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Manifestation à Marseille contre le 49-3, le 2 mars. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
La motion de LR a recueilli 148 voix et celle des trois groupes de gauche (PCF, PS et LFI) 91 voix, loin de la majorité absolue de 289 suffrages nécessaires pour faire tomber un gouvernement. Seules les voix favorables à la motion sont comptabilisées.
Le Premier ministre avait dénoncé plus tôt à la tribune les "combines procédurales" maniées par la gauche de la gauche pour faire de "l'obstruction" sur ce projet emblématique visant à créer un système "universel" par points.
Après 13 jours d'un parcours hors norme à l'Assemblée en première lecture, Edouard Philippe avait signé samedi la fin de la partie avec le recours surprise au 49-3, cet outil constitutionnel permettant de faire adopter le texte sans vote, en engageant la responsabilité du gouvernement.
Aussitôt, LR et les trois groupes de gauche avaient déposé leurs motions. Le chef de file des députés LR Damien Abad a critiqué mardi un "fiasco parlementaire sans précédent" sur une réforme qui fera des Français les "grands perdants". Les Insoumis notamment ont soutenu cette motion pour "dire non au gouvernement", malgré un "désaccord complet" avec la droite sur le fond, a expliqué François Ruffin.
Défendant la motion de gauche, le communiste André Chassaigne a fustigé un "désastre démocratique" avec le recours à l'arme "funeste" du 49-3 qui "parachève la chronique du fiasco annoncé de cette réforme".
"Calembredaines"
"Vous avez fracturé le pays", a renchéri la socialiste Valérie Rabault, tandis que Jean-Luc Mélenchon (LFI) taclait un 49-3 "décidé sournoisement", promettant la poursuite d'une "guérilla populaire et parlementaire, pacifique".
Le RN de Marine Le Pen a soutenu la motion de gauche, mais pas celle de droite, pour marquer son opposition au report à 65 ans de l'âge de départ à la retraite.
Gilles Le Gendre (LREM) a lancé sous des huées à la gauche de la gauche, à l'origine de milliers d'amendements : "le 49-3, c'est vous !".
Le Premier ministre a lui insisté sur une réforme de "justice sociale" : "ceux qui défendent le statu quo (...) racontent bien trop souvent des calembredaines".
Récusant tout "coup de force", il a observé qu'il aurait fallu "8 semaines", week-end compris, pour arriver au bout.
Avoir une minorité qui "bloque systématiquement les questions de fond" n'est pas à l'"honneur du débat parlementaire", a ajouté Edouard Philippe, en vantant un "texte de compromis" avec l'intégration de 180 amendements issus des différents bancs et des discussions avec les partenaires sociaux.
"La majorité réaffirme son soutien franc et massif au gouvernement", ont estimé plusieurs "marcheurs" après le rejet des motions.
Dans la rue, les opposants à la réforme, mobilisés depuis le 5 décembre, continuent le combat : ils ont manifesté à nouveau mardi 3 mars à Paris et en province contre ce "passage en force". Au sein des cortèges clairsemés, les slogans clamaient "Macron traître et retraites" ou "49-3, on n'en veut pas".
Chez les avocats, une des professions les plus hostiles à la réforme, le barreau de Paris a voté la poursuite de la grève "jusqu'au mercredi 25 mars inclus".
La séquence se déroule dans un climat déjà tendu pour l'exécutif, entre coronavirus et élections municipales. En interne, la majorité est aussi confrontée à un enjeu de cohésion, avec des départs au compte-gouttes qui se poursuivent. La députée encore apparentée LREM Albane Gaillot a d'ailleurs voté la motion de censure de la gauche pour protester contre le 49-3.
Les députés ont au menu à partir de mercredi 4 mars le projet de loi organique accompagnant la réforme et objet de 1.800 amendements.
La réforme poursuivra ensuite son parcours au Sénat à majorité de droite en avril, avant de revenir à l'Assemblée, le gouvernement visant toujours une adoption définitive avant l'été. Entre-temps sont attendues les conclusions de la "conférence de financement", dont la CGT et FO ont claqué la porte.
À l'instar de Jean-Luc Mélenchon qui ne veut "aucune violence", plusieurs élus ont appelé à ne pas "attiser" les colères, alors que depuis samedi plusieurs permanences et locaux de campagne ont été ciblés, dont ceux du Premier ministre au Havre, où il brigue son ancienne mairie.
AFP/VNA/CVN