France
Télétravail : le Medef arrache un accord au terme de tractations intenses

Clap de (presque) fin : le Medef a réussi à arracher jeudi 26 novembre l'aval de la CFDT, de Force ouvrière, de la CFE-CGC et de la CFTC, mais pas celui de la CGT, pour son projet d'accord national interprofessionnel (ANI) non contraignant sur le télétravail.

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Le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, en juillet à Paris.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Cette négociation s'achève positivement", a estimé Hubert Mongon, le négociateur social du Medef, à l'issue d'une ultime réunion de près de trois heures, qui a mis fin à quatre journées de tractations intenses et trois semaines de négociation.

Le texte "définitif" remis par le patronat jeudi 26 novembre ajoute des précisions sur la mise en place du télétravail en situation de crise (pandémie, catastrophes naturelles, destruction des locaux d'une entreprise) ou encore sur la prise en charge des frais.

Portant aussi sur le télétravail classique, il est censé compléter le précédent ANI, signé en 2005.

La CFDT, Force ouvrière et la CFTC ont annoncé dans l'après-midi avoir obtenu le feu vert de leurs instances respectives pour signer le document. La CFE-CGC a jusqu'au 23 décembre pour le faire.

Louant "un texte opérationnel", M. Mongon a listé quelques "points importants", comme le double volontariat (de l'employeur et du salarié) ou la réversibilité - qui permet à un salarié de revenir sur son lieu de travail si le télétravail ne lui convient pas -, qui existaient pourtant déjà dans l'ANI 2005.

Ce texte est-il contraignant ? Le patronat s'était fixé l'objectif, contesté par les syndicats, de rendre ce texte "ni normatif ni prescriptif".

Un ANI "par définition, lorsqu'il est signé par une majorité d'organisations professionnelles et patronales est un accord qui s'installe dans le paysage juridique des entreprises et du pays", a-t-il souligné. "À ce titre, ça devient un accord de référence et qui a vocation à être étendu" par la loi, a ajouté M. Mongon.

Or, c'est sur ce point que la CGT continue de focaliser ses critiques. Les autres organisations n'en font plus un casus belli, mais la gêne est palpable.

"Cet accord n'est ni normatif ni prescriptif, mais pour autant, il présente un cadre intéressant pour les négociateurs dans les entreprises", a déclaré Catherine Pinchaut (CFDT), expliquant lors d'un point presse qu'on était "plus dans la recommandation que dans l'obligation formelle".

"Prescriptif ou normatif, c'est de la com. À partir du moment où on débouche sur un accord, il a une valeur normative", a balayé Yves Veyrier, le secrétaire général de FO.

"Base unifiée solide"

Le patronat a revu sa copie quatre fois en moins d'une semaine pour arriver à convaincre les syndicats qui voyaient dans le projet surtout "des reculs" pour les salariés. Mais faute d'accord, le gouvernement se serait chargé de légiférer, certains voyant cette éventuelle reprise en main comme "un échec".

Dès mercredi 25 novembre, la CFDT et la CFTC s'étaient dites prêtes à signer la précédente version du texte, qui faisait une série de concessions, tout en considérant que le projet n'était "pas révolutionnaire" en matière de droits des salariés.

Cet accord "constitue une base unifiée solide sur laquelle les partenaires sociaux pourront construire leurs accords de branches ou d'entreprises, notamment pour les plus petites d'entre elles", estime la CFTC dans un communiqué.

La ministre du Travail, Élisabeth Borne, qui suivait de près la négociation, note qu'avec l'accord "chaque entreprise pourra désormais se servir de ce cadre pour mettre en place de manière durable le télétravail".

Le document rappelle le cadre juridique existant, notamment que la mise en place du télétravail passe par un accord collectif, une charte ou un accord de gré à gré entre l'employeur et le salarié.

Parmi les nouveautés, les syndicats ont obtenu que l'éligibilité des postes télétravaillables ne soit pas du ressort unique de l'employeur, mais puisse faire l'objet d'un dialogue social en entreprise.

Quant au télétravail en temps de crise, les conditions de sa mise en place passeront par "un accord" ou "une charte".

En revanche, pas de prise en charge des frais d'internet, de chauffage ou d'électricité, comme réclamé par la CGT, mais rappel que les frais "doivent être supportés" par l'employeur et que ce "peut être" le sujet d'un dialogue social en entreprise.

"Les droits nouveaux attendus par les télétravailleuses et les télétravailleurs sont absents de ce texte : droit à la déconnexion, sécurité des données, mesures en faveur de l'égalité femme-homme, situations particulières (aidants familiaux, travailleurs en situation de handicap)", critique la CGT.

Depuis fin octobre et la recrudescence de l'épidémie de COVID-19, le télétravail est "la règle" dans les entreprises qui le peuvent et doit rester "le plus massif possible" dans les prochaines semaines, a souligné jeudi 26 novembre le Premier ministre Jean Castex.


AFP/VNA/CVN

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