Le Maroc compte plus de 300 de ces foyers, où résident près de 16.700 jeunes filles. Plus de 70% sont implantés en milieu rural, selon les derniers chiffres officiels.
"Les critères d'admission au foyer? Ils sont simples et clairs : la pauvreté et l'éloignement. Une commission restreinte étudie les demandes et les filles sont vite sélectionnées sur la base de ces deux critères", précise Souad Arkani, la directrice du foyer.
Le pensionnat du village d'Ain Leuh accueille 35 pensionnaires, à deux pas du lycée où elles se rendent chaque jour pour étudier.
"Mes parents habitent à plusieurs dizaines de kilomètres d'ici. Mais grâce à ce foyer, je fais mes études dans de bonnes conditions puisque je suis prise en charge et le lycée est tout près", raconte Khadija, 19 ans, l'une des pensionnaires.
"Elles sont prises en charge, avec un programme précis du matin au soir : petit-déjeuner, départ au lycée qui est près du foyer, déjeuner à midi trente, dîner vers 19h30, étude et, enfin, extinction des lumières à 22h00", explique Souad Arkani, la directrice du foyer.
Le pensionnat est financé et géré conjointement par le ministère du Développement social et une ONG locale, l'Association islamique de bienfaisance (AIB).
Ain Leuh est situé dans la province d'Ifrane, à 300 km à l'Est de Rabat, au cœur de montagnes couvertes de cèdres où il neige souvent l'hiver.
"À partir de novembre il commence à faire très froid ici. Les filles restent toute la semaine au foyer, mais elles peuvent passer le week-end chez leurs parents ou famille proche", ajoute Mme Arkani.
Pour voir ses parents, Khadija doit d'abord prendre un "grand taxi" (taxi collectif) qui parcourt des dizaines de kilomètres. Ensuite, il lui faut marcher au moins une heure sur une piste pour arriver enfin chez elle.
Un an après le début de son règne, en 1999, le roi Mohamed VI a encouragé ces pensionnats pour filles ou pour garçons pour remédier au manque d'infrastructures dont souffrent les régions rurales.
Mais selon les responsables du foyer d'Ain Leuh inauguré en 2003 par Mohammed VI "les moyens restent limités et tout soutien est le bienvenu". "Les collectivités locales, le ministère (du développement social) et notre association participent au financement, mais il faut se battre pour équilibrer notre budget", dit Mohamed Bouyamlal, le vice-président de l'AIB. "Nous devons faire des choix parfois sévères, en optant pour le strict nécessaire, c'est-à-dire la nourriture", précise-t-il.
Et la directrice ne gagne que 1.200 dirhams par mois (110 euros), soit un peu moins que le salaire minimum (125 euros).
Mais par delà les difficultés, les résultats sont probants. Le taux d'analphabétisme en milieu rural, chez les femmes, est passé de 64% en 2006 à environ 40% en 2011, selon les chiffres officiels.
Et le taux d'abandon scolaire chez les jeunes filles des campagnes est passé de 14% en 2006 à 10% en 2010, grâce à ce programme. L'école est obligatoire au Maroc jusqu'à 15 ans.
Outre les études, le foyer d'Ain Leuh est aussi un lieu de rencontres, "d'échanges et d'ouverture d'esprit".
"Lorsque je suis arrivée de ma campagne reculée, j'étais très timide. Le foyer m'a permis une plus grande ouverture et je me suis rendue compte de mon autonomie et mon indépendance", dit Souad, une autre pensionnaire. "J'ai des ambitions et je vois mon avenir autrement. Je veux être professeur de mathématiques", conclut-elle avec fierté.
AFP/VNA/CVN