271 œuvres Picasso : l'ex-électricien et sa femme condamnés en appel

Ils avaient entreposé 271 œuvres de Picasso durant 40 ans dans leur garage : l'ex-électricien de l'artiste Pierre Le Guennec et son épouse ont été condamnés le 16 décembre en appel à deux ans de prison avec sursis pour recel.

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Pierre Le Guennec et sa femme Danielle avaient changé de version lors de l'appel, avançant que c'était la veuve de Picasso qui leur avait donné les œuvres.
Photo : AFP/VNA/CVN

L'arrêt de la cour d'appel confirme "en toutes ses dispositions civiles et pénales" le jugement rendu en première instance par le tribunal de Grasse (Alpes-Maritimes) en 2015, qui avait également décidé de remettre les œuvres au fils de l'artiste, Claude Ruiz-Picasso, représentant les six héritiers au procès.

"C'est très décevant, ils étaient démoralisés car ils sont innocents", a réagi auprès de l'AFP Antoine Vey, un des avocats du couple, annonçant que le couple devrait, "à 99,9%", se pourvoir en cassation "pour ne pas baisser les bras".

Les œuvres, non signées ni inventoriées au moment du décès du peintre en 1973, avaient refait surface lorsque Le Guennec s'était présenté à Claude Picasso afin d'en faire authentifier 180 ainsi qu'un carnet de 91 dessins. Les héritiers avaient aussitôt porté plainte.

Parmi les œuvres se trouvent quelques pépites : des dessins stylisés de femmes et de chevaux, neuf collages cubistes très rares de l'époque de sa collaboration avec Georges Braque, une étude de la "période bleue" ou encore des œuvres plus intimes comme des études de sa maîtresse Fernande, des dessins de sa première femme Olga ou un petit cheval découpé réalisé pour ses enfants. Aucune œuvre n'est signée ou dédicacée, une façon pour l'artiste de se protéger des vols dans ses ateliers.

"Après six ans de procédure, où nous avons eu face à nous une défense complètement acharnée avec cinq avocats, des centaines et des centaines de pages de conclusions et de mémoires, on ne peut qu'être satisfait que la vérité que nous affirmons dès le départ ait été reconnue", s'est réjoui Me Jean-Jacques Neuer, avocat de Claude Ruiz-Picasso et seul représentant des parties civiles présent à l'audience en appel.

Après avoir soutenu, lors du procès en première instance, que les 271 œuvres, datées de 1900 à 1932, étaient un cadeau offert en 1971 ou 1972 par l'artiste pour qui l'électricien avait travaillé entre 1970 et 1973, en remerciement de son dévouement, Pierre Le Guennec avait changé de version devant la cour d'appel.

"Mensonge hallucinant"

L'ex-électricien de Picasso et son épouse ont été condamnés en appel à deux ans de prison avec sursis.

À la barre, la voix tremblante et l'expression maladroite, il avait affirmé qu'il s'agissait d'un don de Jacqueline, la veuve du maître, après la mort de Picasso. Quelques mois après le décès du peintre, "elle m'a demandé de bien vouloir mettre chez moi en réserve des sacs poubelle", avait-il assuré. Selon lui, il y en avait entre 15 et 17. Plus tard, elle lui aurait demandé de les lui rendre, sauf un pour lequel elle aurait dit "Gardez-le, c'est pour vous", avait déclaré Le Guennec.

Il s'agissait "peut-être" de faire échapper ces sacs à l'inventaire de succession, avait-il poursuivi, affirmant ne pas avoir dit la vérité plus tôt par "peur qu'on m'accuse ainsi que madame d'avoir volé ces sacs".

L'avocat général n'avait pas cru la nouvelle version du couple et demandé la confirmation des peines de première instance. "Je pense que c'est une soustraction à un Pablo Picasso vieillissant et à Jacqueline, plus que jamais focalisée sur son mari", avait estimé Christophe Raffin. "On peut se demander si ce qu'on nous a présenté comme vérité aujourd'hui n'est pas encore un mensonge", avait lancé l'avocat général.

Éric Dupond-Moretti, avocat des prévenus, avait affirmé avoir obtenu "difficilement" cette version de son client quelques jours auparavant et avoir "la certitude que Jacqueline (avait) caché un certain nombre d’œuvres, pas pour faire du recel". Il avait demandé un complément d'information pour "vérifier si d'autres œuvres (avaient) pu être mises de côté par Jacqueline Picasso, pas forcément à des fins marchandes", une demande rejetée par la cour d'appel.

Pour les parties civiles, Me Neuer avait quant à lui dénoncé un "mensonge hallucinant", affirmant que cette affaire touchait aux "aspects les plus noirs et puissants du marché de l'art" et soutenant la thèse d'un "blanchiment international d’œuvres volées".

AFP/VNA/CVN

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