Le conseil d'administration de l'institution lui maintiendra-t-il sa confiance comme il l'a fait jusqu'ici? Mme Lagarde est catégorique : elle ne démissionne pas et "retourne travailler à Washington dès cet après-midi". Elle "informera, évidemment, le conseil d'administration (du FMI) dès que possible", a indiqué l'institution internationale, qui n'a "pas de commentaire supplémentaire" à faire. Même retenue à Paris, où le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll juge que la question du maintien à son poste "incombe au FMI".
Christine Lagarde dans le bureau de son avocat à Paris, le 27 août, peu après l'annonce de sa mise en examen pour "négligence" dans l'affaire de l'arbitrage Tapie |
Jugeant sa mise en examen "totalement infondée", l'ancienne ministre de l'Économie a également annoncé de prochains recours contre cette décision. C'était la quatrième fois, mardi 26 août, que Christine Lagarde était entendue à Paris par les magistrats de la Cour de justice de la république (CJR), instance habilitée à enquêter sur les membres du gouvernement pour les faits commis dans l'exercice de leur fonction.
Les enquêteurs avaient choisi en mai 2013 de la placer sous le statut intermédiaire de témoin assisté. Lors d'une audition qui a duré une quinzaine d'heures mardi 26 août, ils l'ont finalement mise en examen, ce qui implique qu'elle pourrait être renvoyée en procès à la fin de l'instruction.
Si elle est passible en cas de condamnation d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende, la qualification de "négligence" retenue contre la patronne du FMI est cependant moins lourde que celle retenue dans le volet non ministériel contre d'autres protagonistes du dossier.
Cinq personnes, dont M. Tapie ou encore l'ancien directeur de cabinet de Mme Lagarde à Bercy, Stéphane Richard, ont été mises en examen pour "escroquerie en bande organisée".
"Pas suffisamment vigilante"
L'affaire porte sur la sentence arbitrale de 2008 ayant octroyé 403 millions d'euros à Bernard Tapie -dont 45 millions d'euros au titre du préjudice moral- pour clore le vieux litige qui opposait l'homme d'affaires au Crédit Lyonnais sur la revente d'Adidas.
Les juges d'instruction soupçonnent cette sentence d'être le fruit d'un "simulacre" d'arbitrage organisé avec l'aval du pouvoir de l'époque. Sont notamment en cause les liens qui existaient entre un des trois juges arbitres, Pierre Estoup, et le camp Tapie.
"La commission d'instruction de la CJR a décidé ma mise en examen sur le fondement d'une simple négligence", a dit mercredi 27 août Mme Lagarde au cabinet de son avocat, Me Yves Repiquet.
"Après trois années d'instruction, des dizaines d'heures d'audition, la commission s'est rendue à l'évidence que je n'avais été complice d'aucune infraction et a donc été réduite à alléguer que je n'aurais pas été suffisamment vigilante lors de l'arbitrage opposant la société CDR au liquidateur du groupe et des époux Tapie", a-t-elle ajouté. Il est notamment reproché à l'ancienne ministre de ne pas avoir formellement contesté l'arbitrage une fois qu'il a été rendu, a précisé son entourage.
"J'ai demandé à mon avocat d'exercer tous les recours" contre cette mise en examen "que je considère comme totalement infondée", a annoncé Mme Lagarde, qui avait succédé en 2011 à la tête du FMI à Dominique Strauss-Kahn, emporté par un scandale sexuel.
Dans le cadre de poursuites à la CJR, un mis en examen peut déposer des recours en nullité directement auprès de cette instance, et saisir ensuite la Cour de cassation s'ils sont rejetés. Selon Me Repiquet, les magistrats de la CJR ont bouclé leur enquête. L'instruction en parallèle du volet non ministériel, dans le cadre duquel l'ancien secrétaire général de l'Élysée Claude Guéant avait été placé en garde à vue, se poursuit.
AFP/VNA/CVN