Un ouvrage sur le réseau de collecte et de recyclage des déchets au Vietnam

Le lancement de l'ouvrage Collecter et recycler les déchets à Hanoï de Sylvie Fanchette, chercheuse à l'Institut de recherche pour le développement (IRD) au Vietnam, a eu lieu hier, le 4 décembre, au lycée français Alexandre Yersin à Long Biên, Hanoï.

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Photo : IRD/CVN

L'ouvrage offre un panorama complet sur le réseau de collecte et de recyclage des déchets au Vietnam. Il met également en lumière la vie et l'avenir des personnes spécialisées dans ce travail, appelées en vietnamien "dông nat".

Lors d'une table-ronde organisée dans le cadre de cet événement, l'auteure, Sylvie Fanchette, souligne les conditions de vie difficiles des dông nat, tant en ville que dans les villages, ainsi que les enjeux relatifs aux lois concernant la gestion et l'importation des déchets. Elle met en évidence la vulnérabilité des commerçants et collecteurs de déchets qui, pour la plupart, sont des migrants, la plupart sans statut résidentiel, et qui ont un accès limité aux services sociaux.

Pour atténuer leur vulnérabilité socio-économique et migratoire, la plupart de ces travailleurs informels sont intégrés dans des réseaux de villageois, fournissant un soutien logistique pour accéder aux déchets, ainsi qu'un transfert de savoir-faire et de capital social.

Par ailleurs, aucune association professionnelle ne réunit les collecteurs, les commerçants ou les recycleurs de déchets, comme c'est le cas dans d'autres pays tels que le Brésil. Cette absence d'organisation est liée à une compétition intense entre les ateliers et les usines, ainsi qu'à la crainte de la copie des produits et des techniques.

Lors du lancement de l'ouvrage Collecter et recycler les déchets à Hanoï. 
Photo : IRD/CVN

L'auteure interroge également l'aménagement des dépôts dans les villes. Bien que ces dépôts de déchets soient généralement installés dans des interstices urbains, les collectivités locales prévoient de les délocaliser en périphérie. Sylvie Fanchette souligne que sans ce réseau dense de dépôts, le système de collecte basé sur la proximité risque de s'affaiblir.

En examinant les villages de recyclage aux environs de Hanoï, l'auteure constate une augmentation rapide des volumes de déchets recyclés au cours des vingt dernières années. Cette croissance est liée à l'intégration du Vietnam dans la mondialisation, sa politique de développement industriel soutenue par les investissements étrangers, et à la demande croissante en matières premières des grandes entreprises industrielles mondialisées.

Cependant, face à l'importation croissante de déchets, le marché des dông nat perd progressivement de son importance, bien qu'il demeure présent dans la ville. Leurs déchets sont vendus en quantités limitées à deux tonnes (taille des camions autorisés à Hanoï) et ne répondent pas aux normes de qualité, de volumes et de régularité d'approvisionnement requises par les grandes usines ou les ateliers de taille moyenne.

En l'absence de factures, les collecteurs et les gérants de dépôts ne peuvent pas commercer avec les entreprises du secteur formel. Ils approvisionnent principalement les petites entreprises familiales. Ces dernières, faute de place pour stocker de grandes quantités, achètent des déchets en petites quantités, moins chers, et qui parfois requièrent un second tri, conclut la chercheuse.

Les enjeux élevés sur le plan environnemental

La séance de signature de Sylvie Fanchette. 
Photo : IRD/CVN

Les politiques foncières et environnementales visant à établir des zones artisanales éloignées des zones résidentielles villageoises ont encouragé la croissance en nombre et en taille des entreprises ainsi que leur mécanisation. Cependant, cela engendre un cercle vicieux, car plus les entreprises s'agrandissent et se mécanisent, plus les coûts de production augmentent, incitant les entrepreneurs à chercher des économies d'échelle et donc à s’approvisionner sur les marchés des déchets qui leur correspondent.

Ainsi, l'avenir du système des dông nat repose entre les mains des petits ateliers de villages qui cherchent à maîtriser les coûts de production, utilisent leur main-d'œuvre familiale et restent positionnés dans les créneaux des produits de basse qualité, analyse Sylvie Fanchette. Ces petites entreprises peuvent travailler en sous-traitance pour les plus grandes ou exécuter une partie du processus de production. Leur forte intégration en raison de leur complémentarité avec les grandes entreprises et de leurs coûts de production plus bas, est notable.

Cependant, la dégradation de l'environnement causée par ces clusters artisanaux compromet l'ensemble du système de collecte des déchets et de recyclage, bien que ce dernier soit performant en termes de volumes collectés et traités, d'innovation sociale et d'emplois qu'il génère, conclut-elle.

Sylvie Fanchette, géographe et directrice de recherche à l'IRD au sein du Centre d'études en sciences sociales sur les mondes africains, américains et asiatiques (Cessma) à Paris, se consacre à l'étude des formes et des dynamiques de l'urbanisation dans les régions à forte densité démographique en Asie. Ses recherches portent également sur les relations ville-campagne, en mettant l'accent sur les migrations et le recyclage des déchets urbains au sein des clusters de villages artisanaux. En partenariat avec l'Université d'architecture de Hanoï, elle a co-dirigé le programme de recherche "Collecte et recyclage des déchets dans la ville de Hanoï : dynamiques urbaines et recomposition métropolitaine".

Vân Anh/CVN

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