Acropole d'Athènes :la crise n'arrête pas les travaux

Le petit temple d'Athéna Nike a pris des airs de jeu de Lego, des blocs de marbre neuf et scintillant s'imbriquent désormais parfaitement dans ceux que les siècles ont patinés. Dénudé de ses échafaudages, son élégance éblouit le visiteur sur le bleu intense du ciel d'Athènes.

À l'entrée de l'Acropole, le site le plus visité de Grèce, les touristes du monde entier arrivent en grappe comme chaque matin.

Tout près des Propylées, l'entrée monumentale du "Rocher sacré", un ouvrier s'affaire avec un marteau piqueur sur un plot de béton armé. Les guides lui demandent d'arrêter l'engin car son bruit couvre leurs voix.

"On a décidé d'enlever le béton qui retenait les échafaudages en janvier-février, car il y a moins de touristes. Ce n'est pas facile pour ceux qui viennent, mais on n'a pas le choix", s'excuse presque Maria Ioannidou, chef du chantier de restauration de l'Acropole.

Après une prolifique décennie de travaux, qui a permis en septembre le dévoilement de l'Athéna Nike, couvert d'échafaudages pendant neuf ans, Mme Ioannidou supervise depuis janvier le démarrage d'une nouvelle phase de chantier sur l'Acropole. D'un budget de près de 12 millions d'euros, elle devrait durer au moins trois ans, financée à 80% par l'Union européenne.

Malgré la crise qui frappe la Grèce, ni l'État grec ni l'Europe ne réduisent les fonds destinés aux restaurations. "C'est un symbole, non seulement pour la Grèce, mais pour toute l'Europe, c'est un monument qui consacre la civilisation occidentale", dit Mme Ioannidou.

"Nos salaires, comme ceux de tout le monde en Grèce, ont baissé, mais travailler ici est un privilège et nous devons conserver notre enthousiasme", ajoute cet ingénieur civil, qui a consacré 35 ans de sa vie à ce chantier démarré en 1975.

Dans les semaines à venir, le ministère grec de la Culture doit recruter une cinquantaine d'archéologues, architectes, tailleurs de pierre ou autres spécialistes, ce qui portera le nombre de salariés du chantier à 200, dit-elle.

Constantin Karanassos, architecte italien qui travaille depuis dix ans sur l'Acropole, continue d'être émerveillé par les méthodes de construction utilisées pour bâtir les colonnes faussement rectilignes du Parthénon : "Les Grecs anciens avaient fait tous les calculs de tête ou à la main pour des +corrections optiques+ qu'aujourd'hui on calculerait à l'ordinateur".

Les architectes contemporains "ont encore beaucoup à apprendre de la perfection de cette construction", selon lui.

Aujourd'hui, les restaurations consistent surtout à réparer les outrages commis par l'homme au cours des siècles : transformations malheureuses en église ou en mosquée, bombardements vénitiens, démolitions turques, incendies, et surtout travaux mal réalisés au début du XXe siècle.

Alors que les Grecs anciens avaient pris soin d'enrober de plomb les pièces en fer reliant les blocs de marbre, l'utilisation de fer ordinaire par les restaurateurs d'alors a généré des "problèmes de corrosion" de la pierre en rouillant, explique Anthi Xatzipapa, une conservatrice, occupée à nettoyer une pierre posée sur un établi en plein air.

Archéologues et ingénieurs font largement appel aux nouvelles technologies. Les joints en titane ont remplacé le fer sur le toit des Propylées.

Les dégâts causés par la pollution conduisent à remplacer des sculptures originales par des reproductions. Les célèbres Caryatides sont parties les premières, suivies par les frises de l'Athena Nike, exposées à l'abri des pluies acides, dans le nouveau musée de l'Acropole.

Six métopes (grandes plaques sculptées, NDR) au sommet de la façade ouest du Parthénon vont aussi être remplacées par des copies.

"Nous ne voulons pas tricher, c'est pour cela que nous utilisons du marbre neuf et brillant, pour que chacun puisse voir ce qui est d'origine et ce qui ne l'est pas".

"Notre méthodologie est reconnue dans le monde entier désormais, en Italie, en Grande-Bretagne", dit Mme Ioannidou. "En Corée, ils suivent notre méthode pour des pagodes en pierre".

AFP/VNA/CVN

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