Lors d'une rencontre à Bruxelles avec le commissaire européen en charge de la Santé, John Dalli, le ministre français de la Santé, Xavier Bertrand, a notamment réclamé que les États puissent procéder "plus rapidement et plus facilement à des retraits de médicaments".
De son côté, John Dalli a annoncé avoir demandé à ses services "d'utiliser l'incident du Médiator comme un +stress test+ des nouvelles règles" décidées par l'UE en matière de pharmacovigilance.
Mettre la nouvelle loi européenne adoptée l'an dernier à l'épreuve de l'affaire du Médiator permettra de déceler "s'il y a toujours de la marge pour un resserrement supplémentaire des contrôles", a-t-il précisé.
Les résultats seront présentés et discutés lors d'une réunion informelle des ministres de la Santé début avril près de Budapest, a précisé M. Dalli, tout en promettant d'apporter "tout le soutien possible" aux propositions françaises et d'analyser "toute les implications qu'elles pourraient avoir".
M. Bertrand souhaite notamment que les États puissent "inverser la règle actuelle" concernant les autorisations de mise sur le marché, consistant à comparer systématiquement les nouveaux médicaments par rapport à des médicaments de référence existants et non par rapport à un placebo, comme c'est aujourd'hui le cas.
Aujourd'hui, les laboratoires ont simplement besoin de démontrer que leur produit est meilleur qu'un placebo pour se voir délivrer une autorisation.
Par ailleurs, la France souhaite imposer aux laboratoires qui décident de retirer d'eux-mêmes un médicament l'obligation de saisir les autorités européennes dans tous les cas, et pas uniquement, comme aujourd'hui, lorsque des raisons de sécurité sont invoquées.
Le laboratoire Servier avait en effet retiré de lui-même le Médiator pour des raisons commerciales en Espagne en 2003 sans avoir à avertir les autorités européennes.
Enfin, Paris souhaite plus de "transparence sur la question des déclarations d'intérêt et des conflits d'intérêts potentiels", et en particulier "sur les liens entre l'industrie pharmaceutique et l'ensemble des acteurs de santé", a précisé M. Bertrand.
Pour M. Bertrand, "ce sujet n'est pas franco-français". Et de rappeler que le professeur Jean-Michel Alexandre, ancien directeur de l'évaluation de l'Agence française de sécurité sanitaire (AFSSAPS) épinglé dans un récent rapport de l'Inspection générale des affaires sociales sur le Médiator, "a aussi été à la tête du CHMP (Comité pour produits médicinaux à usage humain) à l'Agence européenne du Médicament".
En France, des informations judiciaires contre X ont été ouvertes pour "tromperie aggravée" et "homicides involontaires" dans l'affaire du Mediator.
Le Mediator a été retiré du marché français en novembre 2009 en raison des risques cardiaques encourus par les patients. Destiné aux diabétiques en surpoids, mais largement prescrit comme coupe-faim, il a causé 500 à 2.000 décès, selon plusieurs études. Cinq millions de malades l'ont utilisé entre 1976 et 2009.
Le produit a été retiré du marché en Espagne en 2003, en Italie en 2004 et dès 1979 en Suisse à l'initiative de l'agence helvétique des médicaments. Sa commercialisation avait été refusée en 1977 en Belgique.
AFP/VNA/CVN