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Larry Vetter s’active à créer une page web dédiée au sort des petites victimes de la dioxine. |
Depuis huit ans, dans la ville de Dà Nang (Centre), il n’est plus rare de croiser un grand Américain partageant la peine mais aussi la joie des enfants souffrant de malformation et nés de parents frappés par l’agent orange. Son nom : Larry Vetter. Cet ex-marine pris part aux combats dans le centre du Vietnam entre 1965 et 1969. Et depuis quelques années, il a décidé de vivre parmi les habitants locaux frappés par ce défoliant répandu par les forces américaines pendant la guerre.
De retour à Dà Nang en 2008, il rencontre par hasard La Thành Cang, dont ses deux fils Toàn et Nghia, nés avec des malformations. Une «rencontre prédestinée», selon Larry Vetter, qui l’a convaincu de rester au Vietnam, et de verser toute sa pension de retraite pour soigner ces deux malheureux garçons.
Trois générations de victimes
«Trente ans après la guerre, la souffrance due à l’agent orange est encore là au Vietnam. Bon nombre d’enfants sont innocents, et ils doivent subir les conséquences mais sans en connaître la raison. Leur douleur, à la fois physique et mentale, me déchire le cœur», confie l’ex-marine US. Ce dernier endosse notamment le rôle de kinésithérapeute, en traitant quotidiennement les jambes tortueuses des jeunes garçons. Dans une certaine mesure, l’attention du vétéran américain adoucit une part de la souffrance de cette famille victime de la dioxine.
Malheureusement, la santé des garçons s’affaiblit ces derniers temps. Larry Vetter a demandé la permission de les loger dans sa propre maison en vue des futurs et nécessaires soins intenses.
L’ex-marine de guerre US aux côtés des jeunes victimes de l’agent orange. |
Photo : CTV/CVN |
Interrogé sur la raison pour laquelle il s’est donné corps et âme pour soigner ces deux enfants, l’ex-militaire a évoqué l’image d’une femme vietnamienne enceinte rencontrée lors d’un ratissage des forces américaines dans la province de Quang Nam (Centre). «Ce regard méprisant m’a tourmenté longtemps, durant des décennies. Arrivé à l’âge de retraite, j’ai décidé de retourner au Vietnam dans l’intention de faire quelque chose pour les victimes», révèle l’Américain. Sa rencontre avec Toàn et Nghia est un «signe du destin», avoue-t-il. Et d’ajouter : «J’espère que mon travail de soigner personnellement ces deux victimes de la troisième génération rayonnera et trouvera un large écho auprès de la communauté américaine et internationale».
En tant que journaliste indépendant, Larry Vetter effectue régulièrement des voyages dans la région à la recherche de victimes de l’agent orange. Il a réalisé des centaines de reportages illustrés et de vidéo-clips sur la douloureuse vie et la situation épouvantable des victimes, toutes générations confondues. Ces images envoyées partout dans le monde sont considérées comme «une vive revendication contre les fauteurs de la guerre, et pour une justice en faveur de ces êtres malheureux innocents».
Une chanson pour exprimer le pardon
Depuis un an, appuyé par son collaborateur vietnamien Nguyên Dai Vuong, Larry Vetter s’active à créer une page web - https://childofwarvietnam.com - dédiée au sort des petites victimes de la dioxine, mais aussi pour présenter les activités humanitaires dans et hors du pays au profit de ces derniers. On peut y trouver aussi des informations provenant d’études scientifiques vietnamiennes et étrangères. Par exemple, un rapport identifie les substances chimiques toxiques répandues par les forces américaines sur les forêts du Vietnam.
Toàn et Nghia, deux «enfants adoptifs» du vétéran US Larry Vetter. |
Photo : CTV/CVN |
Pendant la campagne destructive de Ranch Hand, des régions forestières du Centre et du Sud ont été «arrosées» de produits chimiques plus de 6.500 fois. Les environs de l’ancienne base des forces aériennes américaines à Dà Nang sont contaminés encore aujourd’hui, et à un niveau 350 fois supérieur à la norme internationale permise.
La page web https://childofwarvietnam.com sera prochainement mise en ligne, servant dès lors de point de relais entre les victimes, les organisations et les individus sensibles à la cause. «J’espère que les vétérans américains ayant participé à la guerre au Vietnam pourront d’une part faire face à leurs fautes, et d’autre part rembourser leur dette envers les victimes vietnamiennes. C’est pour nous une dette viagère, car les conséquences de l’agent orange peut toucher la troisième voire la quatrième génération des victimes directes», affirme Larry Vetter.
Pour Larry Vetter, le Vietnam est devenu sa deuxième patrie. Il a été fortement touché et inspiré par la mélodie de Bonjour Vietnam, interprétée par Pham Quynh Anh, chanteuse belge d’origine vietnamienne. Il a même demandé la permission pour réécrire les paroles. «Cette chanson, +Pardon Vietnam+, je la dédie à toutes les victimes. Au travers de la chanson, je veux exprimer mes excuses», avoue l’ex-marine. Et d’ajouter qu’il la chante chaque fois qu’il croise un enfant victime de l’agent orange. «J’espère qu’en l’écoutant, ils comprennent les sentiments venus du plus profond de mon cœur. Et qu’en chantant, je puisse adoucir une part de leur souffrance», s’exprime-t-il avec émotion.