Éveiller la passion pour la recherche scientifique

L'Union des mathématiques internationale (UMI) a décerné le 19 août à Hyderabad, en Inde, l'une des 4 médailles Fields 2010 au professeur vietnamien Ngô Bao Châu. Cet événement est un important facteur pour stimuler les sciences comme la recherche scientifique parmi les jeunes mathématiciens, a estimé le ministre des Sciences et des Technologies, Hoàng Van Phong.

* Quelle est votre impression devant cette consécration internationale du professeur Ngô Bao Châu ?

Cette médaille Fields pour le professeur Ngô Bao Châu est une grande fierté nationale : en effet, le Vietnam rejoint le Japon avec dans toute l'Asie 2 lauréats de ce prestigieux titre. Ngô Bao Châu a été distingué pour sa démonstration du "lemme fondamental du programme Langlands", 30 ans après sa formulation. Une fierté commune au succès d'un particulier, d'un mathématicien vietnamien et de la tradition des mathématiques au Vietnam, instituée par plusieurs générations et dont le professeur Ngô Bao Châu est un des brillants représentants.

* Cette distinction constitue-t-elle un encouragement significatif pour la recherche scientifique au Vietnam ?

Le succès de Ngô Bao Châu a plusieurs significations. Pour ses homologues et autres enseignants, il s'agit d'une fierté pour leurs contributions générales à la formation d'un homme si talentueux. Pour les jeunes, Ngô Bao Châu est un brillant exemple à suivre. Mais le plus important, c'est que son succès va entretenir la passion, le rêve et la volonté d'étudier les mathématiques. La démonstration du "lemme fondamental du programme Langlands" réalisée par le professeur Ngô Bao Châu n'est pas un dernier succès. D'autres sont attendus de ce dernier comme d'autres jeunes scientifiques…

* Quelles opportunités s'ouvrent aux sciences au Vietnam après cet événement ?

La remise du prix Fields au professeur Ngô Bao Châu par l'UMI suscite une attention particulière de la communauté mondiale des mathématiciens. Avec les mass médias qui ont largement diffusé cet événement, la carrière ainsi que la biographie de Ngô Bao Châu, cette communauté, ainsi que les organisations scientifiques dans le monde, connaissent profondément désormais le développement des mathématiques au Vietnam, ses succès ainsi que ses difficultés. Ce sont des opportunités de coopération internationale dans les hautes technologies et entre mathématiciens et scientifiques qui, ainsi, s'ouvrent à nous. Enfin, le gouvernement profitera de l'occasion afin de mieux satisfaire aux besoins de développement des mathématiques.

* Comment exploiter au mieux ces opportunités alors que le pays déplore une discontinuité des générations en la matière ? Une faiblesse qui s'observe aussi dans d'autres secteurs scientifiques ?

Oui, c'est une réalité qui a été constatée dans la recherche dite fondamentale, c'est-à-dire en matières de mathématiques, chimie, physique, mais aussi en sciences sociales même si cela peut surprendre... La tranche d'âge des 30-50 ans est particulièrement pauvre de scientifiques, ce que d'autre pays ont connu en leur temps. Ce qui est important, c'est que nous devons en prendre acte, et réagir devant cette migration de nos ressources intellectuelles, notamment de formation élevée. Cela resulte du développement de nouveaux domaines de compétences dans notre pays, comme le commerce, la finance, la banque... à la faveur de notre transition vers une économie de marché. Ces secteurs sont attractifs car ils offrent rapidement revenus élevés et de bonnes perspectives de carrière…, alors que le retour sur investissement en sciences fondamentales est traditionnellement plus à venir. Notre mission la plus importante est de mettre fin à cette discontinuité générationnelle grâce à un plan d'action qui se devra d'être à la fois énergique, raisonnable et lucide. Et là encore, l'exemple du professeur Ngô Bao Châu sera particulièrement fructueux.

* Ne doit-on pas également remédier à la faible rémunération dans la recherche scientifique ?

Evidemment ! De faibles revenus sont naturellement une des causes majeures de l'abandon de la recherche par les scientifiques, ou de l'orientation des jeunes vers d'autres secteurs professionnels... Pour remédier à cet état de chose, le gouvernement, malgré un budget encore modeste, a élaboré des politiques et engagé un processus de relèvement progressif des revenus de ces scientifiques. Enfin, cela n'est pas tout, il faut aussi souligner que nos scientifiques doivent savoir s'impliquer davantage et faire face aux problèmes pour se consacrer à leur vocation afin de contribuer au développement national des sciences. Ce qui au passage relève de tous, aussi et notamment des entreprises…

* Cela concerne également les scientifiques vietnamiens résidant à l'étranger… Mais quelles mesures afin qu'ils contribuent davantage au développement scientifique au Vietnam ?

Comme tous les pays du monde, le Vietnam encourage la participation active des scientifiques vietnamiens vivant à l'étranger à l'oeuvre d'édification nationale comme à celle de développement socioéconomique. Sur ce point, ils sont libres des modalités de leurs contributions, au Vietnam ou depuis leurs pays de résidence, hormis certains cas où, évidemment, la recherche implique une présence physique incontournable. Soyons réalistes, l'essentiel est bien qu'ils se dévouent à la cause scientifique pour leur Patrie comme pour leurs compatriotes.

Ngân Huong/CVN

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