Au bazar de Téhéran, une vie à célébrer les crayons de couleurs

À l’heure du tout-numérique, en Iran comme ailleurs, Mohammad Rafi fait de la résistance en défendant avec passion le crayon de couleur, l’unique produit qu’il vend dans le grand bazar de Téhéran depuis 35 ans.

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Crayons de couleurs dans le magasin de Mohammad Rafi, dans le grand bazar de Téhéran. 
Photo : AFP/VNA/CVN

Ni feutres ni stylos ni pinceaux. Rien que des crayons de couleur, mais par milliers, qui recouvrent, du sol au plafond, les murs de la boutique.

“Je ne sais pas combien il y en a, mais j’ai environ 200 nuances de couleur disponibles”, annonce fièrement Mohammad Rafi, le commerçant quinquagénaire.

L’échoppe “Medad Rafi” (“les crayons de Rafi”, en persan) est tellement atypique et photogénique qu’elle est devenue l’une des attractions du grand bazar de Téhéran.

Mais il faut la dénicher. Un véritable jeu de piste dans le dédale des allées grouillantes de cette “ville dans la ville” au cœur de la capitale iranienne.

Située au milieu d’un passage étroit et mal éclairé, la boutique est minuscule. Environ 3 m² mais cela suffit à Mohammad Rafi qui occupe l’essentiel de l’espace, accueillant le client derrière le comptoir.

D’un abord avenant, le vendeur de crayons fait rarement grise mine. “Chaque fois que des clients se présentent, je me régale, même s’ils n’achètent rien”, sourit-il.

Âge d’or révolu

Ce matin-là, il accorde ainsi une dizaine de minutes à une écolière en quête de quelques crayons, dont un bleu et un orange. Mohammad Rafi lui présente une sélection d’une dizaine de crayons de chaque couleur, qu’elle essaie sur un bloc de dessin posé sur le comptoir.

Mohammad Rafi, un vendeur de crayons de couleurs dans son magasin, dans le grand bazar de Téhéran. 
Photo : AFP/VNA/CVN

“Suivant ce qu’il veut en faire, je conseille le client sur la couleur, la texture ou la marque”, explique le commerçant, qui ne vend les crayons qu’à l’unité, jamais rangés dans une boîte.

Il s’adapte aussi à toutes les bourses, de nombreux dessinateurs amateurs n’étant pas fortunés. “Il y a tous les prix. Le crayon le plus cher coûte 100.000 tomans (environ 2 euros) mais c’est l’un des meilleurs”. Ces derniers viennent souvent de fabricants étrangers, notamment européens ou américains.

Bien sûr, Mohammad Rafi a conscience que le crayon de couleur a connu son âge d’or, qui remonte au siècle dernier, lorsque tous les enfants en possédaient dans leur trousse.

Après avoir suivi des études de technicien dans les années 1980, l’Iranien a débuté sa vie professionnelle dans une entreprise de fabrication de crayons. Amateur de dessin depuis l’enfance, il se prend de passion pour ce produit basique, à la fois pratique et artistique. Et décide d’ouvrir, quelques années plus tard, une boutique spécialisée dans le quartier du bazar dévolu aux arts, avec pour voisin, un marchand qui se dédie, lui, à la calligraphie, très appréciée en Iran.

Et 35 ans après, le quinquagénaire dit “ne pas être inquiet” pour ses prochaines années alors que l’âge de la retraite approche. Mais, contrairement à la tradition du bazar, où les enseignes restent souvent dans la famille, il sait que son fils, médecin, “n’est pas intéressé par ce travail”.

En attendant, Mohammad Rafi veut continuer à satisfaire la diversité des demandes de sa clientèle même si “certains crayons ne sont plus produits”. “Heureusement, j’ai emmagasiné un stock conséquent” au fil des ans, indique-t-il, en brandissant son plus vieux crayon, “fabriqué il y a 72 ans”.

AFP/VNA/CVN

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