Soufflé par le prix du gaz, le verrier Arc éteint des fours et songe au fioul

Celui-là chauffe encore, à 1.500°C, la température du verre en fusion avant sa métamorphose en carafe ou en ballon. Pas pour longtemps  : contraint par le prix du gaz, le verrier Arc s'apprête à éteindre plusieurs fours cet hiver et songe même à revenir au fioul.

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Un ouvrier de la verrerie Arc, à Arques, en France, le 9 septembre.
Photo : AFP/VNA/CVN

Ce four n'est qu'un des neuf de l'immense usine d'Arc France, près de Saint-Omer (Pas-de-Calais), huitième plus grand site industriel français, selon la cristallerie.

Une pelle, infatigable, y introduit un mélange de sable, de soude et de calcaire, dans une atmosphère brûlante. Comme cinq autres fours du site, il est alimenté au gaz - les trois derniers sont électriques.

Ramené à 1.300°C, température à laquelle il peut être travaillé, le verre passe ensuite dans des machines qui soufflent, moulent, soudent.

Un processus gourmand en énergie  : 1,3 million de MWh par an, dont près de 80% de gaz, pour toute l'usine.

Comme d'autres verriers, la vénérable cristallerie fondée en 1825, en difficulté depuis plusieurs années mais qui avait connu un très bon premier semestre, doit aujourd'hui s'adapter à la flambée du prix du gaz. Avec près de 5.000 salariés en France, l'enjeu est d'importance.

"On est à 200 euros le MWh alors qu'en 2021, nous l'achetions aux alentours de 13 euros", résume son DRH, Guillaume Rabel-Suquet.

Four de la verrerie Arc à Arques, en France, le 9 septembre.
Photo : AFP/VNA/CVN

Chômage partiel

Combinée à une chute des commandes - l'inflation pousse les consommateurs à se recentrer sur l'essentiel - cette hausse vertigineuse contraint le verrier à réduire sa voilure.

Pendant l'hiver, trois à cinq fours seront arrêtés : deux pour des réparations (mais ils ne seront pas redémarrés), les autres par souci d'économie.

Pour les fours restants, des tests sont menés sur un possible basculement temporaire du gaz vers le fioul domestique, afin de maintenir une partie de la production, explique M. Rabel-Suquet. Car "aujourd'hui, le prix du fioul représente à peu près un tiers du prix du gaz".

La situation, "complètement inédite", "nous fait reprendre des modes de fonctionnement d'il y a une dizaine d'années", quand le site a abandonné le fioul lourd pour le gaz, complète le directeur des opérations verrières, Martin Debacker.

Début septembre, 1.600 salariés des fonctions support ont été placés en chômage partiel. La direction doit bientôt annoncer combien d'ouvriers de production le seront cet hiver. Elle promet qu'il n'y aura pas de licenciements.

"Autant de fours à l'arrêt, c'est une première qui nous inquiète beaucoup", insiste le syndicaliste (CFE-CGC) Patrice Bollengier, chez Arc depuis plus de 35 ans.

Un ouvrier de la verrerie Arc à Arques, en France, le 9 septembre.
Photo : AFP/VNA/CVN

Revenir au fioul n'est "pas anodin" pointe-t-il. "Cela signifie des citernes, des transbordements, des pompes..." Et "il y a un gros sujet sécurité car les installations n’ont pas tourné depuis des lustres".

"Pic de CO2"

Cette décision va également affecter le bilan carbone du site, comme le reconnaît M. Rabel-Suquet, qui évoque "un pic" de CO2 "un peu plus important".

Mais Arc reste à long terme engagé dans un processus de "baisse de 50 kt par an de la production de CO2, de 20% de la consommation de gaz et 5% de la consommation d'électricité" et mène des recherches pour convertir certains fours à l'électricité, insiste-t-il.

Dans le Nord voisin, un autre verrier, AGC, assure investir dans les énergies renouvelables (panneaux solaires, hydrogène...), mais envisage lui aussi un retour à court terme du fioul léger pour ses fours. La célèbre verrerie Duralex mettra pour sa part son four en veille pendant quatre mois à partir de novembre.

Depuis 2020, l'État a accordé 128,5 millions d'euros de prêts à Arc France.

Au-delà des mesures purement énergétiques, l'entreprise s'est lancée dans une refonte de sa stratégie commerciale, pour se concentrer sur les produits offrant de meilleures marges. Dans ce cadre, un des neuf four doit être définitivement arrêté début 2023.

Et elle attend beaucoup des propositions de l'Union européenne - détaillées mercredi  14 septembre - pour enrayer la flambée des prix du gaz et de l'électricité.

AFP/VNA/CVN

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