Après une vie passée à rafler tout ce qu’il était possible de gagner à la tête des Diables rouges, l’Ecossais de 71 ans aux colères homériques aurait pu choisir de disparaître peu à peu de la scène après l’annonce de son départ le 8 mai.
Alex Ferguson (centre) vient au match, les commente et quand on ne lui demande pas son avis, il le donne quand même. |
L’Angleterre, qui l’a fait Sir Alex en 1999 après un triplé retentissant championnat-Ligue des champions-Coupe d’Angleterre, aurait assurément continué d’encenser cet ancien ouvrier anonyme de Glasgow devenu avant-centre laborieux avant de toucher le graal comme meneur d’hommes.
Les livres auraient continué de brosser une histoire ciselée par sa personnalité hors normes autant que par sa réussite sportive à la tête des Cantona, Cristiano Ronaldo et avant eux Bryan Robson et Mark Hughes.
Fan des tyrans et dictateurs
Et Alexander Chapman Ferguson, fasciné par les tyrans et dictateurs de tout poil, aurait eu tout le loisir de chercher à résoudre l’énigme de l’assassinat de JFK ou respirer l’odeur des champs de courses tout en s’enivrant de bon vin, ses autres passions en dehors du ballon rond, sans que sa cote personnelle en souffre.
Les consultants et analystes de tous bords auraient distillé leurs anecdotes, raconté son règne à Old Trafford et ces 1.500 matches passés sur le banc à aboyer sur tout ce qui bouge : joueurs, adversaires, arbitres, officiels.
Ils auraient entretenu la flamme de ces 37 trophées soulevés, dont 13 titres de champion d’Angleterre et 2 Ligues des champions.
On se serait souvenu de la vraie annonce de son faux-départ en 2001 après une brouille avec ses dirigeants et de la 2e jeunesse de cet homme de gauche après le rachat du club par les frères Glazer, des capitalistes Américains qui l’ont contraint à devenir un chercheur d’or plus qu’un orfèvre.
On aurait cherché comme une relique la chaussure envoyée en 2003 à la figure de David Beckham, tel un père s’estimant trahi par l’un de ses fils.
On aurait ressuscité ses bons mots aigres-doux à l’attention de José Mourinho et Arsène Wenger, ses grands rivaux des dernières années souvent victimes impuissantes du «Fergie Time», ces buts de dernières minutes de ManU.
Célèbre «effet sèche-cheveux»
Ferguson a profité de sa retraite pour écrire des mémoires abrasives |
On aurait repensé avec affection à ces joueurs qui sortaient du vestiaire les cheveux dressés sur la tête après avoir subi «l’effet sèche-cheveux» d’un entraîneur aux colères mémorables, et aux malheureux journalistes de la BBC, boycottée pendant sept ans pour avoir osé critiquer l’un de ses fils devenu agent.
Mais Sir Alex, fidèle à lui-même, n’a laissé à personne d’autre le soin de capitaliser sur son nom.
Membre du board et ambassadeur de ManU, Ferguson, soutien envahissant de son remplaçant David Moyes, qu’il a lui-même choisi mais dont les débuts sont laborieux, continue de hanter les couloirs de Carrington, comme à la belle époque.
Il vient au match, les commente et quand on ne lui demande pas son avis, il le donne quand même.
Déjà statufié à la porte d’Old Trafford, il bénéficie même depuis l’automne d’une rue à son nom aux abords du stade. Surtout, Ferguson a profité de sa retraite pour écrire des mémoires abrasives, régler quelques comptes et délivrer son évangile lors de la sortie savamment orchestrée d’une 2e autobiographie, après celle de 1999, sobrement intitulée : «My Autobiography».
Pêle-mêle, Ferguson y dessoude entre autres son ancien buteur Wayne Rooney, son ancien capitaine Roy Keane et se moque de cette fédération anglaise qui a tenté par deux fois de le nommer à la tête de l’équipe nationale.
«Pour rien au monde je ne me serais assis sur cette planche à clous», écrit-il. Assurément, en 2014 encore, le foot anglais n’oubliera pas «Sir Alex».
AFP/VNA/CVN