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Les poteries sont séchées avant la cuission. Photo: VNA/CVN |
On ne sait pas exactement quand est née la poterie de Binh Duc de la province de Binh Thuân (Centre), également appelée poterie Go (signifiant "marmite"), qui se transmet de génération en génération depuis des siècles. Les habitants locaux ne sont cependant pas toujours conscients de l’importance de pré-server ce métier héréditaire, considéré comme la quintessence de l’identité Cham.
Un artisanat ancestral
La poterie Go, dont le style plutôt sobre, attire les visiteurs des quatre coins du pays de par ses traits particuliers. Malgré les vicissitudes du temps, elle demeure et conserve sa beauté sauvage. Lâm Hung Sôi, artisan potier avec une trentaine d’années d’expérience, a appris les fils du métier grâce à sa mère quand il avait 13 ans. Le travail à temps plein lui apporte depuis un revenu régulier. Sa famille fabrique chaque jour quelque 50 céramiques, selon le marché, essentiellement des fourneaux, braséros ou autres ustensiles de cuisine.
Sur le côté technique, ce métier artisanal est un travail minutieux, de longue haleine, qui demande certes du savoir-faire, mais aussi beaucoup de patience, a partagé M. Sôi.
L’argile utilisée est recueillie dans la commune de Hai Ninh, district de Bac Binh. Elle est ensuite immergée dans de l’eau pendant une nuit entière, puis soigneusement malaxée avec du sable jusqu’à obtention d’un mélange souple et fin.
Bien qu’il existe désormais une multitude d’outils modernes en poterie, les artisans de Binh Duc mettent un point d’honneur à rester fidèles aux pratiques d’antan, n’utilisant que les instruments artisanaux simples et traditionnels. Ici, point de plateaux tournants motorisés, mais simplement une table en bois et un chiffon. Il s’agit d’un des traits caractéristiques de la poterie Go.
Avant de déposer l’argile sur la table, on la saupoudre d’un peu de sable blanc pour éviter qu’elle ne colle. L’artisan utilise ensuite ses mains pour créer le produit en faisant lui-même le tour de la table. Une fois que la forme est créée, un mince cercle de bambou est utilisé afin de faire une surface lisse.
Les poteries sont ensuite couvertes d’eau d’argile rouge afin d’accentuer encore plus leur couleur après cuisson. La technique de cuisson à ciel ouvert est également un des attributs rares de la poterie de l’ethnie Cham. Cet artisanat est basé sur un sens important de la communauté. En effet, tous les trois ou quatre jours, les artisans du village se rassemblent tous pour effectuer la cuisson.
La poterie et le bois de chauffage sont disposés en rangées horizontales, perpendiculaires à la direction du vent afin de diminuer les risques de fissure. Normalement, une cuisson prend deux à trois heures en fonction de la taille des produits.
Selon l’artisan Sôi, les poteries Go diffèrent de celles des autres localités en raison de la qualité de l’argile, de la technique de cuisson et des motifs ornementaux distinctifs.
Valorisation du métier traditionnel
La poterie est un travail minutieux, de longue haleine qui demande certes du savoir-faire, mais aussi beaucoup de patience |
Le village de Binh Duc compte actuellement 155 artisans dont six spécialisés dans la fabrication de poteries artistiques. Contrairement aux céramiques à usage quotidien, la création de ces produits prend généralement beaucoup plus de temps. La plupart d’entre eux se font par commande ou sont présentés au Centre d’exposition de la culture Cham, dans la commune de Phan Hiêp, district de Bac Binh.
Malgré tout, l’artisan Dang Van Son ne se décourage pas et continue d’être passionné par la création d’œuvres artistiques, bien qu’elles ne lui apportent qu’un maigre revenu. Ses produits sont essentiellement des tours, des statues du dieu Shiva ou des Apsara…
"Cela m’a pris trois jours pour fabriquer cette tour à cause des nombreux petits détails", partage M. Son. En effet, selon lui, pour qu’une céramique artistique soit réussie, il faut que le potier soit minutieux, mais surtout passionné par ce qu’il fait.
En dehors de la confection même, l’artisan Dang Van Son présente régulièrement cet art aux visiteurs et élèves qui désirent apprendre le métier. “La plupart des jeunes de nos jours n’y connaissent rien à la poterie, encore moins celle artistique. On ne sait pas vraiment quoi faire pour pourvoir transmettre cet artisanat”, se soucie M. Son.
Actuellement, le Centre d’ex-position de la culture Cham conserve non seulement ces traits culturels mais les présente aussi aux visiteurs. Sa directrice adjointe Lu Thai Nguyên informe que les poteries sont indispensables depuis jadis dans la vie quotidienne de toutes les familles ainsi que dans la culture et la croyance des Cham. L’établissement présente actuellement plus de 1.500 objets. En marge de l’exposition, il invite régulièrement les artisans à présenter la technique de ce métier traditionnel aux visiteurs.
Depuis la nouvelle selon laquelle le Premier ministre vient d’autoriser le ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme à soumettre à l’Organisation des Nations unies pour la culture, la science et l’éducation (UNESCO) le dossier "L’art de la céramique des Cham" en vue d’une reconnaissance en tant que patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde d’urgence, le village de Binh Duc est des plus animés. Ses artisans sont extrêmement enthousiastes à l’idée que leur poterie soit préservée et développée de manière durable.