Au Maroc, une école de jardinage allie inclusion et sensibilisation à l’écologie

Installée dans la périphérie de Salé, ville voisine de la capitale Rabat, l’école de jardinage Bouregreg Med-O-Med offre depuis 2018 une formation gratuite en trois ans, principalement ouverte à des jeunes précaires ou en décrochage scolaire.

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Des jeunes suivent un cours pratique à Bouregreg Med-O-Med, la première école de jardinage du Maroc, dans la ville côtière de Salé. 
Photo : AFP/VNA/CVN

Le pari du projet, récemment honoré par le prix européen des "compétences vertes", est triple : sensibiliser au changement climatique, favoriser l’inclusion des jeunes, particulièrement frappés par le chômage et promouvoir l’égalité des genres.

En intégrant la première école de jardinage du Maroc, qui place les questions environnementales au cœur de sa pédagogie, la jeune Hind Bensbitia a aiguisé son regard sur les changements climatiques mais aussi trouvé une perspective d’avenir.

"Après avoir arrêté l’école, j’ai passé deux ans à la maison. Je n’étais pas satisfaite, j’avais envie d’être active", raconte Hind Bensbitia, 20 ans, qui a arrêté sa scolarité au lycée.

Il y a trois ans, elle découvre par hasard ce projet de coopération maroco-espagnole, initié par l’ONG espagnole "Fondation de la culture islamique" (FUNCI).

“Avant, je n’imaginais pas faire du jardinage mon métier. Cette formation m’a beaucoup apporté, je perçois l’environnement et la nécessité de le protéger de manière différente", confie l’étudiante vêtue d’une blouse verte, frappée du logo de son école, où elle se sent "plus dans (son) élément qu’ailleurs".

Sécheresse et chômage, la double peine

L’établissement, implanté sur huit hectares près d’une décharge réhabilitée, promeut un système éco-responsable : "Le modèle de jardinage est entièrement écologique, le bâtiment est bioclimatique, conçu en terre crue, et l’électricité est d’origine solaire", explique l’Espagnole Inés Eléxpuru, coordinatrice.

Une apprentie de l’école de jardinage Bouregreg Med-O-Med, à Salé, au Maroc. 
Photo : AFP/VNA/CVN

L’école dispose d’une pépinière de plantes locales, mieux adaptées au stress hydrique, un enjeu crucial pour le Maroc qui subit sa pire sécheresse depuis près de 40 ans. Celle-ci devrait en outre s’intensifier d’ici 2050 sous l’effet d’une baisse de la pluviométrie (-11%) et d’une augmentation des températures (+1,3°C), selon des données officielles.

"À travers cette formation, je me suis rendu compte que la vie d’une plante est tributaire de notre volonté d’en prendre soin. Les gestes simples peuvent faire la différence", souligne Mohssine Errahimi, 18 ans, croisé dans les couloirs de l’école qui forme jusqu’à 90 personnes par an.

Cet étudiant a travaillé dès ses 16 ans comme apprenti jardinier dans des hôtels et chez des particuliers, dont l’un d’eux l’a poussé à s’inscrire à l’école de Bouregreg. "Après ma formation, j’espère lancer mon entreprise de jardinage pour contribuer à construire mon pays", confie-t-il.

L’insertion professionnelle des jeunes est un objectif clé car ce sont les plus touchés par les difficultés économiques au Maroc. Le taux de chômage des 15-24 ans a atteint 38,2% au troisième trimestre 2023, contre 13,5% au niveau national, selon le Haut commissariat au plan (HCP).

Freiner la migration irrégulière

Plus d’un jeune sur quatre de cette catégorie d’âge "ne travaille pas, n’est pas à l’école et ne suit aucune formation", selon une autre étude du HCP publiée en 2022.

L’école forme "des jeunes qui viennent de situations familiales compliquées (...) et de quartiers environnants vraiment précaires et difficiles", souligne Inés Eléxpuru.

Ils sont "motivés, veulent avoir une vie digne et gagner de l’argent pour eux-mêmes et pour soutenir leurs familles", ajoute-t-elle, estimant qu’ils sont 70% à trouver un travail une fois diplômés et que la formation contribue aussi à "freiner la migration irrégulière".

L’établissement compte en outre 20 à 25% des jeunes femmes, également davantage touchées par le chômage (19,8% contre 11,7% pour les hommes).

"Le métier (de jardinier) est toujours associé aux hommes. Au début c’était compliqué, avec des clients qui cherchaient à recruter uniquement des hommes mais les choses commencent à changer", rapporte Mme Eléxpuru.

"À l’extérieur, les gens te méprisent pour le choix de cette formation, car pour eux ce n’est pas adapté aux filles, raconte Hind Bensbitia. Je m’en fiche (...) j’ai le soutien de ma famille et je continuerai".

"Il y a beaucoup de stéréotypes autour des métiers que les femmes ne doivent pas faire, renchérit Loubna Nassif, jeune fille de 17 ans. Moi je dis qu’il faut qu’on leur prouve le contraire".

AFP/VNA/CVN

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