Quôc Dat, une passion pour la musique

Nguyên Quôc Dat a perdu la vue à l’âge de 2 ans. Depuis, l’artiste non-voyant s’est plongé dans la musique pour compenser son handicap. Grâce à un talent inné et sa profonde passion, il peut jouer différents styles de musiques et d’instruments.

>>Privé de ses avant-bras, il réalise des prouesses à l’orgue

L’artiste non-voyant Quôc Dat est un véritable «touche-à-tout».

Né en 1986 dans la province de Trà Vinh (Sud), Nguyên Quôc Dat était un garçon mignon comme les autres. À l’âge de 2 ans, une mauvaise rougeole a entrainé sa cécité. «À cette époque-là, notre famille était bien trop pauvre pour faire en sorte que ses yeux soient sauvés», explique avec émotion Diêp Thi Hông, sa mère.

Cependant, cette mésaventure l’a conduit directement à la découverte du monde de la musique. À 4 ans, son oncle lui offrait son premier piano, un jouet. Malgré son handicap, le jeune garçon s’est mis à écouter les sons qui en sortaient : ce fût le début d’une grande passion.

Premières étapes d’un artiste

À 8 ans, sa mère l’a emmené à Hô Chi Minh-Ville pour l’inscrire à l’école pour aveugles Bung Sang, dans le 10e arrondissement. C’est ici qu’il a rencontré un grand ami. «Mon prof aimait bien la musique. Chaque matin, il nous faisait découvrir un genre musical, musique de chambre, rock, jazz, pop… afin que nous puissions nous en imprégner», raconte Nguyên Quôc Dat. Outre ses cours à l’école, il a appris seul grâce à la radio et aux disques.

Après 12 années d’études, il a trouvé des «boulots» dans des restaurants, des cafés et des bars. Chaque soir, il gagnait de 300.000 à 400.000 dôngs. La vie n’était pas facile, ses salaires couvraient tout juste le loyer, la nourriture et le transport par xe ôm (moto-taxi) pour lui et sa mère de 70 ans, sans oublier ses instruments de musique.

Dans une chambre de 15 m2, située dans une petite ruelle de la rue Trân Xuân Soan dans le 7e arrondissement, il s’entraînait tous les jours sur son orgue et avec ses guitares. Sa mère était sa plus fidèle auditrice. Selon Dat, la musique classique n’est pas très connue au Vietnam, et les musiciens diplômés du conservatoire ne peuvent donner des concerts. C’est aussi le cas du jazz. Le jazz a acquis une large popularité au-delà des frontières des États-Unis, se répandant dans le monde.

Quôc Dat (1er à droite) et d’autres musiciens au café «La Fenêtre» à Hô Chi Minh-Ville.

Toutefois, ce genre ne donne lieu qu’à peu d’intérêt au Vietnam. Dat aime le jazz depuis son enfance et a commencé à en jouer en 2012. Il a appris de musiciens américains et français, et maintenant, il peut en jouer en professionnel. «C’est un excellent pianiste, très bon techniquement, et qui a su développer un sens de l’écoute qui est très important en jazz», indique son collègue Louis Raymond.

Vivement apprécié par ses collègues

Bien qu’il manque d’un environnement encourageant la création musicale, Dat souhaite toujours présenter le jazz au public vietnamien. «Je vais créer un groupe de jazz». En 2013, avec le groupe Five Play de New York, il a donné un concert. Il a aussi travaillé dans le club du saxophoniste Trân Manh Tuân. Enfin, il a fait une tournée au Myanmar en 2015 avec un groupe de musiciens handicapés vietnamiens, avec deux groupes français et américains installés au Vietnam.

Chaque dimanche, il va au café «La Fenêtre», au 48, rue Ly Tu Trong dans le 1er arrondissement, pour jouer avec des musiciens de divers horizons. C’est l’occasion pour lui de s’enrichir de nouvelles idées et de nouvelles influences. Gabriel Kaouros, un Chypriote, dit de lui qu’il «ressent bien la musique, il a une grande sensibilité. Il peut jouer de plusieurs instruments et de plusieurs styles tels que jazz, blues et pop».

Louis Raymond a estimé que «ses solos, par exemple, sont souvent impressionnants, mais il respecte le jeu des autres musiciens et est à leur écoute. Cela pourrait sembler naturel, mais ce n’est pas toujours le cas chez les musiciens».

Il ne cesse d’apprendre pour progresser davantage et, finalement, participer à des concerts à l’étranger. «Je rêve du jour, en prenant un café comme avec vous maintenant, de recevoir un appel de mon amie qui travaille au consulat américain à Hô Chi Minh-Ville, pour m’inviter à jouer aux États-Unis», conclut Nguyên Quôc Dat.


Texte et photos : Dang Huong/CVN

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