Les conservateurs CDU/CSU de Mme Merkel ont certes recueilli un spectaculaire 41,5% des suffrages lors des législatives du 22 septembre, ce qui leur a fait rater de peu la majorité absolue, mais leur allié dans la coalition sortante, le Parti libéral (FDP), n'a pas atteint la barre des 5% permettant d'être représenté au Bundestag. Il leur faut donc trouver un nouveau partenaire: les Verts, affaiblis après un score décevant d'un peu plus de 8%, ou le Parti social-démocrate (SPD, 25,7%). Ce dernier cas de figure, dit "grande coalition", fut le schéma du premier gouvernement Merkel (2005-2009).
La chancelière allemande Angela Merkel entament le 10 octobre avec les Verts des discussions en vue d'une éventuelle alliance gouvernementale |
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"Nous mèneront toutes les négociations sérieusement", a assuré le 8 octobre la chancelière devant le groupe parlementaire CDU/CSU, en évoquant le premier contact à venir avec les Verts. Une très large majorité des Allemands s'attend à voir des négociations déboucher sur une coalition CDU/CSU-SPD (79%) et près de la moitié (46%) la souhaite, alors que ces chiffres sont respectivement de 9% et 22% concernant les Verts, selon un sondage diffusé le 8 octobre par la télévision d'information en continu N24.
"Les chances de voir une coalition avec les Verts sont passées ces derniers jours de +théoriques+ à +envisageables+", a déclaré il y a peu dans l'hebdomadaire Der Spiegel le ministre sortant de l'Écologie, le conservateur Peter Altmaier. Mais même si la fin programmée du nucléaire en Allemagne, décidée par Angela Merkel en mars 2011, a levé la plus grosse hypothèque sur les relations entre les deux partis, sur de nombreuses questions, notamment de société, les positions semblent très difficilement conciliables.
La CDU affiche "des positions très divergentes des nôtres sur la politique de lutte contre le réchauffement climatique ou (la volonté d'une) société ouverte", a énuméré le 9 octobre, lors d'une conférence de presse, Katrin Göring-Eckardt, tête de liste des écologistes lors des législatives, fraîchement élue co-dirigeante du groupe parlementaire, et l'une des huit membres de la délégation qui rencontrait les conservateurs. Elle a également cité la politique familiale et l'Éducation comme deux thèmes où les positions seront difficiles à rapprocher.
La chancelière allemande, Angela Merkel, lors d'une conférence de presse |
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Les Verts sont notamment catégoriquement opposés à la prime aux mères au foyer récemment créée sous l'impulsion de la CSU - frange bavaroise et conservatrice de la CDU. Mais "pour la CDU, l'intérêt (d'une telle alliance) est évident: gouverner avec des Verts à 8% sera bien plus agréable qu'avec un SDP à 26%", écrivait un éditorialiste sur le site internet de Der Spiegel.
Entretenir l'hypothèse d'un accord possible avec les Verts permet aussi à la CDU de maintenir la pression sur le SPD et l'empêcher de se montrer trop gourmand dans d'éventuelles négociations. CDU et SPD ont déjà entamé des discussions exploratoires le 4 octobre, qui doivent se poursuivre le 14 octobre. Si elles débouchaient sur de vraies négociations aucun résultat n'est attendu avant plusieurs semaines. En outre un éventuel pacte devrait être avalisé par les adhérents SPD, majoritairement hostiles à une "grande coalition", selon les sondages.
Les Verts représentent donc aussi, pour Mme Merkel, une éventuelle solution de rechange. Les Verts ont déjà été aux affaires, gouvernant avec le SPD de 1998 à 2005, et ces anciens anti-militaristes ont alors envoyé la Bundeswehr en Afghanistan.
Mais pour Jakob Augstein, un des éditorialistes vedette en Allemagne, les discussions du 10 octobre peuvent "conduire à un accord totalement différent" de tout ce qui s'est jamais vu en politique allemande, qui signifierait que "les enfants perdu dans le tourbillon de 1968 rentrent dans le giron bourgeois". "Ce serait un évènement de propositions historiques", assurait-il. "Et la fin des Verts".
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