui espère entendre le secteur pétrolier. L’Alliance des petits États insulaires, à la pointe du combat pour inscrire l’objectif 1,5 dans l’Accord de Paris, a appelé les nations civilisées à prendre leurs responsabilités en relevant leurs efforts pour réduire les émissions.

"Le rapport montre que nous n’avons plus qu’une occasion, des plus minces, pour éviter des dommages impensables au système climatique qui nous fait vivre", assure Amjad Abdulla, qui représente une quarantaine de nations allant des Maldives aux Bahamas en passant par Singapour éparpillées sur tous les océans. Il est convaincu que les historiens regarderont ces conclusions comme un moment clé dans l’histoire des hommes.

"Y arriverons-nous à temps? Personne ne sait, dit Kaisa Kosonen, responsable climat pour Greenpeace. Ce qui compte maintenant est que nous décidions d’essayer et que nous en fassions notre priorité. Seulement alors aurons-nous une chance de nous protéger des impacts que la science nous annonce".


AFP/VNA/CVN

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