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L’«Artiste Émérite» Danh Sà Râm avec son Chà pây đơn vênh. |
Danh Sà Râm habite dans le quartier de Dâu Sâu Dông, commune de Lôc Ninh, district de Hông Dân (province de Bac Liêu, delta du Mékong). Cette commune compte plus de 3.000 foyers khmers, totalisant environ 14.000 personnes, qui vivent de l’agriculture, de l’élevage de bétail et de volaille, et d’aquaculture. Les Khmers possèdent une langue, une écriture et une culture propres. Ils ont plus particulièrement un trésor artistique original et inestimable, notamment des instruments traditionnels et le Châm riêng Chà pây, un art très vivant des Khmers du delta du Mékong. Cependant, très peu d’artistes sont encore capables de préserver cet art traditionnel.
Un artiste polyvalent
Né en 1941, Danh Sà Râm a hérité de son père d’une grande fortune musicale. Dès son enfance, il lui a appris à jouer différents instruments. Les mélodies basses et hautes sortant de ces instruments le séduisant, il a suivi son père dans les pagodes et les fêtes traditionnelles de la communauté khmère du delta. «Au début, je voulais participer aux fêtes de mariage afin de m’amuser et de gagner de l’argent pour ma famille. Mais cela m’a passionné et j’ai continué», a-t-il partagé.
Non seulement il peut jouer de divers instruments traditionnels khmers, mais il peut aussi en fabriquer avec différents matériaux (bambou, bois...). Sur les murs de sa maison sont fièrement accrochés différents instruments de musique qu’il a fabriqués. On peut voir un Chà pây đơn vênh, un đàn bán nguyệt (luth en forme de demi-lune), ou encore des đàn gáo, đàn cò, sáo trúc (flûtes en bambou), trống da (tambour en peau)... Pour lui, apprendre et jouer un instrument traditionnel est un long parcours. Les comprendre, puis les maîtriser, c’est une double difficulté. «J’ai mis plus de dix ans pour en jouer correctement, maîtriser les fonctions de chaque corde», a précisé l’artiste.
M. Râm apprend à son petit-fils, Danh Sa Linh, à jouer d’instruments de l’ethnie khmère. |
Danh Sà Râm est l’un des rares artistes de Châm riêng Chà pây dans la province de Bac Liêu. Dans la langue de son ethnie, Châm riêng veut dire chant, tandis que Chà pây (ou Chà pây đon vênh) est le nom d’une sorte de luth à deux cordes en forme de feuille de styrax.
Concrètement, il s’agit d’une narration chantée en alternance avec de la musique. Le Châm riêng Chà pây est un art vocal inhérent à la vie culturelle de l’ethnie khmère et est classé patrimoine culturel immatériel du Vietnam.
Outre de chanter et de jouer du Chà pây, il a écrit des paroles, des poèmes en strophes de quatre vers, sur les valeurs morales dans la vie humaine. Il est souvent invité à les présenter dans des festivals artistiques de la province de Bac Liêu ou dans les localités avoisinantes du delta du Mékong.
Le président vietnamien Truong Tân Sang l’a décoré en 2015 du titre d’«Artiste émérite» en distinction de ses grandes contributions à la sauvegarde et au développement des patrimoines culturels des ethnies et à l’édification et à la protection du pays. Danh Cao, responsable des ethnies du district de Hông Dân de la province de Bac Liêu, a affirmé : «M. Râm est un artiste réputé de la communauté de l’ethnie khmère».
Transmettre cet art aux jeunes
À 69 ans, M. Râm s’inquiète de la pérennité de l’art Châm riêng Chà pây, mais aussi de l’utilisation d’instruments de musique khmers : «Je ne veux pas que ma culture traditionnelle disparaisse dans un proche avenir».
M. Râm enseigne le jeu de ses instruments traditionnels à quinze personnes de localités des provinces de Bac Liêu et de Hâu Giang. Danh Sà Linh, par exemple, est la 3e génération de sa famille de musiciens traditionnels, succédant ainsi à son grand-père. «Je veux devenir un artiste comme mon grand-père. Je veux jouer dans les fêtes de mariage et les fêtes traditionnelles khmères, ou encore, participer aux festivals artistiques nationaux».
Malheureusement, aujourd’hui, la communauté khmère loue les services d’artistes et de joueurs d’instruments modernes pour leurs fêtes traditionnelles. Et puis, les artistes de Châm riêng Chà pây sont de plus en plus rares, et tous âgés. De nouvelles générations sont donc attendues pour conserver et promouvoir les arts traditionnels de la communauté locale et nationale.
Texte et photos : Dang Huong/CVN