Accidents professionnels: les jeunes en première ligne

Au Vietnam, la probabilité d’avoir un accident du travail augmente considérablement pour les jeunes de 15 à 24 ans. Le coût est lourd, humainement d’abord avec des centaines de morts chaque année, mais aussi sur les plans économique et social.

Les jeunes de 15 à 24 ans sont les plus exposés au risque d’accident du travail.
Photo: Phuong Nga/CVN

Des chiffres qui font froid dans le dos. En 2017, le pays a recensé près de 9.000 accidents du travail pour un total de 928 morts, occasionnant des pertes économiques s’élevant à 1.500 milliards de dôngs. C’est ce que vient d’indiquer un récent rapport du Département de la sécurité au travail (relevant du ministère du Travail, des Invalides de guerre et des Affaires sociales).

Ce dernier tire la sonnette d’alarme devant l’augmentation du nombre d’accidents du travail ainsi que de leur niveau de gravité. Dans la période 1995-2005, environ 2.600 accidents en ont été recensés dans le pays, qui ont fait 260 morts. Sur la période 2006-2016, ces chiffres se sont élevés, respectivement, à 6.000 et 600, soit une moyenne de 50 morts par mois. Les pertes économiques sont estimées à 200 milliards de dôngs par an.

Des règles de sécurité peu appliquées

Des maçons travaillent sans équipements de sécurité.
Photo : Quang Hai/VNA/CVN

Cependant, les chiffres réels sont certainement plus élevés que ceux précisés dans ce rapport. "Le nombre réel de morts et de blessés est de deux à trois fois plus élevé que les chiffres mentionnés dans ce rapport. Car beaucoup d’entreprises cachent la vérité, en négociant avec la famille de la victime, pour éviter une déclaration qui mettrait en lumière leurs graves négligences de sécurité", a dévoilé Nguyên Anh Tho, chef adjoint du Département de la sécurité au travail.

C’est un fait, beaucoup d’entreprises portent peu d’intérêt aux règles de sécurité. Selon le chef adjoint du Bureau des relations travailleuses relevant de la Confédération générale du travail du Vietnam, Lê Dinh Quang, les jeunes de 15 à 24 ans sont les plus exposés au risque d’accident. Concrètement, le nombre de travailleurs de cette tranche d’âge touchés est 40% plus élevé que celui de travailleurs de plus de 24 ans.

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En 2017, le pays a recensé près de 9.000 accidents du travail
pour un total de 928 morts, occasionnant des pertes
de 1.500 milliards de dôngs.

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Ce phénomène peut s’expliquer par leur manque d’expérience mais aussi par le fait qu’ils sont prêts à tout pour garder leur poste, y compris, parfois, à mettre leur santé en danger. Ils ne le font pas forcément sciemment. Les jeunes ont aussi souvent un sentiment d’invulnérabilité qui fait qu’ils se sentent peu concernés par les accidents ou la maladie. Mais ils ne peuvent pas anticiper ou prévenir les risques sans connaître l’environnement de travail et le processus de production qui règnent dans l’entreprise. Au fond, c’est moins l’âge qui fait le risque que l’inexpérience.

Ces maçons portent peu d’intérêt aux règles de sécurité au travail.
Photo: Phuong Nga/CVN

Le chef du Département de la sécurité au travail, Hà Tât Thang, abonde dans ce sens. "La principale raison des accidents chez les jeunes travailleurs est leurs connaissances limitées sur les risques professionnels et leur manque de compétences lors des négociations du contrat de travail, les conduisant souvent à assumer des tâches dangereuses sans protection adéquate", a-t-il souligné dans un colloque intitulé "Pour un monde sûr et sain: améliorer la sécurité et l’hygiène au travail pour les jeunes travailleurs" tenu mi-avril à Hanoï.

Organisé par le Département de la sécurité au travail et l’Organisation internationale du travail (OIT), cet événement était également une activité significative faisant écho à la Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail (28 avril) et au Mois d’action pour la sécurité et l’hygiène au travail 2018 (mois de mai).

Des lacunes juridiques

Miranda Kwong, représentante du Bureau de l’OIT au Vietnam, a fait savoir qu’il y avait dans le monde 541 millions de jeunes travailleurs (âgés de 15 à 24 ans), représentant plus de 15% de la main-d’œuvre mondiale. Trente-sept millions d’entre eux travaillent dans des milieux dangereux. Pour assurer leur sécurité, il est nécessaire de commencer par l’éducation et la formation professionnelle au sein de la famille et de la communauté. Les employeurs doivent aussi reconnaître les dangers qu’ils font courir à la jeunesse.

Les hommes sont plus touchés par les accidents du travail que les femmes.
Photo: Phuong Nga/CVN

Face à la situation compliquée des violations de la sécurité du travail, le vice-ministre du Travail, des Invalides de guerre et des Affaires sociales, Lê Tân Dung, a demandé au Département de la sécurité au travail d’inspecter les organisations chargées de la formation et du contrôle de la sécurité et de l’hygiène au travail. Il faut faire en sorte que les entreprises ne puissent plus se soustraire au respect des règles en la matière.

En 2017, le Département de la sécurité au travail, en collaboration avec le ministère du Travail, des Invalides de guerre et des Affaires sociales, a inspecté plus de 40 établissements de formation en la matière. Il s’est également coordonné avec les Services du travail, des invalides de guerre et des affaires sociales dans le contrôle de 30 entreprises et d’une vingtaine d’organismes d’expertise. Il a ensuite retiré 78 résultats d’inspection technique de sécurité.

Cependant, il reste beaucoup de choses à faire pour mettre fin aux violations. L’inspection et le dépistage des infractions des entreprises rencontrent toujours des difficultés. Une des raisons principales est que l’équipe d’inspection doit avertir préalablement l’entreprise. "C’est une lacune juridique qui permet à l’entreprise de dissimuler les informations compromettantes", a déploré Nguyên Anh Tho.

Il n’a pas caché sa préoccupation sur le fait qu’à l’heure actuelle, les inspections se déroulent principalement dans les entreprises du secteur formel, alors que le secteur informel compte plus de 26 millions de travailleurs.

Il a souligné la nécessité d’une participation de toute la société, d’une coordination entre les secteurs et échelons, d’une sensibilisation des travailleurs pour les pousser à revendiquer leur droit, d’un renforcement de l’application des sciences et technologies en la matière.

Phuong Nga/CVN

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