Violences sexuelles dans le sport : le judo secoué à son tour

Après le patinage, le judo n'échappe pas à la lame de fond des révélations sur les violences sexuelles dans le monde du sport, fissurant un peu plus "l'omerta" qui règnerait dans ce milieu fermé.

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Le judo n'échappe pas à la lame de fond des révélations sur les violences sexuelles.
Photo : AFP/VNA/CVN

Le réveil est brutal mais malheureusement pas surprenant. "Le phénomène touche tous les sports, il n'y a pas de raison que le judo y échappe", explique une source proche du Comité national olympique et sportif français (CNOSF).

Sur les 313 signalements recensés par la "cellule intégrité" mise en place par le ministère des sports depuis le scandale du patinage au début de l'année, "sept-huit" concernent le judo, selon le ministère des Sports.

Le témoignage paru récemment dans Le Parisien d'une judoka racontant avoir été violée par son entraîneur il y a dix ans, quand elle avait 13 ans, a toutefois considérablement ébranlé le milieu du judo, l'un des sports les plus pratiqués en France avec un demi-million de licenciés.

"Inadmissible"

"C'est évidemment inadmissible. Cela ne doit pas arriver dans notre sport", se désole Stéphane Nomis, ex-judoka, entrepreneur et candidat à la présidence de la fédération, dont les élections doivent se tenir le 22 novembre.

Selon une source proche du dossier, cette affaire de viol présumé n'était pas remontée au ministère des sports, ni à a la Fédération française de judo.

"Je suis bien sûr scandalisé. Dans nos clubs on prône des valeurs qui ne sont pas celles-là. On a toujours été du côté des victimes, et on continuera à le faire", a assuré le président de la fédération française de judo Jean-Luc Rougé. L'entraîneur mis en cause a depuis été "suspendu" à titre conservatoire.

Le président de la Fédération française de judo Jean-Luc Rougé, le 12 février 2013 à Paris.
Photo : AFP/VNA/CVN

Ce n'est toutefois pas la seule affaire qui fait vaciller le judo. Il y a par exemple le cas de cet entraîneur condamné par la justice en 2007 pour "agression sexuelle sur mineur" sur l'une des ses élèves.

Après un passage en prison, l'homme a retrouvé les tatamis dans un club de l'Est de la France. Alors qu'il était frappé d'une interdiction d'entrer en contact avec des mineurs de moins de 15 ans, il a malgré tout continué à s'occuper d'enfants, reconnaît une source à la fédération qui requiert l'anonymat.

Interrogé en caméra caché par une équipe de France télévisions, l'homme avait assumé dans un reportage diffusé en février 2019 avoir "repris les cours d'enfants", en présence d'autres professeurs. Une infraction passible selon le Code du sport d'un an de prison.

Normalement, les entraîneurs ou éducateurs professionnels doivent se faire délivrer une carte professionnelle, qui nécessite une vérification du casier judiciaire et du Fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (Fijaisv).

"Il y a des clubs qui ne demandent pas la carte professionnelle, et il y a des bénévoles qui ne connaissent pas les règles", a reconnu Jean-Luc Rougé.

Il y a aussi le cas de ce professeur de judo à Nantes, condamné en décembre 2019 pour avoir eu en 2016 des relations sexuelles avec une élève de 13 ans alors qu'il en avait 34. Selon plusieurs médias, ce professeur continue d'entraîner, alors qu'il n'est censé ne s'occuper que d'un public adulte.

"C'est un sujet compliqué, difficile, et nos éducateurs, nos entraîneurs ne sont pas formés. Il y a une omerta. On n'ose pas dire les choses", estime Stéphane Nomis, pour qui ces affaires devraient engager la direction fédérale à "un examen de conscience".

Jean-Luc Rougé s'est entretenu mardi avec la ministre des Sports, Roxana Maracineanu, qui devait joindre la jeune femme ayant témoigné dans le Parisien.

"Libérer la parole"

"On a discuté de la stratégie à mettre en place", a expliqué Jean-Luc Rougé. "Ça n'arrive pas qu'aux autres (fédérations, ndlr), et très souvent en plus, ces personnes sont très appréciées. C'est très dur de les déceler. On appelle les gens à parler, à libérer la parole, ils seront protégés."

Le contrôle d'honorabilité, qui permettra de vérifier les antécédents judiciaires des bénévoles, doit être généralisé dès 2021. "Mais ça ne pourra pas tout régler", avait confié il y a plusieurs semaines une source proche du dossier. Les prédateurs non condamnés ou les bénévoles fichés mais usurpant une identité resteront difficiles à déceler.

AFP/VNA/CVN

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