Un Vietnamien capitaine de l’équipe japonaise d’échecs

Lorsque la Fédération internationale des échecs a dévoilé la liste des joueurs prenant part à l’Olympiade de la FIDE 2020 en ligne, beaucoup ont été surpris de voir un ressortissant vietnamien à la tête de l’équipe japonaise.

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Trân Thanh Tú occupe le poste de capitaine de l’équipe japonaise d’échecs à l'Olympiade de la FIDE 2020.
Photo : T.T./CVN

Les échecs sont l’une des très rares disciplines sportives à poursuivre ses activités malgré la pandémie de COVID-19. En effet, la première saison de l’Olympiade de la Fédération internationale des échecs (FIDE) en ligne se déroule du 22 juillet au 30 août sur le site Chess.com et enregistre la participation de 163 équipes nationales et de plus de 1.500 joueurs aux quatre coins du monde.

C’est la nouvelle compétition majeure organisée par la FIDE cette année. Car l’Olympiade, rendez-vous bisannuel international d’envergure opposant des équipes nationales, devait avoir lieu cet été en Russie mais a été repoussée d’un an, en 2021.

Sur la liste de l’équipe du Japon dévoilée par la FIDE, Trân Thanh Tú, 30 ans, occupe le poste de capitaine. Ce nom est peut-être étranger au public vietnamien car seuls les professionnels savent que ce Viêt kiêu (Vietnamien résidant à l’étranger) fait partie de la génération de prodiges les plus prometteuses du pays, aux côtés des stars des échecs vietnamiens telles que Lê Quang Liêm et Nguyên Ngoc Truong Son.

Thanh Tú est né et a grandi dans la province méridionale de Dông Thap. Là ont émergé des joueurs exceptionnels comme le premier Vietnamien à avoir obtenu le titre de grand maître international d’échecs Dào Thiên Hai, ou encore Nguyên Huynh Minh Huy et Duong Thê Anh.

De l’échiquier en papier…

"Je suis né dans une famille paysanne pauvre du district de Châu Thành. J’ai pu devenir ce que je suis aujourd’hui grâce aux échecs et à ma détermination", confie Thanh Tú.

Bien qu’il ait fait ses preuves très tôt dans la discipline, Thanh Tú ne pensait sûrement pas participer un jour à une compétition. "Ma famille vivait à la campagne. Nous étions trop pauvres pour avoir des jouets. Mes frères savaient jouer aux échecs mais ils n’avaient pas d’échiquier. Ils en ont fabriqué un en papier et m’ont appris à jouer. C’est le point de départ de mon aventure avec les échecs. Je n’avais alors que 4 ou 5 ans", se souvient-il.

Les échecs sont l’un des jeux de réflexion les plus populaires au monde.
Photo : ST/CVN

Après seulement quelques mois, Thanh Tú a pu battre ses frères et, dans les premiers temps, gagner lui suffisait. Puis, il a réalisé l’ampleur de sa passion pour le jeu et a persuadé à ses parents de l’inscrire à des cours spécialisés.

Ainsi, à l’âge de 6 ans, les parents de Thanh Tú l’ont envoyé à Sa Déc, dans la province de Dông Thap, pour vivre, étudier et apprendre à jouer aux échecs.

À 10 ans, il déménage au chef-lieu de Cao Lanh, où il rejoint les joueurs talentueux de l’équipe d’échecs provinciale.

"L’entraînement et la participation aux tournois d’échecs sous le maillot de l’équipe de Dông Thap m’ont permis de gagner assez d’argent pour subvenir à mes besoins. Je n’ai pas eu besoin d’accabler mes parents pour leur demander de l’aide. En plus de jouer aux échecs, j’ai fait de mon mieux pour devenir l’un des meilleurs élèves de mon école", partage-t-il.

À l’université, Thanh Tú n’a pas la chance de suivre des formations à l’étranger, il se contente de défier son entraîneur et de lire des ouvrages sur les échecs téléchargés sur Internet afin d’améliorer ses compétences.

Thanh Tú fait cependant parler de lui à plusieurs reprises lors de championnats nationaux juniors. Aux Championnats d’Asie du Sud-Est des moins de 16 ans (U16) 2006 et aux Championnats nationaux 2015, il fait forte impression en remportant à la surprise générale des médailles d’or en blitz face à de nombreux participants talentueux, dont Nguyên Ngoc Truong Son.

… à la tête de l’équipe japonaise

Thanh Tú obtient en 2013 son diplôme en informatique à l’Université de Cân Tho, au Sud, et commence à travailler en tant que développeur. Deux ans plus tard, il se trouve à la croisée des chemins et doit choisir entre deux options : poursuivre une carrière de joueur d’échecs et rester au Vietnam ou bien s’installer au Japon pour participer à un programme de collaboration entre 10.000 ingénieurs des deux pays.

Estimant que partir à l’étranger est une opportunité unique pour son avenir, Thanh Tú décide de se rendre au Japon en juillet 2015 pour travailler dans une entreprise nipponne.

Naturellement, dès son arrivée dans le pays du Soleil-levant, il envisage de rejoindre un club d’échecs. Entre le travail et le temps passé à apprendre le japonais, il réussit tout de même à faire de la place dans son emploi du temps pour rejoindre le club d’échecs de Chiba. C’est alors qu’il devient un véritable phénomène dans les cercles de joueurs d’échecs japonais et va même jusqu’à remporter les Championnats nationaux du Japon en 2016 et 2018.

"Un jour, j’ai reçu un appel inopiné du président de la Fédération japonaise des échecs, Hiebert Yumiko. Il m’a proposé le poste de capitaine de l’équipe japonaise pour les Olympiades en ligne de cette année", explique-t-il. "C’est un grand honneur pour moi", se réjouit Thanh Tú.

L’équipe japonaise s’est classée dans le troisième groupe de l’Olympiade de la FIDE en ligne 2020, avec seulement sept joueurs, alors que cette discipline n’est pas encore développée dans ce pays. De nombreux tournois doivent se dérouler pendant les vacances et les week-ends pour compter suffisamment de participants car peu de joueurs peuvent concourir en semaine. "L’équipe d’échecs japonaise de cette année est entièrement composée de joueurs amateurs, dont des ingénieurs, des professeurs d’université ou des diplômés", partage-t-il.

"Je vais faire de mon mieux. Cette opportunité de rassembler des joueurs du monde entier est un moyen idéal de mettre en valeur les pouvoirs inclusifs des échecs pendant cette période difficile de pandémie de COVID-19. Je souhaite contribuer au développement de ce sport au Japon dans l’avenir", conclut-il, des étoiles dans les yeux.

Phuong Nga/CVN

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