Les résultats de leurs recherches sont publiés vendredi dans la revue américaine Cancer Research.
Chez les femmes "de nombreuses études statistiques ont déjà établi un lien, sans pour autant jamais parvenir à en expliquer la raison, entre obésité et +agressivité+ du cancer du sein", notent les chercheurs dans un communiqué.
La partie externe du sein, rappellent-ils, est essentiellement constituée de tissu graisseux, lui-même majoritairement composé d'adipocytes, qui "sont capables, outre leur activité de stockage/libération des graisses, de sécréter de nombreuses protéines". Ils ont cherché à savoir si ces protéines jouaient un rôle dans le développement des cancers du sein.
Pour ce faire, deux équipes conduites l'une par Philippe Valet (Inserm/université Paul Sabatier de Toulouse) et l'autre par Catherine Muller (CNRS/université Paul Sabatier) ont cultivé ensemble des adipocytes et des cellules tumorales mammaires.
In vitro, ils ont constaté qu'en présence des cellules tumorales les adipocytes sécrétaient davantage de protéines de l'inflammation (comme l'Interleukine 6). "Ces cellules tumorales devenaient alors plus invasives, plus capables de passer à travers des barrières et de migrer", donc plus agressives, indique Catherine Muller, qui travaille à l'Institut de pharmacologie et de biologie structurale.
Ce qui se confirme in vivo : quand les cellules tumorales préalablement cultivées avec des adipocytes sont injectées dans des souris, "ces cellules forment beaucoup plus de métastases que celles qui n'avaient pas été cultivées en présence d'adipocytes", indique Mme Muller.
"Fait majeur, ces modifications spécifiques des adipocytes ont été retrouvées dans des tumeurs humaines, confirmant l'importance de ce phénomène", soulignent les chercheurs. "Que vous soyez obèse ou pas, l'adipocyte est partie prenante de la tumeur", explique Catherine Muller. "Mais si vous êtes obèse, vous avez plus d'adipocytes, et notre hypothèse est qu'ils ne sont pas les mêmes que ceux des gens pas obèses, et qu'ils sécrètent plus de molécules inflammatoires". Ils seraient donc beaucoup plus favorables à la tumeur. "Cette hypothèse reste à vérifier, à la fois chez la souris et chez l'homme", concluent les chercheurs, qui imaginent déjà des "stratégies spécifiques" de traitement pour les patients en surpoids atteints de cancers agressifs, pour qui des anticorps anti-interleukine 6 pourraient être particulièrement efficaces. "La stratégie en fonction de votre statut pondéral n'est pas vraiment entrée dans les moeurs en cancérologie", regrette Catherine Muller.
AFP/VNA/CVN